SNCF : la grève de la pince, rêve ou cauchemar ?

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Dans un communiqué du 26 juin, la fédération syndicale SUD RAIL appelle à la légalisation de la «grève par la gratuité». L’organisation syndicale annonce aussi réfléchir à la mise en œuvre de la grève du contrôle pour continuer à lutter contre la réforme ferroviaire. Une perspective qui n’est pas sans rappeler l’appel aux usagers à refuser de présenter leur titre de transport. De quoi inspirer un Coup de Pat.

La grève, tout le monde est contre ou presque. Il y a d’abord les grévistes qui, au-delà de leur justifications sociales, ne manquent jamais d’exprimer leurs regrets de devoir recourir à ce mode d’action. Et puis les usagers qui n’acceptent pas d’être pris en otage. Des visions opposées qui convergent finalement vers un modus vivendi : il n’y a qu’à faire en sorte que les trains roulent sans devoir payer ! Au journal télévisé en direct de vos gares préférées !

Rouler gratuit les jours de grève est une idée que SUD RAIL avait déjà exprimée en 2007. Elle est bonne, non ? Youppie, demain il y a grève !

Trop beau. Chacun sent bien que ça coince quelque part. D’abord, sauf exception locale, le modèle économique du transport en général, du transport ferroviaire en particulier, ne repose pas sur la gratuité de l’usage. Faire rouler des trains, même en mode dégradé et service minimum ou garanti, implique que les sous rentrent quelque part. Et encore, on nous explique qu’il manque des recettes.

Le prix payé reste la contrepartie du service rendu. Sinon, impossible de rémunérer les salariés, de régler les prestataires, l’énergie, les péages pour l’usage des infrastructures…

Imagine-t-on dans la grande distribution par exemple les consommateurs pouvant aller se servir dans les rayons sans rien payer, au motif que le personnel aurait décidé d’un mode d’action concertée passant par la gratuité du contenu du chariot ou du panier ?

Usagers, clients, voyageurs, consommateurs, contribuables… dans vos rêves !!!

Mais imaginons ! Dans un tel schéma, les «grévistes» assurent leur service normalement. Ce sont les usagers qui tranchent. Favorables au mouvement, ils ne s’acquittent pas de leur titre de transport ! Hostiles à la grève, ils achètent leur billet ! C’est le monde des Bisounours.

Dans l’histoire sociale de la SNCF, il est déjà arrivé que les contrôleurs appuient leurs revendications par une «grève de la pince». C’était en 1989. L’affaire fit les grandes heures des juridictions sociales. Pour finalement conclure que les retenues de salaires opérées contre les contrôleurs qui n’avaient pas assuré la sauvegarde des recettes (c’est comme ça que la SNCF nomme le contrôle des billets) étaient des sanctions pécuniaires prohibées

En fait, à bien lire et analyser les débats devant la Cour de cassation, il appartenait à la SNCF d’engager des procédures disciplinaires contre ces contrôleurs et de les sanctionner comme de droit pour inexécution volontaire du contrat de travail. L’affaire en resta là. Il n’y eut depuis pas d’autre initiative de ce genre, nul syndicat de cheminot ne souhaitant faire courir à ses mandants le risque de sanctions potentiellement lourdes.

Mais en 2009, sur le plateau de l’émission «Revu et corrigé» (France 5) Benoît Hamon (PS) et Eric Raoult (UMP) exprimèrent à leur tour leur intérêt pour la grève de la gratuité.

Ah ben alors, SUD RAIL, PS et UMP d’accord pour une fois ! Il n’y a donc plus qu’à…

Qu’à Guillaume Pepy ne plaise !

Pat