Business travel : ce voyage sur quatre qui peine à revenir

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Les voyages d'affaires peinent à retrouver leurs niveaux pré-pandémiques. Il semblerait que 75% des volumes de 2019 constituent un plateau au-dessus duquel il est malaisé de s'élever. For ever ?

Les voyages d'affaires peinent à retrouver leurs niveaux pré-pandémiques. Il semblerait que 75% des volumes de 2019 constituent un plateau au-dessus duquel il est malaisé de s'élever. For ever ?

La semaine dernière, l’affichage des résultats d’Amex GBT du Q1 2023 s’accompagnait de la mise en exergue d’un chiffre des plus flatteurs : les revenus de la première TMC du monde avaient bondi de 65% par rapport à la même période de 2022. Certes, ce Q1 22 était marqué par la pause “Omicron”, mais la performance était bien là.

Pourtant, le reste du rapport décrivait une réalité moins enchanteresse : les transactions avaient augmenté de 61 % en glissement annuel pour atteindre 76% des niveaux de 2019. Un quart des voyages a donc disparu chez les clients de GBT par rapport à l’année précédant le cataclysme Covid (et même davantage puisque la TMC se targue d’en avoir capté de nouveaux dans le segment mid-market).

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Si le contexte est donc au déficit de voyages d’affaires, il se caractérise aussi par une hausse des tarifs fournisseurs. Pour l’aérien, Augustin de Romanet, patron des Aéroports de Paris, évoquait, à la dernière assemblée du Board of Airlines Representatives, une hausse de quelque 30%. Pour l’hôtellerie, citer un chiffre global est moins significatif : l’augmentation des tarifs est trop disparate, selon les types d’établissement, leur localisation… Mais elle est, dans tous les cas, à deux chiffres. Bien au-delà de l’inflation, donc.

La hausse des tarifs, effets contrastés

Cette hausse des tarifs est-elle une bonne nouvelle pour l’industrie du business travel ? C’est discutable. D’un côté, elle compense partiellement la disparition d’un voyage sur quatre, profitant ainsi aux producteurs et, par répercussion, aux distributeurs. Illustration dans le même rapport d’activité de GBT :  si les transactions ont augmenté de 61 %, leur valeur totale a crû de 88%

Mais de l’autre, on peut faire l’hypothèse que ces tarifs élevés freinent un retour plein et entier des voyages professionnels pré-pandémiques. Ou pas. Et c’est là toute la question de ce qui relève du contexte, de l’inertie naturelle d’une reprise qui s’avèrera complète un jour ou l’autre (en 2026, prévoyait une étude de la Global business Association (GBTA) d’août 2022), ou de la "nouvelle normalité".

Ce "new normal" dont parlaient les médias américains dès le printemps 2020, il se caractérise notamment par une injonction RSE plus forte, un critère ROI dans la validation des voyages plus prédominant, une expansion de l’utilisation des outils de communication à distance. Toutes choses qui plaident pour une baisse des voyages d’affaires structurelle.

Et, plus trivialement, de nombreuses entreprises ont pu constater qu’elles n’ont pas perdu d’argent en voyageant moins. Pourquoi se priver de telles économies ? Ce constat est bien moins vrai pour les TPE/PME. D’où l’appétit que ce segment de marché aiguise chez les TMC. En témoigne, pour évoquer une actualité récente, le rapprochement de CWT et Booking.com for Business.

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Une grosse industrie est une grosse industrie. Et le business travel en est est une : plus de 1400 milliards de dollars en 2022, d’après la GBTA. Et le quart d’une si grosse industrie reste un lubrifiant de choix pour huiler les rouages de l’économie globale. Mais l’économie globale s’en moque : ces quelque 350 milliards de dollars se retrouveront bien ailleurs dans le circuit (c’est même le principe d’un circuit), sous forme de salaires, et/ou de dividendes, et/ou dans les poches de fournisseurs d’une autre industrie.

Et c’est ça dont les parties prenantes du business travel se moquent : si ces 25% manquants venaient à se pérenniser, qu’en sera-t-il du paysage "voyages pros" dans, disons, 2 ou 5 ans ? Un marché profondément restructuré, évidemment, "consolidé", comme on dit, d’une façon plutôt cocasse quand il s’agit des conséquences d’un affaiblissement. Pour prendre un peu de hauteur, cette question : quels sont les cas historiques d’industries ayant perdu le quart de leurs revenus sans jamais les retrouver en si peu de temps ? DeplacementsPros ne manquera pas de se pencher sur ce sujet.

Puisqu'on a ouvert la boîte de Pandore en relisant le rapport d’activité d’Amex GBT, reprenons le même document pour y trouver quelques motifs d’espoir pour les professionnels de la profession. Amex GBT y indique donc l’acquisition de nombreux clients TPE/PME (que l’agence se garde bien de chiffrer)... dont 30% d’entre eux étaient unmanaged ! Mais, pour compenser ce voyage sur quatre qui ne reviendrait pas dans les grands groupes, combien de TPE ?