Coronavirus : quelles conséquences pour le transport aérien ?

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Jean-Louis Baroux est un acteur reconnu du monde des compagnies aériennes et créateur du World Air Transport Forum et de l’APG World Connect. Cette semaine, il revient sur l’épidémie du Covid-19.

Pour écrire cette chronique, j’ai emprunté les données et les analyses au cabinet ID AERO qui fournit tous les mois un panorama très complet de tout ce qui concerne l’aéronautique et l’espace depuis le militaire jusqu’au civil et qui couvre tous les secteurs d’activité : transport aérien, construction aéronautique, aspects financiers etc. Je recommande d’ailleurs vivement la lecture de ces rapports. Vous trouverez en fin de cette chronique les coordonnées d’ID AERO.

Que dit-il du Coronavirus et de ses implications sur le transport aérien ? D’abord il a été rechercher un événement qui se rapproche le plus de ce phénomène : le SRAS. L’analyse fine des conséquences du SRAS sur le transport aérien et l’économie en général donne un premier éclairage. Mais l’étude pointe aussi les différences : la situation entre le Coronavirus et le SRAS n’est pas la même. Quelques années sont passées par là.

Le SRAS

Le premier cas est apparu le 16 novembre 2002 en Chine, la nouvelle n’avait d’ailleurs pas été divulguée à cette époque. La première information n’est apparue que le 21 janvier 2003 dans les médias américains. L’état d’alerte a été lancé par l’OMS le 12 mars 2003 et le pic de l’épidémie a été annoncé toujours par l’OMS le 05 juin 2003. Enfin le même organisme a annoncé la fin de l’alerte le 24 juin 2003. A l’époque 8458 cas dont 807 mortels ont été enregistrés à travers le monde.

Trois types de marché ont alors été impactés. D’abord, le marché domestique chinois, puis le marché vers et en partance de la Chine et enfin le marché international inter-continent asiatique. Rappelons-nous qu’à cette époque, qui remonte 17 ans en arrière, la Chine n’avait pas encore pris l’habitude de communiquer facilement. Ainsi les résultats statistiques n’ont pas été appréhendés de suite. Néanmoins le point bas du trafic domestique s’est situé au mois mai avec une baisse considérable de 72,2%. Mais dès le mois de juillet le trafic redevient positif (+29,9%). Par contre le trafic international chinois est impacté dès le mois de mars, avec un point bas en mai (-72,9%) et une reprise tardive en novembre (+3,1%). En dehors de la Chine, le trafic Asie est lui aussi fortement touché entre le mois de mars (-14,3%) et le mois de novembre (+1%) avec un point bas en mai (-34,3%). En clair l’impact négatif a été le plus fort en Chine, mais c’est là où il a duré le moins longtemps : 3 mois et le trafic international a nécessité 8 mois pour retrouver la croissance.

Le Coronavirus

Il commence comme le SRAS en décembre 2019 à Wuhan, sans que les autorités chinoises communiquent sur le sujet avant la fin décembre 2019, début janvier 2020. Le 13 janvier 2020, le premier cas d’infection est découvert hors de Chine et les compagnies aériennes suspendent leurs vols de et vers ce pays fin janvier. Le 30 janvier, l’OMS classe l’épidémie comme une urgence de santé de portée internationale. Bien entendu, à ce stade nous ne connaissons pas l’évolution de d’épidémie, mais une première information concernant le pic de contamination en Chine est arrivée dans la dernière semaine de février.

Entre le SRAS et le Coronavirus, 17 ans se sont écoulés et la situation internationale a bien changé, en particulier par rapport à la Chine. En 2003 les marchés concernés pesaient pour 18% du commerce mondial alors qu’ils représentent maintenant 30% des échanges. En 2002 le trafic domestique chinois représentait 3% du total mondial contre 10% en 2019. Le trafic international de et vers la Chine tous transporteurs confondus est passé de 5% en 2002 à 11% en 2019. Quant au reste du marché international asiatique, il est resté stable à 10%.

A partir de ces constats, ID AERO a élaboré 3 scénarios. Le premier est la copie du SRAS en ampleur et en durée. Dans cette hypothèse, après un point bas en février à avril 2020, la reprise s’amorce lentement en mars et la croissance repart en juin. Le scénario 2 est plus pessimiste. L’ampleur et la durée de l’épidémie sont plus fortes. Dans cette hypothèse, tous les trafics intercontinentaux sont touchés, la décroissance est forte dès février (-16%), elle s’accélère en mars (-16,2%), elle reprend timidement en avril (-15,8%) et elle repart à partir de juillet pour retrouver une croissance mondiale de 4% à partir d’octobre. Un troisième scénario est en train d’être modélisé où le Coronavirus devient une pandémie. Dans ce cas, les effets négatifs se feront sentir jusqu’en 2021. Il ne reste plus qu’à espérer rester au premier scénario tout en se préparant au troisième.

Allez, bon courage à tous quand même.

ID AERO – Mr Jaques Delys – www.id-aero.com – [email protected]