Bruxelles soupçonne MasterCard de « gonfler artificiellement » les coûts des paiements par carte

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La carte bancaire est un indispensable pour le voyageur d'affaires au même titre que le smartphone ou le passeport. Mais les coûts de paiement par carte bancaire en Europe pourraient être faussés. Bruxelles accuse MasterCard de les «gonfler artificiellement».

La commission européenne a adressé, le 9 juillet 2015, une "communication des griefs" à MasterCard pour ce qui concerne ses règles transfrontières et ses commissions d'interchange interrégionales. La commissaire chargée de la Concurrence, Margrethe Vestager, explique dans un communiqué: "Nous soupçonnons actuellement MasterCard de gonfler artificiellement les coûts des paiements par carte, au préjudice des consommateurs et des commerçants de l'UE". Elle ajoute: "Nous sommes préoccupés à la fois par les règles appliquées par MasterCard aux opérations transfrontières au sein de l'UE et par les commissions réclamées aux commerçants pour recevoir les paiements effectués au moyen de cartes émises en dehors de l'Europe".

Alors que les entreprises et les consommateurs européens réalisent annuellement plus de 40% de leurs paiements hors espèces par carte, Bruxelles soulève deux points d'inquiétude :

- les règles de MasterCard empêchent les commerçants situés dans un pays à commissions d'interchange élevées de bénéficier de commissions d'interchange plus basses offertes par une banque acquéreuse située dans un autre État membre (l'«acquisition transfrontière»). La Commission craint que "les règles de MasterCard en matière d'acquisition transfrontière ne limitent les possibilités pour les banques de se livrer une concurrence tranfrontière sur les prix applicables aux services de réception des paiements par cartes et ne restreignent ainsi la concurrence, en violation des règles de concurrence de l'UE, ce qui conduirait à une hausse des prix pour les commerçants et pour les consommateurs".

- Bruxelles redoute également que le niveau élevé des "commissions d'interchange interrégionales" appliquées par l'entreprise américaine ne soit pas justifié. "Ces commissions sont versées par une banque acquéreuse pour les opérations effectuées dans l'UE au moyen de cartes MasterCard émises dans d'autres régions du monde. Par exemple, les commissions versées par une banque acquéreuse lorsqu'un touriste chinois utilise sa carte pour payer dans un restaurant à Bruxelles sont jusqu'à cinq fois plus élevées que celles payées par un consommateur utilisant une carte émise en Europe", explique le communiqué. "Comme ces commissions interrégionales représentent des centaines de millions d'euros chaque année, la Commission craint que ces commissions interrégionales élevées n'augmentent les prix pour les commerçants, ce qui pourrait ensuite conduire à une hausse des prix des produits et des services pour tous les consommateurs, et pas uniquement pour ceux utilisant des cartes émises en dehors de l'UE ou payant avec une carte", ajoute-t-il.

La Commission européenne soupçonne MasterCard de se rendre coupable d'entente sur les prix et d'abus de position dominante, et veut entendre la société sur ces sujets. Si elle estime en effet que l'entreprise est en faute, elle lui infligera une amende dont le montant maximal pourra atteindre 10% de son chiffre d'affaires.

MasterCard a indiqué qu'elle était prête à "répondre" et "travailler avec la Commission européenne".