Grève SNCF, ça donnera quoi lundi matin?

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Une, et deux, et trois journées de grève des cheminots (en comptant ce vendredi). Déjà ! Jusqu’à quand ? Encore demain et les jours suivants ? Rien n’est sûr. Ce qui est certain, c’est que ce mouvement finira bien par s’arrêter un jour. Tout le reste n’est que supputations. Mais supputons aussi…

Il est toujours de bonne guerre – encore ce vocabulaire militaire appliqué aux relations sociales à la SNCF, mais il s’y prête ! – de laisser planer le doute sur la mobilisation dans les rangs opposés. Une grève à la SNCF c’est d’ordinaire 25 %, 30 %, 40 % maxi de participation. Jamais plus. Les jours passant, même si la mobilisation faiblit, la désorganisation vient renforcer le blocage, redonnant l’espoir de victoire aux ultimes combattants.

Avec près de 30 % de grévistes le premier jour, 5 % seulement de moins le second, avec peut-être des surprises au 3ème jour puisqu’un vendredi il y a davantage de cheminots appelés à leur poste, il serait donc imprudent de déjà parier sur un retour rapide à la normale. Ce pourrait être au contraire un rebond. Mais rien n’est sûr.

Ce qui est sûr, c’est que 70 % des cheminots au travail ne signifie pas qu’ils partagent dans la même proportion l’analyse de la CFDT - qui n’a pas appelé à ce mouvement - ou de l’UNSA qui l’a renvoyé à toutes fins utiles au 17 juin après ultimes négociations.

La CGT donne déjà des signes tangibles de reprise assez rapide…

La CGT est bien seule. L’UNSA lui ayant fait faux bond, le tour de piste avec SUD, toujours à la suspecter de tentative réformiste, ne lui est pas d’une grande aide. Car quoiqu’il arrive, sauf K.O. ou forfait improbable et inimaginable du Gouvernement, il est vain d’attendre de Sud une quelconque temporisation.

C’est donc la CGT qui, le moment venu, devra donner à ses mandants le signe officiel de la reprise. A l’heure où nous écrivons, ce n’est pas encore le moment. La CGT exige toujours une réécriture totale du projet de loi, une modification du calendrier et un report des débats parlementaires. Ce qui pourrait être suffisant pour une paix (au moins temporaire) des braves. La CGT doit pouvoir expliquer l’atteinte de cet objectif limité à ses troupes et résister à quelques soubresauts sous un ou deux jours. Mais là encore, rien n’est sûr.

Ce qui est sûr, c’est que la CGT sera la première à appeler à la reprise. Et à ce moment là, ses détracteurs et concurrents syndicaux ne lui feront aucun cadeau.

Et ça a déjà commencé.

Les exigences minimales de la CGT ne sont pas inaccessibles…

Ce sera au Ministre de répondre. Mais tant qu’à devoir sérieusement envisager de répondre positivement à cette demande de détente du calendrier, mieux vaudrait qu’il le fasse vite pour que la surenchère de «retrait du projet de loi» n’emporte pas ou ne déstabilise pas la CGT tant qu’elle est encore dans de relatives bonnes dispositions. Rien n’est encore sûr dans les intentions du gouvernement.

Ce qui est sûr, c’est que la CFDT, isolée dans son soutien à cette réforme qu’elle juge indispensable (quoique avec amendements aussi !), aurait bien du mal à justifier que tous comptes faits, elle ne préfère pas une procédure parlementaire apaisée.

Les cheminots en grève expriment surtout une crainte de l’avenir…

Suspectés de bénéficier d’avantages exorbitants, vilipendés de manière souvent fort injuste, irréfléchie et fort peu experte par les médias, nullement responsables des dysfonctionnements SNCF / RFF (penser à aller demander des comptes à ceux qui ont initié cette séparation et qui trouvaient ça très bien, y compris dans les rangs de la Direction SNCF), rare groupe social encore capable de mener de véritables combats sociaux (au risque que ce soit pour des causes perdues), les cheminots s’imaginent dans une citadelle assiégée.

Le Ministre n’arrête pourtant pas de souligner que tout ce qui inquiète au plus haut point les cheminots, leur Statut, le sort de la dette non pas de leur entreprise mais du système ferroviaire globalement, qui pèse bien évidemment sur sa stratégie économique et donc sa politique sociale, les conditions de travail et d’utilisation du personnel (ces dernières étant pourtant déjà un véritable patchwork de flexibilité), ne sont pas dans le projet de loi. On peut le croire et sans doute les cheminots devraient-ils le croire. Bien que rien ne soit moins sûr tant il s’agit d’assembler les pièces d’un puzzle dont seuls quelques acteurs ont connaissance de l’image finale. Secret d’Etat, d’entreprise… ou d’Europe. Au choix !

Ce qui est sûr c’est que, emplis de craintes et de doutes, les cheminots se barricadent et jettent de l’huile bouillante sur les assaillants et tout ce qui bouge aux alentours. Et peut-être, crient-ils avant d’avoir mal !

SNCF, Pepy en tête, n’acceptera pas de manger son chapeau…

Là n’est pas la question. Un Président de SNCF, ça fait ce que son Ministre lui dit. Sinon, il démissionne. Mais quand il s’agit de Guillaume Pepy tel qu’on le connait, rien n’est évidemment moins sûr.

Ce qui est sûr, c’est qu’une simple satisfaction de la demande CGT de détente du calendrier et de remise à plat de certaines choses ne mange pas de pain.

Guillaume Pepy pourrait même déclamer devant les micros (il aime ça) :
- la bonne nouvelle c’est qu’il va y avoir une réforme, ce que tout le monde accepte et attend car elle est nécessaire ;
- il appartient maintenant aux cheminots qui ont légitimement pu être inquiets et troublés de reprendre leur mission de service public à laquelle nos concitoyens, nos clients, nous tous, sommes si attachés car c’est dans l’A.D.N. de SNCF ;
- et puis un grand merci aux équipes qui ont continué à assurer le trafic, à ceux qui n’ont pas lésiné sur leurs efforts pour renseigner et aider nos clients dans ces heures difficiles pour tous.

Le discours de Pepy avant l’heure, si ce n’est pas de la supputation ça ! Là non plus, bien évidemment, rien n’est sûr.

Ce qui est sûr c’est que ça va être sacrément intéressant à analyser et observer. Posture, mise en scène disait la CFDT. Oui, mais pas que de la CGT !

PAT.