Jean-Charles Perino, La Compagnie : « Partir vers New York du Sud de Paris est un atout pour les voyageurs d’affaires »

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En transférant ses opérations de Roissy-Charles-de-Gaulle à Orly, La Compagnie veut s’imposer comme l’offre la plus économique en business entre Paris et New York au départ du sud parisien. Un pari qu'avait déjà fait l’Avion en son temps et qui avait donné de bons résultats.

"En deux ans, nous avons réussi à conquérir une clientèle qui veut aller vers New York ou Paris au meilleur prix et avec un niveau de qualité qui, sans tomber dans un luxe ostentatoire, permet de voyager confortablement", explique Jean-Charles Périno, Directeur commercial et Marketing de La Compagnie. Ils étaient peu nombreux, au lancement de ce transporteur aérien, aujourd’hui intégré à XL Airways, à croire au succès d’une compagnie tout business, mono destination, et disposant d’un seul avion.

Désormais, les données ont bien changé. Vers New York, deux fréquences quotidiennes sont proposées à la clientèle et l’arrivée l’an prochain de l’A321 Neo va profondément modifier le confort et l’équipement à bord. L’intégration d’un lit plat ou du Wi-Fi va booster l’offre sans forcément modifier profondément les prix. C’est en tout cas la volonté de l’entreprise qui veut rester concurrentielle face aux quatre vols quotidiens d'Air France, Norwegian et Level vers New York au départ d’Orly.

DéplacementsPros : Vous vous êtes installés à Orly en avril dernier. Quels sont les premières conclusions que vous tirez de ce déménagement ?

Jean-Charles Périno : Orly est encore un aéroport à taille humaine où il est facile de se déplacer et où l’offre de services et d’un haut niveau. Cela ne veut pas dire que nous n’étions pas bien installés à Roissy, mais la taille même de la plate-forme obligeait nos clients à anticiper leur arrivée sur place. À Orly, nous prenons en compte le besoin de nos clients qui veulent pouvoir se présenter à l’embarquement au tout dernier moment et rejoindre rapidement soit le salon soit la porte de l’avion.

Au-delà, nous constatons qu’une grande partie des entreprises, publiques ou privées, apprécient de se rendre dans le Sud de Paris en raison de la rapidité et de la facilité mise à leur disposition pour rejoindre l’aéroport. Après quelques mois d’exploitation, nous constatons que ce choix était celui qu’il fallait faire et qui séduit notre clientèle.

DéplacementsPros : on a le sentiment que la compagnie change peu. C’est une volonté ?

Jean-Charles Périno : Oui, car la promesse que nous faisons notre clientèle est simple : nous ne sommes pas la meilleure classe business au monde mais nous sommes celle qui offre le meilleur rapport qualité-prix. C’est cet argument là que nous défendons au quotidien, que ce soit par les tarifs que nous proposons, la bonne tenue de nos services à bord et notre présence commerciale en France comme aux États-Unis pour assister les entreprises et leur permettent de mieux travailler avec nous.

Nous avons appris à nous adapter avec des offres plus familiales en été, quand les voyageurs d'affaires ne sont pas nombreux mais nous savons aussi offrir de la disponibilité quand la demande est forte.

DéplacementsPros : Pourtant, vous n’êtes pas très favorables au contrat Corporate ou à des tarifs privilégiés ?

Jean-Charles Périno : Lorsqu’on fait des prix deux à trois fois inférieurs à ceux pratiqués par nos concurrents, et que nos clients eux-mêmes le confirment, je pense qu’il est compliqué d’aller voir des entreprises pour leur proposer des offres tarifaires dont le volume et le montant seraient limités.

Bien évidemment, lorsqu’il y a une forte demande de la part d’une entreprise sur notre ligne, il est de notre devoir d’étudier avec elle l’optimisation de ses tarifs ou de ses services. Aujourd’hui, on constate principalement que le prix reste l’arme essentielle pour remplir l’avion dont le taux d’occupation frôle quotidiennement les 80 %. Notre force est clairement à ce niveau.

Mon DéplacementsPros : Justement, comment allez-vous faire évoluer votre offre ?

