Vaccin obligatoire pour prendre l’avion : les Français plutôt favorables

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L’idée du certificat sanitaire (ou vaccinal) pourrait bien s’imposer comme une évidence pour les voyages en avion. Les déplacements aériens seraient ainsi conditionnés au fait d’être vacciné ou testé négatif. Mais pour le gouvernement français comme pour de nombreux spécialistes, la question du « passeport » sanitaire est aujourd’hui largement prématurée.

L’exigence d’une vaccination avant d’embarquer à bord d’un avion n’est pas pour demain. L’idée n’en fait pas moins son chemin dans l’opinion, doucement mais sûrement. Ainsi, six Français sur dix (62% exactement) se disent favorable à la vaccination obligatoire pour prendre un avion à destination de l’étranger, selon un sondage Ifop publié par le Parisien ce week-end. La première condition à la mise en place d’une telle mesure est toutefois liée à une interrogation majeure, à laquelle on espère avoir assez vite la réponse : est-on encore potentiellement contagieux après avoir été vacciné ? Et si oui quel peut être le niveau de contagiosité ?

Une autre contrainte porte sur l’inégalité d’accès aux vaccins, liée au rythme de livraison actuel par les labos. Gabriel Attal, le porte-parole du gouvernement, a indiqué ce lundi matin sur France 2 que 15 millions de Français environ devraient être vaccinés d’ici l’été.  Aujourd’hui en revanche, alors que la campagne de vaccination n’en est qu’à ses débuts, le débat sur le « passeport » vaccinal est probablement prématuré. C’est notamment la position du gouvernement. Le secrétaire d’État aux Affaires européennes, Clément Beaune, invité ce dimanche sur France Info, a ainsi estimé que la question ne devait pas être au menu du Conseil européen du 21 janvier. Les Européens ont, il est vrai, d’autres sujets sur la table. Ils doivent en effet essayer d’harmoniser les conditions d’entrées sur leurs territoires, s’accorder sur les conditions de passages pour les transfrontaliers, appréhender le fait que la qualité des laboratoires et les résultats des tests sont sujets à caution dans certains pays, régler la question des contrôle des personnes en provenance d’un pays extra-européen ayant effectué une correspondance dans un autre pays européen pour se rendre sur son territoire, auxquelles on ne demande pas la présentation d’un test aujourd’hui….

La liberté individuelle vs l’intérêt général

Un autre sujet d’interrogation porte sur la liberté individuelle, sur le fait de savoir si l’on peut imposer un passeport sanitaire. Quid alors de ceux ne veulent (ou ne peuvent mais des dérogations peuvent alors être accordées) se faire vacciner ? Cette question éthique pourrait bien être vite battue en brèche au nom de l’intérêt général, de la nécessité de faire passer en priorité les besoins de protection du groupe et des plus fragiles, avec le sens du collectif et dans un esprit de responsabilité, comme l’a rappelé ce dimanche le sociologue Jean Viard sur franceinfo. Et l’on ne parle pas des pressions qui ne manqueront pas de s’exercer sur les pouvoirs publics, de la part des secteurs du tourisme et des transports en très grande difficulté.

On peut en revanche s’interroger sur la légitimité de certaines initiatives prises par des acteurs privés, sans concertations, à l’instar de la compagnie australienne Qantas qui entend obliger ses passagers à être vacciné pour voler sur ses lignes internationales. Quid également de l’avenir des corridors sanitaires aériens mis en place par des États et des compagnies aériennes, de l’initiative d’un pays comme la Grèce de créer son propre certificat sanitaire ? IATA pourrait aussi avoir du mal à pousser son « passeport de santé sécurisé » IATA Travel Pass, au regard de la défiance que suscite cette organisation, notamment chez les professionnels du tourisme.

La présentation d’un « passeport » sanitaire – ou d’un test négatif – doit surtout permettre de supprimer les quarantaines à l’arrivée dans les pays étrangers, lesquelles sont dévastatrices pour les voyages. Le comité d’urgence de l’OMS pourrait ainsi prochainement recommander l’usage de certificats de vaccinations et de tests pour les déplacements internationaux. Le patron d’Aéroports de Paris est pour sa part convaincu que cet usage va devenir la règle dans le secteur du transport aérien. Plutôt que de savoir si ces « passeports » sanitaires seront un jour adoptés, les questions sont probablement déjà aujourd’hui celles de savoir quand ils le seront, et à quel niveau ils seront pilotés. L’Europe, sur ce point, a une belle carte à jouer.