Le renouveau d’Orly

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Il était plus que temps, mais il semble bien qu’ADP ait pris le taureau par les cornes en ce qui concerne Orly. Rappelons que l’aérogare d’Orly Sud a été inaugurée par le Général de Gaulle le 24 février 1961 et que le terminal d'Orly Ouest a suivi avec juste 10 ans d’écart, le 26 février 1971.

Depuis, plus rien ou presque si ce ne sont quelques timides extensions dans chacun des terminaux. C’est ainsi que cette plateforme est progressivement tombée dans la stagnation car il fallait bien développer Charles de Gaulle, beaucoup plus éloigné de Paris : 25 km contre 10 km pour Orly.

Mais enfin, de grandes décisions ont été prisesrécemment, en particulier en incluant Orly dans le projet de construction du Grand Paris. Voilà qui va donner une nouvelle jeunesse à cet aéroport. Le plan de rénovation est très ambitieux. L’extension d’Orly Sud vers l’Est par la création d’une nouvelle jetée pour les vols internationaux a été mise en service l’année dernière. Orly Ouest a également vu son hall 1 presque doubler de volume, ce qui a entrainé la disparition du Pavillon d’Honneur. La nouvelle configuration est devenue opérationnelle au milieu du mois d’août de cette année. Et les deux terminaux ont été rejoints par la création d’un bâtiment de jonction lequel est déjà partiellement en service. Ainsi la configuration ancienne avec les deux terminaux va disparaître puisqu’il n’y aura plus qu’un seul ensemble, certes un peu disparate, mais on pourra aller d’un bout à l’autre de l’aéroport sans passer par l’extérieur. Les appellations vont changer également au printemps prochain. Orly Sud sera dénommé Orly 4, le bâtiment de jonction Orly 3 et Orly Ouest sera divisé en Orly 2 et Orly 1.

A côté des aérogares, un grand pôle d’activité commerciale appelé Cœur d’Orly est en train de sortir de terre. Il est prévu 108.000 m² de bureaux, 18.000 m² de chambres d’hôtel et un centre commercial de 38.000 m². Tous ces chiffres pour bien saisir l’envergure de travaux.

Et ce n’est pas tout. A partir de 2024, les lignes de métro 14 et 18 desserviront directement l’aérogare ce que tous les clients attendent depuis 1961. Rappelons, s’il en était besoin, que les concepteurs d’Orly Sud avaient prévu une gare dans les sous-sols et que celle-ci n’a jamais été mise en service car cela aurait pu nuire aux intérêts de la SNCF. Bref ce défaut sera réparé... 57 ans après la création de l’aéroport.

Bien entendu, les circuits Départ et Arrivée ainsi que les tris bagages seront revus et modernisés ainsi que les accès en voiture et les parkings. Au total, rien que du bon.

Mais alors, on se demande bien pourquoi les Pouvoirs Publics s’acharnent encore à gérer le trafic d’Orly par un nombre mouvements limité à 250.000 par an, ce qui pénalise les 5 communes riveraines qui pourraient bénéficier d’une gestion par des quotas de bruit, comme l’est Charles de Gaulle. Ce changement de gestion serait bon d’abord pour les riverains qui verraient le bruit diminuer d’année en année, il serait également bon pour le développement du trafic et par conséquent pour l’emploi, alors que la plateforme génère déjà 30.000 emplois directs et 85.000 emplois indirects et bien entendu, ce serait bon pour les compagnies aériennes qui pourraient développer de nouvelles destinations et finalement, et c’est bien le but, pour les passagers.

Il est curieux tout de même qu’avec 2 pistes, Orly ne traite que 32 millions de passagers. C'est un chiffre certes en assez forte augmentation depuis les 5 dernières années, alors qu’avec le même nombre de pistes Heathrow en traite78 millions. Cela ne veut pas dire qu’il faut aller vers la congestion de l’aéroport londonien, mais on pourrait tout de même donner un peu d’air aux opérateurs. Je note d’ailleurs que, compte-tenu des contraintes imposées par le COHOR, en clair le Comité de Coordination des Horaires (l’autorité qui distribue les fameux « slots »), seuls 229.000 mouvements ont été opérés l’année dernière. Donc 20.000 « slots » n’ont pas été utilisés, c’est presque 10% de la capacité. La croissance du trafic constatée vient en totalité de l’augmentation de l’emport moyen qui a été de 140 passagers par mouvement.

Au fond, si on n’y prend garde, Orly sera réservé à terme aux appareils de plus de 180 places. Mais alors que vont devenir les petites lignes ? Elles ne justifient que d’appareils de petite capacité qui, pourtant, occupent un « slot » tout comme les très grosses machines. Alors le trafic se concentrera inéluctablement vers les grandes agglomérations. Est-ce cela que l’on veut ? Avec Internet, le travail dans le domaine des services peut arriver dans n’importe quel point de France. A quoi cela servira-t-il si les utilisateurs ne peuvent se rendre à Paris et, de là, à l’étranger, là où sont les pôles de décision ?

Il reste quelques années à souffrir avant de disposer à Orly d’un aéroport de rang international. Soyons patients, le travail est commencé. Il serait d’ailleurs bon que les promoteurs des travaux demandent l’avis des futurs utilisateurs avant de couler le béton. On éviterait par exemple des entrées de parking beaucoup trop étroites… entre autres.

Jean-Louis BAROUX