France : la sûreté aérienne a besoin d’une meilleure coordination, mais qui va payer ?

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Comment renforcer la sûreté aérienne en France? Pour Vincent Capo-Canellas, sénateur de la Seine-Saint-Denis chargé d'un rapport sur le sujet, la réponse est : une meilleure coordination entre les différents acteurs du secteur, des circuits de décision plus courts et le renforcement de l'analyse des risques. Il appelle également à plus de transparence sur la taxe sécurité et propose de la faire payer aux magasins d'aéroport.

Pour Vincent Capo-Canellas, sénateur de la Seine-Saint-Denis, il est important de mieux organiser la gouvernance de la sûreté aérienne et raccourcir le circuit de décision. "Les acteurs impliqués dans la sûreté aérienne sont trop nombreux et leur coordination est parfois trop difficile", explique-t-il. "Quand je demande : "Qui est le patron ?", personne ne sait me répondre", explique t-il. Le sénateur préconise ainsi la création d'une agence de sûreté du transport aérien rassemblant les fonctionnaires de l'ensemble des services concernées : DGAC, PAF, GTA, douanes, services secrets. Autre point pour améliorer la réactivité du secteur : mettre en place un préfet délégué chargé de la sécurité et la sûreté sur la plate-forme d'Orly, comme c'est déjà le cas sur Roissy.

Pour le sénateur, le renfort de la sécurité passe également sur une meilleure coordination entre les services de l'état et les grands acteurs privés comme les compagnies aériennes et les aéroports par exemple. "Le dialogue avec les entreprises existe de manière informelle car les gens se connaissent mais il y a besoin d'institutionnaliser cela afin faciliter de les échanges".

Pas de contrôle à l'extérieur des plates-formes
Concernant l'amélioration du dispositif mis en place dans les plates-formes a proprement dit, l'élu chargé du rapport sur le financement et l’efficacité de la sûreté du transport aérien propose d'étoffer la présence des services de renseignement dans les aéroports et d'affecter davantage de policiers aux frontières pour résorber les files d'attentes aux postes de contrôle.

Il prône également la multiplication des contrôles sur les vols entrants, la systématisation de l'analyse comportementale ou encore l'expérimentation du contrôle différencié des passagers afin de concentrer les moyens sur les personnes présentant le plus de risques et alléger les contrôles sur celles en présentant moins.

En revanche, Vincent Capo-Canellas écarte totalement un dispositif, les portiques à l'entrée des aérogares. "Ces installations sont coûteuses et inefficaces. Elles créent des files d'attente à extérieur qui sont vulnérables". Pour lui, il est également important que les acteurs du secteur travaillent davantage sur les menaces émergentes comme les drones ou la cybersécurité

Une taxe sécurité étendue aux magasins
Les aéroports français sont en moyenne 35% plus chers en matière de sûreté que leurs homologues européens. Si cette différence est en partie imputable au coût du personnel, plus élevé en France, le rapport pointe également du doigt le système de financement par la taxe d'aéroportuaire "Il n'incite pas assez les plates-formes à maîtriser leurs dépenses et à maximiser leur efficience", explique Vincent Capo-Canellas. Il appelle à plus de transparence: "L'ensemble des intervenants devraient échanger sur ce qui rentre ou non dans la taxe".

Actuellement le coût total de la sûreté est estimé à 11,2 euros par passager. Mais entre les nouveaux équipements ou le renfort des équipes, il est appelé à encore augmenter dans les années à venir. Le sénateur reconnaît qu'il serait difficile de faire porter les nouvelles hausses aux transporteurs aériens "Lorsqu'on écoute les compagnies aériennes, la limite de la taxation supportable a été atteinte". Le rapport propose donc d'étudier d'élargir l'assiette de la taxe d'aéroport à d'autres acteurs qui profitent de l'activité de l'aérien comme par exemple les magasins présents dans les plates-formes. Ils pourraient être taxés sur leur chiffre d'affaires.

La question du financement de la sécurité risque de devenir encore plus problématique. Le rapport remarque que les nouveaux appareils de détection des explosifs dans les bagages en soute «de standard 3», réclamés par une réglementation européenne dans tous les grands aéroports d'ici à 2020 n'ont pas encore été budgétisés. Pourtant cette décision de l'UE prise en 2008 va entrainer des coûts importants : "Entre 500 et 600 millions d'euros" estime t-il pour les plates-formes parisiennes et "200 à 300 millions d'euros" pour les pistes de province. Et il ne reste plus que 3 ans pour trouver les fonds nécessaires. Dans quelle poche ?