Edito – Acteurs du business travel, êtes-vous très réactifs face à votre projet ?

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La novlangue entrepreneuriale jusque dans les JO...

Les Jeux olympiques sont, pour moi, un rendez-vous assez important pour bouleverser l’organisation de mes vacances estivales et, d’autant plus, l’aggiornamento des mes journées de travail. C’est le bonheur de vibrer lors de mes compétitions préférées. C’est aussi l’occasion de m’initier aux mœurs, coutumes, règles et règlements des autres. C’est enfin l’occasion de me vautrer dans un chauvinisme dont j’ai sincèrement honte - c’est pourquoi j’aimerais que ça reste entre nous.

Ce dimanche, fin de journée, je m’installe devant l’écran principal de mon domicile pour assister à la finale du slalom du kayak. “Pour mieux connaître ce sport”, aurais-je répondu à mes enfants s’ils m’avaient interrogé sur l’incongruité de mon soudain engouement pour ce sport. “Parce qu’une Française (Camille Prigent) a une chance (rapidement dilapidée, mais là n’est pas le sujet) de médaille”, si j’avais voulu être franc, terme contenu dans “français”, on se demande bien pourquoi. 

Me voilà donc, par la grâce de France TV, à Vaires-sur-Marne, riante commune du 77, dotée d’un stade nautique, désormais olympique donc, à même de faire aimer ce département, pour ceux que Melun, son brie et son Musée de la Gendarmerie nationale, ou Meaux, son brie et son maire Jean-François Copé, n’auraient pas suffi à convertir au “I love Seine-et-Marne”. 

Mais la finale arrive. Auparavant, la demi-finale a été tendue, le parcours slalom est vicelard, Camille (la Française, vous avez compris, celle pour laquelle mon cœur bat au à l'unisson de la marche militaire de la Marseillaise, à ce moment précis) s’est qualifiée pour ce parcours ultime. La qualif n’a pas été facile, certes, mais pas grave : les compteurs sont remis à zéro niveau chrono. Quand même... S’il y a avait un vendeur de clopes qui débarquait dans mon salon avec un panier en osier façon entracte de ciné d’antan, peut-être que je replongerais pour une Marlboro…

La favorite de la course, une Australienne, qui a même porté le drapeau de son pays à la cérémonie d’ouverture, Jessica Fox, s’élance. Et là, la course. Elle est sacrément douée et gracile, la Jessica. Et les commentaires, bien sûr… Comme toujours : un journaliste sportif de France TV, accompagné d’un consultant, en l’occurrence une consultante, et pas n’importe laquelle : Marjolaine Hecquet, “céiste” (ça veut dire “pratiquante du canoë”) émérite, médaillée d’or à Londres, s’il vous plaît.

Ce que Marjolaine dit de Jessica

Et que dit-elle, Marjolaine, de Jessica fox, durant son parcours ? Je sais que le suspense est insoutenable.  Elle ne dit pas “Elle vire très près des portes”, ou “Elle ne se bat pas contre le courant : elle l’utilise”, des trucs que j’aurais pu comprendre, ni même “Ses cols de cygnes sont superbes”, des expressions propres à ce sport dont j’aurais été ravi d’apprendre l’existence… Non, Marjolaine dit (en parlant de SON sport, à propos de Jessica Fox) : “Elle est très réactive face à son projet”. 

Elle est très réactive face à son projet”... Elle parle donc, Marjolaine, d’une championne de SON sport. Elle a tout le vocabulaire, le beau, le propre, l’apprenant du vocabulaire de SON sport, comme l’horticulteur l’a à propos de l’horticulture, par exemple… Mais non, elle dit ça, Marjolaine : “Elle est très réactive face à son projet”. Je n’utilise jamais d'émoticônes dans mes messages perso, souffrez que j’en utilise encore moins dans mes articles. Mais si, à l’évocation de ce moment télévisuel, je devais rompre cette règle de conduite typographique, c’est sans aucun doute la petite tête jaune avec la bouche de laquelle jaillit une substance verte qui aurait ma faveur.

Donc on est ok, les acteurs du business travel, à la rentrée, on ne se parle plus de “consolidation du marché”, de “restructuration des équipes” ou de… Mais non en fait… Pourquoi vous priveriez-vous de votre novlangue puisque je viens de faire la démonstration qu’elle est assez puissante pour investir d’autres secteurs que celui de l’entreprise ? Je suis con, parfois. Comment ça se dit chez vous ?

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