Quand rumeurs, ragots et infos font salon

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On aurait pu croire que les latins étaient les champions de ces bruits de couloir qui animent la machine à café et entretiennent les inimitiés dans les entreprises. Ces petites infos, tronquées et amplifiées, qui assassinent un chef de service, son patron direct ou toute autre personne que l'on ne peut "sentir" dans son univers professionnel. L'IFTM Top Resa qui se termine pourrait confirmer cette vision.

Vous n'imaginez pas combien de sociétés devraient être rachetées ces prochains semaines ni même le nombre de boss virés, déplacés ou abandonnés sur la route du voyage d'affaires. Mais, je l'avoue, c'est l'essence même du journalisme que de trier le vrai du faux. Je reconnais que nous sommes les premiers à les traquer au nom du sacro-saint "il n'y a pas de fumée sans feu". Bref, certains nous expliquent que nous faisons les poubelles... Qu'ils sont les premiers à remplir. Je vous rassure, cette vision était générique, nous ne sommes pas portés sur le "people" à DéplacementsPros.

Alors pourquoi cette grande tirade ? C'est que pour la première fois, une équipe de sociologues américains s'est penchée sur les raisons qui poussent les salariés à rechercher le ragot comme l'écureuil la noisette. Nous avons la réponse, là aussi éculée : "Le malheur des uns fait le bonheur des autres" ! Et ces "scientifiques" de l'université de Chicago démontrent qu'il en est de même dans le monde entier. De Paris à Vladivostok ou de New York à Singapour. Le ragot est le moteur de l'entreprise, une partie de la soupape morale indispensable à la vie en collectivité. Mais si l'étude, fort longue (480 pages) détaille le mécanisme du ragot et de la rumeur, elle s'attache surtout à en commenter la structure. Du point de départ à l'écroulement (ou la confirmation) du propos. Et tout cela n'est qu'affaire de pouvoir et de réassurance. Pouvoir sur son collègue qui ne sait pas. Réassurance dans un univers fait de pressions où l'image personnelle est importante pour progresser.

Je ne rentrerais pas dans le détail complet de ce travail, mais je retiendrais une petite partie de la conclusion, je cite : "Il est indispensable de ne pas chercher à démentir toutes ces informations souterraines. Il faut les laisser vivre car elles sont le signe de la bonne santé d'une société et de l'expression de son personnel". Au fait, vous ai-je dit que le patron de.... ?

Marcel Lévy