SNCF et Trenitalia, la bataille du train est bien engagée

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La solidarité européenne du rail ne résistera finalement pas à la concurrence. En annonçant hier mercredi 16 janvier la fin de l'alliance entre la SNCF et Trenitalia dès la fin de cette année 2011, Guillaume Pepy confirme tout haut ce qui se susurre tout bas : la guerre européenne du ferroviaire est belle et bien engagée. Il ne fallait pas être devin pour croire un seul instant que la concurrence qui s'annonce se ferait "en toute amitié" entre les grandes entreprises européennes du domaine. Trenitalia et Veolia devraient être opérationnels dès le début 2012 sur des lignes à fort potentiel commercial, là où justement la SNCF réalise d'excellents résultats financiers.

On pourrait tergiverser pendant longtemps sur les raisons qui conduisent la SNCF à se séparer de son associé italien. Il faudra seulement retenir de cette décision qu'elle marque le début des grandes manœuvres européennes qui devraient, à terme, voir une partie des partenaires de l'alliance Railteam chercher à faire cavalier seul sur le marché prometteur de la très grande vitesse. Car contrairement à ce que disent aujourd'hui les Allemands, les Belges, les Hollandais et les Français, la concurrence ne pourra se mettre en œuvre qu'avec des entreprises indépendantes, libres de décider de leur stratégie commerciale. D'autant, et tout le monde le dit, que le marché du train n'est pas forcément celui du grand public. Ce sont les voyageurs d'affaires et les services ferroviaires associés à leurs déplacements qui sont générateurs de revenus.
La grande vitesse, qui entre en concurrence avec les vols de moins de 4 heures, ouvre des portes et des marchés encore insoupçonnés aujourd'hui. Ne doutons pas que dans les prochaines semaines des signes rassurants seront donnés par la SNCF à ses concurrents potentiels et néanmoins confrères européens. Les sourires que lui rendront ses "alliés de papier" ne seront que les façade d'une profonde mutation. A en croire les projets ferroviaire dans les cartons de nos plus proches voisins, il faudrait être naïf pour croire que les alliances d'aujourd'hui sont gravées dans le marbre.
Que faut-il alors attendre de cette concurrence ? Dans un premier temps pas grand-chose. L'exploitation du réseau ferré français à un coût que la SNCF n'arrête pas de dénoncer et de condamner. Il y a peu de raisons que les nouveaux entrants bénéficient d'avantages financiers sur ce sujet. Si la bataille doit se faire sur les hautes contributions, nul doute que le prix ne sera pas le seul argument déployé par les concurrents. Les tarifs au final ne baisseront pas et la ponctualité tant attendue pourrait bien être bousculée par une sur-fréquentation des trains sur des liaisons très demandées. Voilà donc posé le cahier des charges de cette nouvelle donne dans le marché du transport ferroviaire. Ce qui se joue aujourd'hui ne sont que les prémices de ce qui se mettra en place dans les prochains 24 mois. L'orchestre et la partition sont désormais installées, reste à savoir à quoi ressemblera la musique et qui payera l'orchestre.

Marcel Lévy