Les compagnies aériennes interpellent les candidats à la présidentielle

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A l'approche de l'élection présidentielle, les compagnies aériennes françaises tentent une nouvelle fois de se faire entendre. La Fédération nationale de l’aviation marchande (Fnam) a déploré le poids des taxes sur la compétitivité du ciel de l'Hexagone lors d'une conférence de presse le 12 avril 2017. L'organisation a également présenté 50 propositions pour relancer ce secteur qui pourrait perdre 16 000 emplois au cours des 5 prochaines années

La FNAM a présenté aux candidats à l’élection présidentielle 50 mesures pour améliorer la compétitivité des compagnies aériennes françaises. Pascal de Izaguirre, PDG de Corsair qui a coordonné ce dossier, explique: "c'est un travail que j'avais déjà réalisé et supervisé il y a 5 ans pour les précédentes élections présidentielles, sans grand succès d'ailleurs... Peu de mesures avaient été retenues. On espère qu'il en sera différemment cette fois-ci". Et son ton se fait plus urgent : "Nous tirons la sonnette d’alarme. Depuis 2000, la part de marché du pavillon français a perdu 17 points, passant de 60 à 43%".

Ce déclin n'est pas sans conséquence. Il s'est traduit au cours des cinq dernières années par la disparition de 11 000 emplois. Pascal de Izaguirre précise "les prévisions tablent sur une perte de 16 000 emplois supplémentaires dans les cinq prochaines années".

Les ailes des compagnies sont plombées en premier lieu par les taxes. Jean-Marc Janaillac, le PDG du groupe Air France-KLM, explique que "Le secteur aérien français dispose d'un environnement de taxes défavorable. La hausse de la fiscalité et des charges pesant sur les compagnies aériennes françaises a augmenté 123% sur les 15 dernières années, ce qui est bien supérieur à l'évolution du trafic aérien". Actuellement, le secteur fait face à plus d'une vingtaine de taxes, redevances et prélèvements spécifiques. Elles représentent une charge totale pour ces entreprises de plus de 4,6 milliards d'euros par an. Le patron du groupe franco-néerlandais met en avant, par exemple, que les redevances du services publics ont doublé en 15 ans et que la TVA a aussi été multipliée par deux passant de 5,5% à 10%.

Il déplore ainsi : "Les charges aéronautiques représentent entre 50 et 60% du prix du billet sur les vols domestiques, 30 à 40% sur les vols intra-européens et de 15 à 20% en long-courriers".

Le secteur qui est également confronté au dumping social, présente un déficit de compétitivité estimé par la FNAM à 1,6 milliard d’euros "dont 800 millions d'euros d'origine réglementaire qui pourrait être corrigé avec un coût nul pour l'État", ajoute Alain Battisti, président de l'organisation et de Chalair Aviation.

Il regrette cette "accumulation de handicaps réglementaires" née de la sur-interprétation des règlements européens par la France. "Les règlements européens sont juridiquement d'application directe. La France n'a normalement pas à les traduire mais simplement à les appliquer. Pourtant elle les réécrit, et cela les complexifie ou les rend plus coûteux. C'est valable dans l'aérien mais également pour le secteur agricole". Il cite en exemple l'obligatoire faite en France - mais pas dans les autres pays européens - de former les PNC à l'utilisation des produits biocides dispersés dans les avions à destination de zones tropicales ou encore la visite médicale des hôtesses dont la périodicité a été calée à 5 ans par l'UE. Cette dernière pourrait être fixée dans l'Hexagone à deux ans, entraînant un coût de 5 à 8 millions pour le pavillon français.

Alain Battisti pointe aussi du doigt la réglementation des temps de vol des pilotes. "La France applique les Flight Time Limitations (FTL) décidés par l'Europe. Mais en plus, l’administration française demande aussi d'appliquer également le Code de l’aviation civile qui date de 1954. S’ajoutent les accords internes des entreprises puis les dérogations obtenues". Le résultat  "alors que le plafond légal européen permet d'engager des pilotes jusqu'à 900 heures par an, en France on est dans l’incapacité de les engager au delà de 800 heures. Et même, sur le long-courrier on avoisine plutôt vers les 650 heures", explique-t-il.

Face à ces freins de compétitivité, la FNAM a demandé entre autres l'harmonisation des charges et des coûts de production à l'échelle européenne, un simplification réglementaire, un plan national de lutte contre les pratiques illégales de compagnies concurrentes (emploi de faux indépendants ou de travailleurs détachés) ainsi que la prise en charge par les pouvoirs publics des équipements de sûreté, actuellement à la charge des compagnies.

"Nous demandons simplement la stabilisation des taxes et redevances aéronautiques sur la durée du futur mandat présidentiel", conclut Jean-Marc Janaillac.

La FNAM estime que ces propositions de compétitivité auraient un impact de 190 millions d'euros par an sur le secteur.