Quand l’aéroport se réinvente

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Nouvelle tribune proposée par le Réseau de Veille en Tourisme, sous la plume de Chantal Neault, qui s'intéresse cette fois ci aux aéroports. Pour renouer avec des voyageurs de plus en plus irrités, les aéroports du monde entier se réinventent autour de l’expérience client et du design, jusqu’à devenir de véritables destinations en soi avec piscines, terrains de golf, musées et plus encore.

Quand l'aéroport se réinvente
Les aéroports sont de plus en plus inspirants, ambitieux et stimulants. Les plaques tournantes asiatiques, entre autres, ont fait preuve de créativité pour offrir des services adaptés aux besoins des passagers des vols long-courriers, qui doivent souvent «endurer» de très longues escales. Pensons à l’aéroport international d’Incheon, à Séoul, ou à celui de Changi, à Singapour, tous deux centrés sur des innovations comme une piscine et un spa sur le toit, un terrain de golf, un anneau de glace, ou encore des espaces aérés, naturels et lumineux. À la fin de 2012, le Conseil international des aéroports – Amérique du Nord (ACI-NA) a répertorié plus de 70 services différents offerts aux voyageurs par ses membres. Voici quelques exemples tirés d’aéroports à travers le monde.

Bain de nature…
L’aéroport Changi de Singapour est connu pour ses espaces de verdure intérieurs et extérieurs, et son mur végétalisé qui surplombe l’aire de récupération des bagages au terminal 3. On y a aussi intégré un jardin à papillons. À l’aéroport international de Kuala Lumpur, c’est une forêt tropicale malaisienne qui a été transplantée. Elle entoure le terminal principal, tandis qu’un ruisseau gargouille à travers la végétation.

L’aéroport international O’Hare de Chicago et celui de Sydney, en Australie, possèdent tous deux un jardin urbain vertical auquel s’approvisionnent en herbes fraîches et en légumes les restaurateurs de l’aéroport. Au Canada, l’aéroport international de Vancouver dispose d’un aquarium de 114 000 litres contenant plus de 5 000 créatures marines.

… et de culture
En partenariat avec des musées, certains aéroports ont transformé quelques surfaces en lieux d’exposition. C’est le cas de Paris-Charles-de-Gaulle, qui inaugurait récemment son nouvel Espace musées au hall M du terminal 2E. Celui-ci accueille sa première exposition gratuite: Rodin, les ailes de la gloire, une sélection de 50 œuvres issues du célèbre musée Rodin, à Paris. Chaque année, deux expositions thématiques seront présentées aux passagers. L’aéroport Schiphol, à Amsterdam, a son Rijksmuseum, une annexe de celui qui a pignon sur rue, tandis qu’à San Francisco, l’aéroport abrite le SFO Museum. Reconnue officiellement par l’American Alliance of Museums, cette zone muséale dispose maintenant de plus de 20 galeries d’exposition réparties dans 4 terminaux; de quoi distraire un grand nombre d’amateurs d’art. L’aéroport de Mexico a lui aussi son musée, qui présente une exposition sur les monuments mayas, et celui d’Incheon, en Corée du Sud, exploite un musée d’art regroupant de précieux objets datant de l’ère Chosŏn (1392-1910). Ce dernier compte également deux galeries consacrées aux métiers d’art. L’Aérogalerie de l’aéroport Montréal-Trudeau comprend quatre volets: arts médiatiques, art lumineux intégré, expositions photographiques et œuvres permanentes.

D’autres aéroports ont plutôt opté pour des espaces musique et offrent régulièrement des concerts gratuits, comme ceux d’Austin, de Nashville, d’Atlanta ou de Washington. Celui de Vancouver présente une programmation estivale, les Take-off Fridays, pendant que le terminal JetBlue de l’aéroport John F. Kennedy se transforme quant à lui en salle de spectacles, pour ses événements «Live from T5».

Le septième art y trouve aussi son compte dans les aéroports de Hong Kong et de Singapour, qui offrent tous deux une expérience Imax en 2D, 3D et même 4D (Changi).

