Les pilotes en emploi précaire en Europe ?

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L'ECA (Fédération européenne des associations de pilotes), l'AEA (Association européenne des compagnies aériennes) et l'ETF (Fédération européenne des travailleurs des transports) organisent une conférence les 12 et 13 février 2015 à Paris. Les 3 organisations présenteront une étude sur les formes atypiques d’emplois dans l’aviation. Le document révèle par exemple que 4 pilotes sur 10 âgés de moins de 30 ans sont aujourd’hui des travailleurs indépendants ou des intérimaires.

Une récente étude de l’Université de Gand (Belgique), financée par la Commission Européenne, est présentée en détails ces 12 et 13 février. Mais les 3 organisations révèlent d'ores et déjà certaines de ses découvertes. Le rapport indique qu'un nombre grandissant de pilotes vole sans aucun lien direct avec la compagnie aérienne pour laquelle ils opèrent, en particulier dans le secteur des compagnies à bas coûts.

Cette enquête, basée sur la participation de plus de 6000 personnes, estime que plus d’1 pilote sur 6 en Europe peut être considéré comme un travailleur «atypique», à savoir opérant pour le compte d’une agence de travail temporaire, en tant que travailleur autonome ou sous la forme de contrats à la demande et sans salaire minimum garanti. Selon Emmanuel Jahan, Président du Comité de dialogue social européen dans le secteur aérien, l’un des commanditaires de l’enquête explique «L'étude montre clairement que ces pilotes s’inquiètent de la précarisation de leurs conditions de travail et du lieu d’acquittement de leurs charges sociales. Ce phénomène éprouve grandement les équipages concernés. Pour les partenaires sociaux, un solide principe de "base d’affectation" pour l'équipage demeure un critère fondamental pour la définition commune du droit du travail et de la sécurité sociale».

Selon les chercheurs, le statut de travailleur autonome est l'un des types d’emplois atypiques les plus répandus dans le secteur aérien. 7 pilotes indépendants sur 10 travaillent pour une compagnie aérienne à bas coûts. «Paradoxalement, ce type de "travail autonome" est parfois utilisé pour masquer ce qui est en réalité un emploi régulier de salarié ; une situation qui créé une distorsion de concurrence sur le marché au profit des compagnies aériennes qui utilisent ce système», explique le communiqué.
Ces «faux travailleurs autonomes» auraient également un impact sur la sécurité. Près de la moitié des pilotes indépendants se déclare juste incapable de contester les instructions à caractère économique de la compagnie, même lorsqu’elles contreviennent à la sécurité.

En outre, les jeunes sont les plus touchés par le phénomène. 40 % des navigants âgés de 20 à 30 ans volent désormais sans être directement employés par une compagnie aérienne. «Alors que trouver un emploi demeure difficile, ils sont également confrontés à des situations où ils finissent par "subventionner" leur propre activité ; par exemple, en payant une compagnie pour utiliser ses avions afin d'acquérir de l'expérience. Ce principe, autrement appelé le "pay-to-fly", crée de potentiels conflits d'intérêts vis à vis de la sécurité et constitue une exploitation financière pure et simple des individus».