Pourquoi Ryanair dérange, agace, fatigue, énerve

94

Il y a du bon et du mauvais dans Ryanair. Du bon, côté consommateurs qui plébiscitent le prix mais rarement la relation client. Du mauvais quand la compagnie crée selon ses propres pilotes "des esclaves du ciel aux contrats précaires, peu clairs et complexes". En dix ans, la compagnie irlandaise est devenue la bête noire du monde de l'aérien avec une réussite économique insolente et une approche globale de l'écoute "client" plutôt exécrable.

"Sans la volonté de créer une Europe sociale, réellement juste et équitable, Ryanair a de beaux jours devant elle", ont toujours affirmé les syndicats de l'aérien qui rejettent en bloc le modèle économique prôné par O'Leary, modèle qui valorise l'imagination là ou les professionnels ne voient que "des astuces marketing et un dumping social qui fait baisser les coûts du travail avec une optimisation des offres au delà du raisonnable". Une fois posée la question qui cherche à comprendre pourquoi, malgré tout, la compagnie connait de tels succès, bien malin celui qui a une réponse plus précise à apporter à ces analyses. Ryanair vend moins cher, connaît une ponctualité étonnante et attire sans cesse de nouveaux clients qui, même en volant avec la compagnie, reconnaissent qu'ils ne l'aiment pas beaucoup. C'est un cas d'école qui démontre que l'on peut aisément passer au dessus de l'affectif si le prix est au rendez vous. D'autant que le patron de Ryanair, lassé d'entendre les propos négatifs sur son compte, n'hésite pas à dire que "toute les compagnies qui le veulent peuvent faire comme lui". Il va même jusqu'à proposer son aide à celles qui voudraient franchir le pas. Mais bien malin, il précise toujours "A condition qu'elle ne viennent pas voler sur mes destinations".
De fait, Ryanair se fout des convenances, se tape des procès divers dans tous les domaines, attaque à Bruxelles le politiquement correct et joue la carte de l'ultra libéralisme pour expliquer sa méthode. Son patron souligne même qu'en France, preuve que le gouvernement est peu suivi, de nombreuses destinations sont clientes de son offre marketing ! Entendez : donne des "subventions pour voler".
Au delà, l'irlandais a des idées. La prochaine vise le voyage d'affaires, sur des lignes où il est possible de développer l'offre. Le Nord de la France avec Beauvais l'intéresse, tout comme la couverture européenne au Sud de la Loire. Bref, sans faire d'offres particulières, sans créer de services gratuits, il séduit déjà 10 % des entreprises françaises. Face au modèle EasyJet, il veut se positionner en transporteur low cost du Corporate Travel. Juste en le disant ? Et pourquoi pas ! L'homme a déjà prouvé qu'il pouvait faire bouger des montagnes... Qu'on l'aime ou pas.

Hélène Retout