Les représentants du secteur du transport aérien réagissent aux propos du patron de la SNCF qui appelle à mettre en place une taxe sur le kérosène.

“Ce n’est pas le train qui est trop cher, c’est l’avion qui ne l’est pas assez”. Interrogé par la commission de l’Assemblée nationale, lors d’une audition mercredi dernier, Jean-Pierre Farandou, PDG de la SNCF, a appelé à une taxation supplémentaire du transport aérien. Et le patron de la compagnie ferroviaire de rappeler de nouveau l’absence de taxe sur le kérosène, « alors que moi je paie des taxes sur mon énergie, sur mon gazole ». Sans surprise, les réactions des compagnies aériennes et de leurs représentants ne se sont pas fait attendre.

La Fnam (Fédération Nationale de l’Aviation et de ses Métiers), la principale organisation professionnelle du secteur, a ainsi tenu à indiquer que les tarifs compétitifs du transport aérien ne provenaient pas d’une absence de taxation du secteur. A ce titre, l’exemple du prix du billet d’avion d’une compagnie française entre Paris et Nice (en 2019, avant la pandémie) est instructif. S’il coûte 92 euros, la recette revenant au transport s’élève à 42 euros. Les taxes et redevances non affichées sur le billet représentent 15,60 euros, et celles qui le sont 32,22 euros. Ainsi, le total des taxes et redevances constituent plus de la moitié (53%) du prix total payé par le passager.

Taxer davantage les compagnies aériennes n’aiderait en rien à la transition énergétique, affirment les représentants du transport aérien. Lesquels appellent les pouvoirs publics à contribuer plutôt aux investissements nécessaires – notamment dans le domaine des carburants alternatifs durables (SAF) – permettant d’atteindre l’objectif de neutralité carbone que s’est fixé l’Union européenne.

Augustin de Romanet, le PDG d’ADP, l’invité ce week-end de l’émission de France Inter On n’arrête pas l’éco, n’a pas dit autre chose : « Taxer le kérosène est absolument stérile. Il vaut mieux s’employer à produire le plus rapidement possible des carburants durables qui coûtent nettement plus chers et vont renchérir le prix des billets d’avion».  Et le patron du groupe gestionnaire de 27 aéroports dans le monde dont les plateformes parisiennes (Roissy-Charles-de-Gaulle, Orly et le Bourget) de lancer lui aussi une pique à l’adresse de Jean-Pierre Farandou, rappelant que chaque contribuable qui paie l’impôt sur le revenu avait consacré 900 euros à la SNCF en 2018, pour une somme globale de 15 milliards d’euros, pour financer les investissements, le fonctionnement et les retraites des cheminots de la compagnie ferroviaire. « Si on faisait payer le vrai prix du train, il serait beaucoup plus cher… » a-t-il ajouté.

D’aucuns notent aussi que les compagnies aériennes, déjà très vulnérables dans le contexte sanitaire actuel, ont dans le même temps besoin de renouveler leurs flottes avec des avions moins gourmands en kérosène, ce qui pèse sur leurs trésoreries.

L’IATA, l’organisation internationale du transport aérien, est montée elle aussi au créneau, cet été, lorsque la Commission européenne a dévoilé son ambitieux projet Climat, lequel compte parmi ses propositions une taxe progressive du kérosène, sur dix ans, pour les vols à l’intérieur de l’UE (vols domestiques inclus). Sur le sujet, lire aussi notre article Le projet européen de taxation du kérosène «contre-productif selon IATA».