Ryanair : la victoire d’un caractériel

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On peut commenter pendant des heures les erreurs de Michael O’Leary, le patron de Ryanair, mais force est de constater que tout lui réussit ou presque. Caractériel flamboyant jusqu’au bout des ongles, capable de se fâcher avec un pays tout entier, le bouillonnant patron de la compagnie irlandaise a imposé un modèle économique à l’aérien qui fait grincer des dents la concurrence. A marche forcée il oblige les compagnies régulières à se plier à ses envies, ses décisions, son organisation. Le low cost lui doit tout et bien d’autres grands du transport aérien s’en inspirent.

Sa dernière fâcherie pourrait faire sourire si elle ne mettait pas en péril les ambitions économiques et touristiques de la Hongrie. En supprimant 13 liaisons vers Budapest, Michael a voulu « punir » les douanes locales, accusées d’en faire trop en voulant systématiquement contrôler ses équipages. L’affaire peut faire sourire mais elle est prise très au sérieux par le gouvernement hongrois qui veut faire revenir O’Leary à la raison. Il n’en a que faire. Il joue avec ses avions comme un colonel à la retraite avec ses soldats de plombs. «Si tu es méchant, je t’envoie ma cavalerie. Si tu me fais du mal, je pilonne ton artillerie économique» pourraient être ses répliques… Comique si tout cela n'avait pas un impact économique réel. En fait la compagnie n'est pas en forme olympique, elle a enregistré depuis quatre mois de novembre 2011 à février 2012 un recul de son trafic. Mais O’Leary souligne que la conjoncture frappe toutes les compagnies et que, finalement, le recul de 2% de Ryanair en février 2012 est bien moins important que celui constaté chez les autres.
Pour ses concurrents, la méthode O’Leary a ses limites. Elles commencent à être atteintes. Quand Ryanair s’en va… Il y a toujours un concurrent pour occuper la place avec des demandes «marketing» (entendez un chèque) moins élevées. Bref, la nouvelle stratégie est de dire si Ryanair s’en va, piquons lui la place. Car après tout, ce qu’il fait, tout le monde peut le copier. Pour la première fois, faire du Ryanair n’est plus compliqué. Air France ou la Lufthansa regardent le modèle et s’interrogent sur la faisabilité d’une structure comparable. Bref, être trop caractériel peut désormais coûter cher à Ryanair qui, malgré d’excellents résultats économiques, sait qu’il faudra être malin pour ne pas se faire bousculer sur le court et moyen courrier.

Hélène Retout