Lufthansa: l’AFTM tape à côté de la plaque

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Il faut toujours se méfier de la précipitation qui fait prendre des positions hâtives. Dans le dossier de la Lufthansa, l’AFTM a voulu manifester rapidement sa position. Il faut dire que la compagnie n’étant pas un partenaire financier de l’association, il lui était plus facile de s’exprimer… ce qui ne fut pas le cas pendant les grèves SNCF ou, du bout des doigts, à la fin du mouvement des pilotes d’Air France.

Mais que dit le communiqué associatif ? Au-delà de la « stupéfaction », ce sont des notions de sécurité que l’AFTM met en avant pour justifier de la relation entreprise/GDS et le traçage des achats. Sans doute une vision très CAC 40 qui oublie la réalité des PME/PMI, y compris des ETI qui repensent depuis deux ans leurs relations commerciales avec les transporteurs aériens. L’accès au best buy, encore très puissant dans le tissu économique français, sait depuis fort longtemps tracer et gérer les achats aériens… Sans perdre de voyageurs !
 
L’AFTM cite la compagnie allemande : « La communication du groupe Lufthansa précise que la clientèle d’affaires aurait la possibilité d’effectuer des réservations selon les conditions contractuelles négociées sans application des nouveaux frais supplémentaires si la réservation intervient sur le site Internet du groupe ». Mais l’AFTM oublie de dire que d’ici le 1er septembre, Lufthansa a précisé qu’elle étudierait les solutions négociées associées aux SBT utilisés en Europe pour formuler de nouvelles solutions technologiques permettant un accès direct à son système de réservation. Plusieurs API (petits moteurs logiciels qui permettent de connecter les outils informatiques entre eux) existent déjà et devraient, à terme, s’intégrer aux SBT. Il est prudent d’attendre les contours de l’annonce avant d’en écarter la réalité technologique. On devrait d'ailleurs en savoir plus à KDS Now ce 11 juin. Pourquoi précipiter une analyse qui risque d’être démentie par les faits ?
 
Mais l’AFTM, qui n’a pas perçu le nouveau monde du voyage d’affaires qui se met en place, ne voit en cette proposition de la Lufthansa « qu’une disposition à forte connotation marketing et commerciale, très éloignée des réalités du marché corporate ». Un résumé rapide d’autant que, pour conclure, l’association manie le bâton et joue les Nostradamus en affichant «un certain scepticisme sur la mise en œuvre de cette mesure, une orientation qui ne serait pas sans risque et pourrait conduire à une perte de parts de marché conséquente». Voilà qui devrait faire trembler la Lufthansa qui a déjà paramétré dans son annonce une diminution temporaire de la demande, comme lors de la mise en place de la Commission zéro. Les Allemands qui travaillent depuis plus de deux ans sur le projet sont loin d’être des enfants de cœur.  

Certes tout n’est pas parfait, loin de là, dans la brutalité de la décision de la Lufthansa… Le coup de semonce sera sans aucun doute suivi d’un ensemble d’adaptations fortes pour le business travel, source évidente de revenus pour la compagnie allemande. Et qui sait, face aux difficultés d’application, rien ne dit qu’elle maintiendra son projet en l’état. Peu d’associations professionnelles du Corporate Travel en Europe se sont aujourd’hui engagées dans le sujet. En voulant le faire, l’AFTM a été vite en besogne. Dommage car elle décrédibilise une vision qu’elle voudrait moderne de l’avenir des déplacements professionnels.

Marcel Lévy

Ci dessous le PDF du comuniqué de l'AFTM