Transport aérien et ferroviaire : où sont passés les voyageurs d’affaires ?

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Entre inquiétudes sanitaire et économique d’un côté, et règles disparates et mouvantes des autorisations et conditions d’entrée dans tel ou tel pays de l’autre, les entreprises maintiennent une position prudente sur les voyages d’affaires. Au grand dam des compagnies ferroviaires et aériennes…

Air France a annoncé ce mardi de nouvelles mesures commerciales simples et flexibles, la SNCF récemment une réduction de 100€ sur la carte Liberté des voyageurs fréquents. Et de nombreux autres transporteurs se montrent eux aussi offensifs, dans l’Hexagone, pour faire revenir leurs clients. La plupart de ceux qui voyagent ces jours-ci constatent pourtant que les trains et avions sont loin d’être pleins. La situation sanitaire inquiète toujours les voyageurs et les entreprises, malgré les efforts pour les rassurer, avec pour ces dernières en prime la question de la responsabilité pénale.

D’après l’association Airlines for Europe (A4E), le trafic a stagné en août avec seulement 30% des voyageurs par rapport au même mois l’an dernier. Et les incertitudes sur le plan sanitaire comme économique ne poussent pas à la reprise ces jours-ci. Selon Augustin de Romanet, le Pdg du groupe ADP, interrogé cette semaine par Boursorama, «le mois de septembre est beaucoup moins bon que le mois d’août (…). Le trafic aérien est presque à l’arrêt aujourd’hui, avec 20% du trafic habituel à CDG et 35 à 40% à Orly». Et les prévisions de redémarrage sont assez incertaines. Les compagnies aériennes sont notamment confrontées aux règles disparates et mouvantes des États sur les autorisations et conditions d’entrée dans leurs pays. Pour ces raisons, elles ne peuvent redémarrer leur activité comme elles le souhaiteraient. A cela s’ajoutent les difficultés économiques et une pression accrue sur les questions de durabilité et d’environnement. Bref, le voyageur d’affaires – avec lequel elles font le gros de leur marge – manque toujours à l’appel.

L’impact durable des réunions virtuelles

Les entreprises sont aujourd’hui en quête de réduction de leurs dépenses. Et nombre de déplacements professionnels sont aussi remplacés par les réunions virtuelles pour des questions économiques. L’engouement pour les visioconférences est-il pour autant un phénomène durable ? Selon les conclusions d’un récent rapport commandé par le RES Forum, la grande majorité des multinationales prévoient, y compris après la crise, à la fois un recours plus courant au travail virtuel et une baisse des voyages d’affaires. «En raison des avantages technologiques comme la vidéoconférence et de la récession économique, les voyages d’affaires seront limités pour répondre aux besoins essentiels. Et une partie des voyages d’affaires – 5 à 8% en moyenne – pourrait ne jamais reprendre» avançait cet été Linus Bauer, consultant en industrie aéronautique et conférencier à la City University of London. Certaines prévisions sont toutefois mois optimistes. Selon son Pdg Jean-Paul Agon, interrogé en juin dernier dans Les Échos, le groupe L’Oréal estime pouvoir « réduire les voyages de 30 à 40%».

Un besoin de se rencontrer, de nouer des liens de confiance

Probable que l’avenir du voyage d’affaires soit tout de même moins sombre. A un certain moment, les gens ont besoin de se rencontrer, de nouer des liens de confiance. Rien ne remplace l’intelligence collective, le brainstorming, la créativité, difficile à stimuler dans le cadre d’une réunion virtuelle. Et le recours accru au télétravail pourrait inciter à multiplier les interactions sociales pour éviter l’isolement des collaborateurs, à organiser davantage de rencontres ailleurs qu’au bureau, notamment dans des espaces de coworking. Fin mai dernier, le télétravail en France concernait la moitié des salariés. Fin juillet, ce chiffre était ramené à un sur dix, mais avec une proportion de télétravailleurs plus forte dans le secteur des services. Et on rappellera que plusieurs grandes entreprises – et pas des moindres, on peut citer Facebook et Criteo – ont décidé de conserver le télétravail à 100% jusqu’au mois de juin prochain en France…