Paris Air Forum : une reprise du voyage d’affaires possible dès le printemps

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Une table ronde réunissant Air France, ADP et l’AFTM a permis de dresser les grandes lignes des évolutions en cours des déplacements aériens des voyageurs d’affaires.

Créé en 2014 par le groupe ADP, La Tribune et Forum Media, le Paris Air Forum, a été organisé cette année en virtuel. Il a réuni la plupart des spécialistes et grands patrons des secteurs de l’aéronautique et du transport aérien, dans le cadre de débats, conférences et keynotes étalés sur six journées. L’un des débats, intitulé « Quelles compagnies, quels aéroports, quels voyageurs dans le monde d’après ? » a notamment permis d’aborder à plusieurs reprises l’activité du voyage d’affaires. Anne Rigail, directrice générale d’Air France, a d’abord rappelé que sa compagnie tablait sur un retour à l’activité de 2019 « aux alentours de 2024« . Edward Arkwright, directeur général exécutif, en charge du développement et de l’ingénierie du groupe ADP (Aéroports de Paris) prévoit également de retrouver cette même année 2024 les résultats d’avant la crise, « dans un scénario optimiste (…). Pour l’année prochaine, selon nos récentes prévisions, nous partons sur 45 à 55% du trafic antérieur à la crise« .

Michel Dieleman, président de l’AFTM (Association Française du Travel Management), a confirmé que les mesures sanitaires prises par les compagnies et les aéroports rassuraient aujourd’hui les voyageurs d’affaires, tout en rappelant qu’il fallait néanmoins « être en mesure de voyager« . Les entreprises ont tiré des enseignements d’événements passés (attentats, catastrophe nucléaire, éruption volcanique…) par le biais du duty of care, en plaçant la santé des collaborateurs au cœur de leurs préoccupations. « L’enjeu majeur en ce moment, c’est la réouverture des frontières et la liberté de circulation » a-t-il poursuivi.

La crise actuelle pourrait renforcer le « bleisure »

Pour Anne Rigail, « le trafic affaires sera sans doute celui qui mettra le plus de temps à reprendre. On s’attend à voir les voyages des entreprises planifiés plutôt au printemps ou en milieu d’année prochaine, également compte tenu des coupes budgétaires liées à la crise, mais aussi en raison de changements d’habitude. On a ainsi pu voir un recours massif à la visioconférence. Mais on en a tous un peu assez de l’outil… Et ça c’est bon pour le transport aérien !« . Le télétravail peut également générer des besoins de déplacements nouveaux. La patronne d’Air France a enfin noté que les questions d’environnement étaient centrales aujourd’hui, avec une incidence importante là encore dans le business travel : « Les passagers affaires mélangerons peut-être un peu plus affaires et loisirs« , dans cette approche identifiée sous le vocable de « bleisure ». Même constat pour Michel Dieleman, qui souligne lui-aussi l’impact RSE des entreprises déterminante dans le déplacement d’affaires : « La diminution de l’empreinte carbone est aujourd’hui une quasi-nécessité« .

Pour le président de l’AFTM, on a probablement abusé des voyage d’affaires, même si une meilleure gestion et organisation des déplacements ont été mis en place dans les entreprises depuis une dizaine d’années. La crise va conduire à une meilleure définition de ce qu’est un voyage important, voire essentiel, et à mieux mesurer l’impact CO2 de son déplacement. « On peut estimer que la baisse structurelle du voyage d’affaires sera de l’ordre de 20 à 30% (..). C’est une évidence que la digitalisation des réunions va avoir un impact énorme sur les déplacements professionnels. Les événements en virtuel seront complémentaires des voyages, avec des arbitrages sévères dans les entreprises« .

Anne Rigail a rappelé que cette dimension RSE se retrouvaient aussi dans des contrats corporate, avec des engagements en matière de compensation, d’achat de carburant durable… Et l’appétence accrue pour le train peut se traduire par des offres intermodales plus pratiques pour le voyageur. Edward Arkwright a renchéri sur ce dernier point, en insistant sur la nécessité de mettre en place des parcours passager maitrisés. Et de souligner les bonnes relations d’ADP avec toutes les composantes de la SNCF.

La classe affaires pas condamnée, surtout sur le long-courrier

Michel Dieleman a enfin insisté sur l »importance des voyages d’affaires dès la disparition de la pandémie, pour signer des contrats, animer des équipes, auditer des fournisseurs… Dans bien des cas, le contact humain est indispensable, et le recours à la visioconférence insuffisant. Le président de l’AFTM a par ailleurs estimé que la classe affaires n’était pas condamnée, surtout sur le long-courrier, d’autant que les conditions de confort s’ajoutent à une distanciation entre passagers plus importante à l’avant des appareils. « Peut-être les entreprises vont-elles réduire les déplacements sur les courts et moyens courriers, au profit notamment du train, et réaliser ainsi des économies permettant des déplacements dans de meilleurs conditions sur des déplacements long-courriers. Toute la question est de savoir où placer le curseur« .

Anne Rigail a tenu à rappeler que la crise précédente avait amené une partie des voyageurs d’affaires à basculer vers les classes éco et premium éco. « Aux deux-tiers, ils voyagent déjà dans ces deux classes. Et plus de la moitié des passagers des première et business voyagent pour motif personnel. Pour autant, on s’attend à un impact. Mais on ajustera notre offre sans difficulté, on adaptera nos cabines à la réalité de la demande« .