Voiture partagée, autonome et connectée : future révolution ?

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Professionnel au sein d'une entreprise de conseil et de services associés à la mobilité, Thibaud Deletraz est un observateur attentif du transport, apportant un regard nouveau et différend sur son évolution. Nous le retrouverons régulièrement dans les colonnes de DéplacementsPros.

Le monde de l’automobile est en pleine effervescence : d’un côté, les habitacles de nos « déplaçoirs » se préparent à accueillir pour de bon le numérique et ses bouquets de services aussi inutiles qu’indispensables. Après des expérimentations d’Internet embarqué plutôt onéreuses et diversement réussies chez les marques Premium allemandes, voilà que Google et Apple s’emparent véritablement du sujet. La démocratisation du web embarqué est en marche ! La philanthropie de ces deux firmes tentaculaires restant à prouver, on imagine aisément l’énorme gisement de développements que représente le numérique embarqué : en effet, nos voitures sont aujourd’hui l’un des derniers territoires pratiquement (et légalement, pour le conducteur au moins) « anumériques » de nos vies trépidantes.

Alors que la voiture se connecte, voilà que dans le même temps elle se fait autonome. Le XXIème siècle ne devait pas voir apparaître la voiture volante, rêve éveillé des sixties, mais bien la voiture qui conduit toute seule. Vous en conviendrez, cela tombe plutôt bien : les activités numériques – et nos permis à points – s’accommodent mal d’une conduite en toute sécurité… mais encore plus que pour le numérique, la voiture autonome pourrait bien tout changer. Sécurité, économies de carburant, transformation du temps de conduite en « temps utile » pour le conducteur… les acteurs des transports publics pourraient bien très prochainement s’arracher les cheveux.

L’équation de la mobilité comporte de plus en plus d’inconnues ; les promesses (à confirmer) de la voiture autonome font briller les yeux de l’industrie automobile, qui tient encore aujourd’hui une place centrale dans l’économie française et génère des centaines de milliers d’emploi. Davantage que la voiture électrique, voici peut-être le second souffle inespéré que tous les constructeurs attendaient.

Pour couronner le tout, la croissance accélérée de la voiture partagée bouscule un peu plus les modèles de mobilité urbaine et périurbaine. Enfin, après tant d’années d’usage en conducteur unique, la voiture va être utilisée de manière optimum et plus rationnelle.

Pourtant, il ne fait guère de doute que l’automobile individuelle n’est pas la solution de mobilité de demain. Malgré la crise économique, les investissements dans les infrastructures de transport public se sont poursuivis, bon an mal an. Il reste beaucoup à faire pour rendre leur niveau de service satisfaisant, et pour qu’ils répondent au besoin de mobilité de chacun. Les (r)évolutions qui attendent l’automobile ne feront que retarder un peu plus son déclin, qui s’annonce malgré tout comme inexorable.

Thibaud Deletraz