Ryanair, comme beaucoup de low cost, veut anticiper une crise en 2012

57

Malgré d'excellents résultats économiques pour 2010, le patron de Ryanair se dit inquiet. Pour la première fois, Michael O'Leary reconnait que le modèle est fragile quand le développement potentiel arrive quasiment à saturation. Avec 1500 vols par jour, la compagnie irlandaise a exploité 89 % des lignes potentiellement rentables et ne peut compter pour se développer que sur une hausse de ses tarifs et une restriction des coûts d'exploitation.

Pour une fois ni flamboyant, ni agressif, le patron de la compagnie irlandaise a fait preuve d'une certaine retenue, hier lundi 23 mai lors d'une conférence de presse tenue à Dublin, pour évoquer le développement de sa compagnie. En prédisant un ralentissement potentiel de 4% de la croissance du trafic, Michael O'Leary constate indirectement que le modèle qu'il a créé devra rapidement évoluer pour conserver une rentabilité insolente. D'autant que les budgets marketing que sollicite la compagnie pour venir se poser sur un aéroport secondaire se tarissent. Bien des élus en Europe refusent désormais de passer à la caisse, quitte à prendre le risque de voir les touristes se tourner vers d'autres destinations. Selon d'anciens collaborateurs de Ryanair, ces sommes versées au titre du marketing pèseraient environ 30 % du chiffre d'affaires de la compagnie. La compagnie risque ainsi d'être prise en cisaille par un double effet Kiss-Cool.
Mais Michael O'Leary a t-il pour autant une réponse concrète aux questions qu'il pose ? S'il évoque bien une mise au hangar d'avions pour l'hiver, associée à une refonte des tarifs, il se refuse pour l'instant à attaquer EasyJet sur son terrain. Pas question de faire évoluer son modèle et de s'installer sur les aéroports principaux, il reste adepte des plate-formes secondaires, quitte à poursuivre les fausses appellations "géographiques" créées par sa compagnie et fortement attaquées par la Communauté Européenne qui pourrait bien l'attaquer d'ici peu pour "tromperie". Il va lui falloir trouver d'autres pistes d'atterrissage pour renforcer ses liaisons point à point, mais lesquelles, les villes les plus fréquentées étant déjà desservies ? Ryanair n'est pas la seule low cost à s'interroger sur son avenir. EasyJet, qui s'est construit une respectabilité commerciale, a été la première à reconnaître qu'il fallait faire bouger les lignes pour ne pas disparaître. Mais là aussi, pas de solutions déclarées et peu de stratégie affirmée. Le modèle à bas coût est-il naturellement appelé à se reconstruire ? Certainement disent les experts des compagnies régulières, eux aussi soumis à forte pression. La saisonnalité et les risques géopolitiques associés aux coûts d'exploitation ne permettent plus d'envisager un avenir serein sur un marché largement couvert par des compagnies low cost. D'autant, selon des comparateurs de prix, que les volumes réels de places à prix bas diminuent. Moins de 27 % en 2010 contre 41% en 2008. Décidément Richard Branson, le patron de Virgin, avait raison. Pour finir millionnaire dans l'aérien... Il faut commencer milliardaire.

Hélène Retout