Jean-Charles Périno : Nous avons fait le choix de mettre en service, dès l’an prochain, deux Airbus A321 néo qui vont profondément modifier notre image de compagnies tout business. D’abord nous avons fait le choix d'un lit plat, du Wi-Fi et d’un ensemble de services que nous annoncerons au fur et à mesure de la mise en place des appareils.

Concrètement, cela veut dire que, sans modifier profondément notre stratégie commerciale tarifaire, nous allons proposer des liaisons quotidiennes vers New York à des tarifs très largement inférieurs à ceux de la concurrence avec des services quasiment identiques. Sur le transatlantique, l’un des marchés les plus courus au départ de la France, on peut véritablement parler de révolution.

DéplacementsPros : Et la province ?

Jean-Charles Périno : Comme tous les transporteurs, nous regardons bien évidemment les marchés potentiels au départ de la province. Mais nous restons très prudents sur la réalité d’un vol classe affaires sur des destinations comme New York. Nous savons tirer les enseignements du passé. Il y a eu beaucoup d’expériences de la part des compagnies régulières pour proposer quotidiennement, voire trois à quatre fois par semaine, des vols entre Lyon, Toulouse, Nice, Bordeaux et les États-Unis.

Certains sont devenus saisonniers, d’autres ont disparu, mais aucun ne peut se targuer d’avoir eu un succès commercial éblouissant. Nous nous devons d’être prudents et nous étudions toutes les pistes et les possibilités pour nous développer au départ de la province. J’ai même entendu dire que nous travaillons à des destinations autres que les États-Unis, certains nous prêtant l’intention d’aller en Asie ou en Inde. Mais je peux vous dire aujourd’hui que seule la prudence et le réalisme des marchés doivent guider le développement d’une compagnie aérienne comme la nôtre. Les évolutions que nous constatons, que ce soit sur le prix du pétrole ou les taxes aéroportuaires, sont autant de points qui nous conduisent à cette grande prudence.

DéplacementsPros : On avait évoqué la mise en place d’un cross marketing entre XL Airways et la compagnie. Qu’en est-il ?

Jean-Charles Périno : Il se fait naturellement car notre clientèle qui veut voyager dans des conditions confortables l’été, période où les déplacements professionnels sont moins importants, apprécie les tarifs promotionnels que nous mettons en place et profite de la compagnie pour aller sur New York. Au-delà, il est évident que nous pouvons faire des opérations de promotion croisée entre les deux transporteurs, même si la finalité de chacun d’entre eux est différente.

Le point commun que nous exploitons réside principalement dans la possibilité pour nos clients fidèles d’utiliser les points récoltés sur La Compagnie pour acheter des billets sur XL Airways. À terme, il sera toujours possible d’étudier des code-shares entre des compagnies proches de nous pour proposer à nos clients des destinations aux États-Unis. C’est un projet que nous regardons mais qui n’est pas encore concrétisé aujourd’hui.

DéplacementsPros : La bataille sur New York fait rage au départ de Paris. Êtes-vous inquiet ?

Jean-Charles Périno : Il faut toujours être attentif à la concurrence. Le triomphalisme a conduit bien des compagnies à regretter des propos parfois exagérés vis-à-vis de telle ou telle initiative. Le constat que l'on peut faire aujourd'hui au départ d'Orly, et avec l'offre mise en place, nous conduit à être optimistes pour les mois à venir, y compris la période estivale qui est souvent difficile pour des compagnies comme la nôtre.

Il nous faut aussi réfléchir à notre avenir, que ce soit en termes de destinations ou de fréquence pour être toujours mieux adapté aux demandes formulées par nos clients. Il est vrai qu'aujourd'hui le nombre de vols vers New York explose de mois en mois.

Mais c'est sur la distance, sur la durée sur la qualité du service proposé que les clients font la différence. Ceux qui ont fait le choix de prendre La Compagnie sont aujourd'hui nos meilleurs vendeurs. Au risque de me répéter, quand le prix fait la différence, c'est le prix que l'on choisit.

Entretien réalisé par M. Lévy.