Les low costs dans les outils des Travel Managers

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Depuis plus de 20 ans, le modèle économique dit « low-cost » est devenu une réalité incontournable. Dans le monde des déplacements professionnels, il a permis de réduire les coûts mais également de développer des lignes transversales qu’aucune compagnie dite traditionnelle n’aurait osé faire. Ces nouvelles compagnies ont bouleversé la façon de consommer les déplacements aériens et, en partie, les déplacements professionnels.

La pertinence du modèle « low-cost » n’a pas été immédiatement prise au sérieux par les compagnies traditionnelles qui, de fait, ont perdu un temps précieux dans la bataille commerciale qui était engagée. Modernes et en phase avec la transition générationnelle que vivaient les entreprises clientes, les low-costs ont apporté, au cours des 20 dernières années, des innovations dans le protocole de réservation mais également dans la façon de vendre les titres de transport. Elles ont osé pratiquer le saucissonnage des offres (technique ancestrale dite du salami). Finalement, le modèle low-cost est devenu la nouvelle norme du secteur pour les vols courts courriers.

Mais qu’en est-il du long courrier ? Ces routes sont autrement plus complexes et beaucoup pensent que le saucissonnage n’est pas possible sur ces segments. Erreur car la transition est déjà engagée comme le montre le tableau ci-dessous (Source : CAPA Long Haul Summit 2018).
Beaucoup d’intervenant du marché, toutes catégories confondues, doutent de la fiabilité du modèle low-cost long courrier. Ce n’est absolument pas le cas des constructeurs qui ont développé les familles d’avion dits « monocouloirs » de nouvelle génération (les Boeing 737 MAX et Airbus A320LRneo). Ces appareils permettent aux compagnies de se positionner sur des routes longues générant un nouveau trafic entre des villes secondaires et permettant aux passagers de contourner les plates-formes traditionnelles.

La croissance des compagnies aériennes à bas coûts ne montre aucun signe de ralentissement ; normal quand on sait que le trafic aura vraisemblablement doublé en 2050. Le profil type de client est, sans surprise, un passager dont le principal critère de sélection est le coût. De fait, comme pour le court courrier, les compagnies aériennes à coûts plus élevés ont de plus en plus de difficultés à maintenir leurs taux de croissance et doivent déployer de stratégies radicales pour faire face à cette évolution. C’est ainsi qu’Air France à lancé des offres déstructurées sur les lignes à forte concurrence (les Antilles en particulier) et propose une plateforme de revente des billets non remboursables.

L’implémentation des low-costs est composée d’une succession de batailles. Le low-cost long courrier en est une. La guerre est loin d’être terminée et même si, en 10 ans, les routes proposées ont augmenté de 415%, 301 compagnies aériennes ont tout de même disparu (toutes catégories confondues) pendant la dernière décade.

Mais comment ces offres vont-elles être intégrées dans les outils ? Quelle va être le niveau de compétence des agences pour vendre ces offres sans cesses changeantes ? Pour finir, comment les clients, vont-ils comprendre et consommer ce qui semble apparaitre comme une nouvelle norme généralisée ?

Quand on voit la multiplicité des sous-marques (Transavia, Joon, Hop! pour Air France, Rouge pour Air Canada, etc…) et la non-appropriation des sous-enseignes par la majorité des clients des agences, on se doute que les modifications du paysage aérien seront légion dans les années et même les mois à venir. Quant à la lisibilité des offres, elles sont de plus en plus brouillées par la multiplication des options payantes comme, par exemple, l’extraordinaire siège vue mer proposé par FrenchBee (fallait y penser et oser).

Il reste un point clé à traiter : la fidélité à la marque ou plutôt à son programme de miles. Sur ce point, les compagnies low-cost travaillent sur des systèmes de carte autorisant les avantages souhaités par les voyageurs d’affaires (priorité à l’embarquement, choix du siège, flexibilité des tarifs, des horaires…). EasyJet est la plus avancée dans ce domaine avec la carte Easyjet+ (mais le réseau se limite au court et moyen-courrier).

En France, La Compagnie opère déjà une ligne Paris New-York sur des avions configurés à 100% en classe affaires (B757-200). Les transporteurs historiques contrecarrent l’offre en y opposant leur réseau et de leur configuration plus moderne. Certes, il y a peut-être débat mais certainement pas photo car les prix proposés sont, à niveau de service équivalent, imbattables. L’évolution étant en marche, La Compagnie proposera, en Septembre 2019, des vols sur le tout nouvel appareil d’Airbus (A321LR NEO) avec une configuration totalement en phase avec les dernières évolutions technologiques. Air Canada desservira, quant à elle, la ligne Bordeaux Montréal avec un 737 MAX. Et déjà, cette année, Air Transat à relié le Canada au départ de plusieurs villes françaises de province. Comme vous le voyez, ça va vite et même très vite… Je ne vous parle pas des A350, B787 et A330 NEO mis en place par beaucoup d’opérateurs qui ont compris que seule l’innovation pouvait protéger leurs parts de marché et leurs marges.

Bref, l’évolution se fera, poussée par les constructeurs, les compagnies et les nouveaux consommateurs du voyage (ceux qui n’auraient jamais volé sans cet accès aux offres dites low-cost). Mais la route sera pleine d’embuches pour les opérateurs mais également pour les acheteurs et les travel managers, qui devront s’assurer de la mise en place de ces offres dans leurs outils et au sein de leur TMC favorite.

Bref, plus que jamais la veille sera de mise et il sera très important de voir à quel système le SBT du futur sera connecté… Une fois de plus, on va reparler de l’intérêt de la place de marché…

Yann Le Goff
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nilrem.fr