Un hashtag TGVoups pour évoquer les dysfonctionnements de la SNCF

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Des trains en retard, des pannes, des annulations ou encore des produits manquants au bar. Face aux nombreux dysfonctionnements des TGV, Le Figaro adresse une lettre ouverte à Rachel Picard, directrice de SNCF voyage. Nous vous proposons d'en prendre connaissance.

Madame,

Il y a quelques années, vous inventiez TGVpop. Cette idée consistait à s'inscrire pour réserver une place dans un train dont on ne savait pas s'il allait partir. Lors de la conférence de presse du lancement, vous avez tenu bon face aux journalistes spécialisés dans les questions de transport, qui vous avouaient ne rien comprendre à ce nouveau concept, et manifestaient les plus grands doutes quant à sa pertinence. Mais vous avez tenu bon, ce doit être dans votre caractère car TGVpop, qui n'a convaincu que 400.000 clients en 2017 est toujours en place, et attire encore quelques naïfs en quête de bonnes affaires qui croient payer un prix formidable un billet qu'ils auraient pu acheter pour un TGV «normal».

Quelques temps plus tard, lasse du label TGV, vous avez lancé Inoui. Nous voilà donc en présence de trains qui sont «inoui», et d'autres qui ne le sont pas. Sommes-nous sommés de trouver l'idée ébouriffante? Ou de penser qu'un train qui part et arrive à l'heure est devenu chose extraordinaire?

«Oups ce produit est épuisé...»
Madame, n'avez-vous pas mieux à faire que d'inventer des programmes sur de simples jeux de mots? Mais là encore, vous avez tenu bon. Abandonnant la masse des voyageurs à la plus grande expectative: devaient-ils prendre un TGV ou un InOui? Car ce nouveau nom «InOui» ne s'applique pas encore à tous les TGV. Imaginons les conversations, et les fous rires: «J'ai raté mon InOui!» «Mon InOui est arrivé à l'heure à Bordeaux.»

Les plaisanteries ont dû parvenir à vos oreilles car des mauvaises langues prétendent que vous réfléchiriez encore à un autre nouveau nom pour TGV: le «TGVoups». Et si c'était vrai? Nous vous avons imaginée au bar du train regardant interloquée le barman. Car, au lieu de vous satisfaire, il applique consciencieusement , dans notre hypothèse directement inspirée de notre expérience partagée, des petits autocollants sur les plats que vous convoitiez.

«Oups ce produit est épuisé...» Vous rêviez du menu snack avec un burger bœuf charolais et un cake au citron, mais rupture de stock oblige il vous servira un croque-monsieur et un excellent yaourt à la vanille, arrosé d'un jus de pomme. En effet, votre prestataire NewRest Wagon Lits a quelques problèmes avec le réassort de la restauration à bord.

Mais ce «Oups!» Quelle efficacité! Ce tic de langage en passe de devenir un Toc. Ce «Oups» qu'on trouve partout dorénavant. «Oups une erreur est intervenue». «Oups, nous ne pouvons pas donner suite à votre appel.» Le Oups de la défaite, de l'impuissance avouée. Le «Oups», interjection du Bisounours incapable mais si gentil! Quel meilleur mot pour admettre toutes les défaillances que connaît la SNCF en général, et le TGV en particulier.

Rêvons un court instant: «Oups, votre Inoui est annulé», «Oups, votre TGV aura 30mn de retard», «Oups, les toilettes sont en panne au premier étage», «Oups, les écrans de votre TGV Montpellier- Lyon ne s'expriment qu'en Italien». «Oups! Vous avez payé un siège hors de prix en 1ère classe, mais vous serez en placement libre, car de deux rames nous en avons fait une seule». «Oups, votre siège 72 de la voiture 3 est cassé».

Nous exagérons? Gageons que le hashtag #TGVoups fera mieux que TGVpop et surtout fera le buzz sur les réseaux sociaux, tant les dysfonctionnements sont grands. Un seul exemple: en 2017, la garantie G30, qui permet aux voyageurs ayant subi un retard supérieur à 30 minutes d'être indemnisés, a été actionnée par 1,6 million de clients et coûté 32 millions d'euros à la SNCF.

Franchement, Madame, était-il besoin de rajouter une difficulté supplémentaire avec vos portiques de contrôle qui déshumanisent un peu plus le train, et obligent les flots pour ne pas dire des hordes de passagers à converger vers ces goulets d'étranglements pour accéder au même moment au même quai? Vous en doutez? Essayez donc Lyon-Part-Dieu à 18 heures.

Madame, vous savez que faire rouler un train est beaucoup plus compliqué que faire voler un avion. Les aléas sont multiples: les suicides, les ruptures de caténaires, la chute d'arbre sur les voies, les sangliers... Alors au lieu de rêver à être sacrée reine de la com' … Commencer par utiliser l'énergie que vous avez grande pour produire des trains en état de marche, qui partent et qui arrivent à l'heure. Mettez-vous enfin à l'écoute des voyageurs, ces usagers qui sont aussi des clients, pour qu'ils préfèrent le train à la voiture. Car votre principal concurrent, contrairement à ce que vous croyez ce n'est pas l'avion mais la voiture.

Ce qui ne sera pas rien en ces temps de transition écologique.