Sois belle et tais toi !

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Je viens de vivre prenant 48 heures la vie «rêvée» de mes lecteurs. Départ de Paris un samedi à l’aube, 12h30 de vol vers Hong Kong avec Cathay Pacific. Une journée de travail et retour avec le vol du soir. Je suis parti en premium éco et revenu en business. Je me sens presque un héros. Vous dire que ce fut simple ne serait pas vrai, non pas en raison du voyage mais tout simplement par la fatigue qui s’accumule. Que ce fut agréable de disposer d’un salon au calme, d’un siège qui devient lit et des services associés a atténué la tâche. Oui, dix fois oui. Le confort m’a fait oublié la rapidité du séjour. Ou presque.

Et alors, quoi de neuf superman, allez-vous me demander ? Rien, c’est vrai, si ce n’est la confirmation que pour être efficace en très peu de jours, il vaut mieux bien voyager. Lapalissade ? Sans doute mais réalité sur le terrain. A quoi cela sert-il d’entrer en compétition au bout du monde si, à l’arrivée, fripé et défait, on doit en plus être le meilleur de sa classe le temps d’emporter le morceau ? Mon contact à Hong Kong ne m’a pas caché que, pourtant, bien des entreprises françaises oublient la qualité sous prétexte que la crise empêche les investissements. Et de me raconter cette anecdote terrible : en janvier dernier, son groupe envoie une directrice du développement rencontrer l’entreprise qui assure la logistique sur place à Hong Kong. Economie et exemplarité obligent, elle part en classe éco. 12H30 de voyage et un premier rendez vous à 11 heures. Trop de circulation pour passer à l’hôtel, direction la table des négociations en direct. Vous devinez la suite ? Elle s’embrouille pour au final accepter une baisse de 10 centimes par objet transporté avec une clause de révision automatique des prix en cas de baisse des ordres. Au final, le déplacement va lui couter 12% de plus que le coût actuel en raison de la fluctuation des commandes passées en Chine. Les 4000 € du billet en business ont été économisés, pas les ennuis qui ont suivi. Et tout cela, selon mon correspondant, pour coller à une règle dogmatique de la direction qui n’acceptait aucune dérogation. Quelle leçon en tirer ? Que le bon marché coûte cher sur des voyages importants. «Car vois-tu», me précise mon contact, «Une vraie politique voyage ne se plie pas à un nombre d’heures de vol mais doit aussi prendre en compte les enjeux du déplacement et les buts à atteindre. Et pour le faire tous les jours ici, je sais qu’il vaut mieux être en forme pour la négociation !». En quelque sorte, la fin du "Sois belle et tais toi" au bénéfice du "Sois efficace avant tout".

Marcel Lévy