Gastronomie et cuisine locale au rendez-vous

Certaines plaques tournantes créent des microcosmes culinaires de la destination. À Raleigh-Durham, en Caroline du Nord, les restaurants servent des spécialités de l’État: vins locaux, sauces, fromages et viandes. Il en va de même à O’Hare et à l’aéroport de Copenhague, dont les marchés offrent des aliments sains prêts à emporter, incluant des fruits et des légumes cultivés localement. Tous les fournisseurs ont été soigneusement sélectionnés afin de développer un univers culinaire basé sur les principes de proximité, de durabilité et de collaboration avec les producteurs locaux. L’Airbräu‎, un pub de l’aéroport de Munich, brasse sa propre bière et propose une cuisine bavaroise. Des chefs de renom n’ont pas hésité à se lancer dans l’aventure aéroportuaire. Le Daily Meal a recensé une trentaine de ces restaurants gastronomiques à travers le monde.
Quand l'aéroport se réinvente

Espaces ludiques

L’attente à l’aéroport peut être immensément stressante, lorsque l’on voyage avec de jeunes enfants. Plusieurs l’ont bien compris; à San Francisco, par exemple, petits et grands peuvent s’amuser dans des aires de jeux interactives, louer des films et des lecteurs DVD portables, et effectuer, munis d’un plan, un tour autoguidé d’une trentaine de minutes combinant la visite d’un terminal à un jeu-questionnaire pour mieux comprendre le monde de l’aviation. À l’aéroport de Zurich, on emmène les enfants prendre part à un circuit-découverte de douze stations, un cahier de coloriage sous le bras. À celui de Kuala Lumpur, on glisse, on grimpe et on s’amuse dans les nombreux modules de jeu.

Le Dream Come True Education Park de l’aéroport de Hong Kong propose des installations interactives conçues pour faire découvrir aux enfants divers métiers par des jeux de rôle. À l’aéroport Haneda de Tokyo, ils peuvent faire des courses de voitures sur un circuit de 150 pieds de long.

Santé, bien-être et sport

Quand l'aéroport se réinvente
Aéroports de Paris propose de lutter contre le décalage horaire grâce à la luminothérapie, avec ses trois espaces équipés de lampes GoLITE BLU. Ce service est entièrement gratuit et disponible en libre service. Dans la zone de détente «Recompose» de l’aéroport de San Francisco, on trouve un spa et une salle de yoga, dont le design s’inspire des jardins zen japonais.

Les aéroports d’Incheon et de Los Angeles gagnent des points auprès des sportifs amateurs, avec leur parcours de golf de 18 trous. Incheon possède aussi un practice de golf et une patinoire dont la surface est en plastique.

Des services pour la clientèle, mais aussi pour les travailleurs
Même les voyageurs les plus chevronnés peuvent parfois oublier quelques effets personnels ou manquer de temps pour effectuer certaines formalités avant leur départ. Qu’à cela ne tienne, ils pourront rafraîchir leur coiffure ou faire un saut à la clinique, puis chez le pharmacien, directement à l’aéroport. Ces services sont aussi très courus par les travailleurs des aéroports de San Francisco et de Düsseldorf.

Accroître les revenus

Les aéroports internationaux sont toujours à la recherche de nouvelles sources de financement pour accroître leurs profits — ou simplement pour se remettre à flot — tout en allégeant le fardeau financier des compagnies aériennes. Selon un sondage de l’ACI-NA, les revenus provenant des concessions (nourriture, boissons, vente au détail et services) s’élevaient à 1,5 milliard de dollars en 2011, en hausse de 12% par rapport à 2010.

Ces recettes représentent 20% des revenus totaux qui ne sont pas directement liés à l’aéronautique. Les aéroports les plus ambitieux, ceux qui ont maîtrisé l’art de distraire et finalement d’attirer les voyageurs, ont le potentiel de faire beaucoup d’argent!

Chantal Neault