La nécessaire évolution des aéroports

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Le transport aérien évolue inexorablement vers 3 grandes directions et ce, grâce à l’arrivée d’une nouvelle génération d’appareils dont les grandes caractéristiques sont une taille réduite par rapport à leurs prédécesseurs, un rayon d’action bien supérieur et un coût d’exploitation très diminué à égalité d’emport de passagers.

Il ne s’agit pas de spéculations, mais bien du constat actuel, lié aux commandes lancées massivement par les transporteurs. Actuellement plus de 20.000 appareils ont été commandés sans que les donneurs d’ordre aient tous envisagés comment ils allaient être utilisés. Or ces nouvelles machines vont modifier en profondeur les programmes des compagnies aériennes.

Premier changement : le développement de liaisons long-courrier au départ des aéroports de taille moyenne. C’est devenu possible avec l’arrivée sur le marché des A 321 Neo et des Boeings 737 Max. Ces appareils de moyenne capacité conviennent à des marchés de villes provinciales. Il ne serait donc pas étonnant de voir proliférer les liaisons transatlantiques, par exemple au départ de Bordeaux, Toulouse, Marseille, Lyon ou Lille. Seulement il faudra obtenir les slots dans les aéroports américains déjà très congestionnés.

Deuxième changement : la croissance du « low cost » long-courrier. L’appareil de référence est le Boeing 787 qui a été massivement acheté par certains opérateurs tels que Norwegian. Il est d’ailleurs intéressant de noter que cette compagnie recherche à revendre 90 Airbus de la série 320 Neo et qu’elle a gardé sa commande des B 787. L’Airbus A 350 est lui aussi dans la course pour équiper les transporteurs « low costs ». Bref, le transport traditionnel trouve maintenant un nouveau concurrent sur un secteur qu’il croyait protégé.

Troisième changement : l’alimentation des « hubs » par les « low costs ». EasyJet est la première compagnie à se lancer dans des accords avec les transporteurs traditionnels. Nul doute qu’elle soit capable de démontrer sa capacité à alimenter les très gros « hubs » européens avec des prix de revient tout à fait compétitifs. N’oublions pas que les grandes compagnies traditionnelles subventionnent leurs lignes courts-moyens courriers européennes à la seule fin d’alimenter les relations long-courrier.

Devant cette évolution qui semble inéluctable, les grands aéroports devront modifier en profondeur non seulement leurs services traditionnels, mais probablement leur conception même. Ils seront en effet conduits à assurer eux-mêmes les transferts des passagers courts courriers « low cost » vers les opérateurs traditionnels long-courriers. Et cela ne sera pas simple, car les gestionnaires des aéroports n’ont jamais été confrontés à ce genre d’exercice. Celui-ci demande de fournir les prestations d’accueil et de transfert des passagers et de leurs bagages et ce dans les deux sens. Mais cela ne s’arrêtera certainement pas là. Il faudra de plus assurer les opérations d’enregistrement qui, jusque-là étaient directement réalisées par les compagnies aériennes. En clair ils devront tenir un comptoir correspondances d’un très haut niveau.

Voilà qui va compliquer la tâche des gestionnaires aéroportuaires car les infrastructures actuellement en service ne permettent pas de traiter ce type de prestation. Sur la demande des transporteurs traditionnels, les grandes plateformes européennes ont créé une architecture adaptée aux correspondances les plus rapides des compagnies sur leurs propres services. Ce ne sera plus le cas dans quelques années. Les passagers « low costs » arriveront dans des terminaux différents des compagnies traditionnelles, souvent éloignés les uns des autres. Il faudra donc créer de nouvelles possibilités de transferts rapides et fiables. Terminés les acheminements par bus, il sera nécessaire de disposer de transports type VAL ou de trottoirs roulants rapides.

D’une autre côté, les compagnies traditionnelles feront de sérieuses économies en n’étant plus obligées de créer des plages de correspondances qui, pour être efficaces, diminuent fortement l’utilisation optimum des appareils. Alors elles devront mettre la main à la poche pour soutenir les nouveaux services et infrastructures des aéroports.

Sauf à ce que ces derniers ne se décident à consacrer une part importante des profits réalisés dans l’exploitation des commerces à ce nouveau concept.

Jean Louis BAROUX