Êtes-vous prêt à mettre en place une politique voyages verte ?

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Johnny Thorsen, vice-président de la stratégie de voyage chez Amex Digital Labs, a récemment produit un texte sur la transformation du voyage d’affaires en voyage écologique d’ici la fin de la décennie. Nous en reprenons ici l’essentiel, qui revient à un programme (ambitieux et optimiste) à l’attention des acheteurs et des fournisseurs de voyages.

D’une décennie à l’autre, on peut espérer que la prise en compte de la dimension écologique du voyage d’affaires progresse fortement. Dans les années 2010, il faut se souvenir que des concepts tels que l’empreinte carbone et la compensation ne sont apparus qu’à la toute fin de la décennie. Effet « Greta », popularisation du « flygskam » (« honte de voler ») sont soudainement devenus des classiques des médias grand public.

A tel point qu’aujourd’hui, ils ont intégré la conscience de ce que doit être un voyage d’affaires éco-responsable : le devoir de diligence, le traveler-centricity ou le traveler well-being  sont désormais des composantes reconnues comme nécessaires à tout programme de voyage qui se veut vertueux. Compte tenu de cette évolution, on peut raisonnablement penser qu’au-delà de la conscience qu’on a de cette nécessité, ces exigences soient traduites dans tout voyage d’affaires d’ici la fin de cette nouvelle décennie.

Où en sommes-nous aujourd’hui et quelles sont les attentes et les prévisions réalistes quant à l’évolution de ce nouveau niveau de contrôle et de gouvernance ? Et quels sont les nouveaux services et solutions qui doivent être développés et mis en œuvre pour réussir ?

Établir une base de référence

Tout bon programme ou toute bonne politique commence par l’identification d’une base de référence. Autrement dit : l’examen de la situation actuelle et des options à disposition pour mesurer et améliorer le programme à l’avenir.

Sans entrer dans les détails techniques, il semble largement admis que l’aviation a été responsable d’environ 900 millions de tonnes d’émissions de CO2 en 2018, soit environ 2,4 % du total des émissions mondiales (12 % du total du CO2 lié au transport), et ce chiffre devrait malheureusement tripler pour atteindre plus de 2 700 millions de tonnes de CO2 d’ici 2050.

Selon la recherche de carbonindependent.org, cela signifie qu’une heure de vol avec un Boeing 737 ou un Boeing 747 produit 90 kg de CO2 pour chaque passager, mais l’impact total sur l’environnement est estimé à 250 kg. Même si l’étude ne le mentionne pas ces chiffres sont bien sûr similaires pour un vol en Airbus.

En ce qui concerne les hôtels, la moyenne mondiale est actuellement définie comme étant de 31,5 kg de CO2 par chambre et par nuit.

Enfin, les aéroports se concentrent de plus en plus sur le problème du CO2 et, en 2018, la moyenne des émissions par passager au départ dans les aéroports du monde entier a été estimée à 1,81 kg de CO2, avec des différences importantes entre aéroports en fonction de leurs capacités écologiques.

Pour illustrer l’impact de ces chiffres, un programme de voyage avec des totaux annuels de 100 000 heures de vol, 50 000 départs d’aéroport et 10 000 nuitées d’hôtel crée un total de 25 405 tonnes de CO2, ce qui équivaut à une émission estimée de 0,508 tonne de CO2 par jour de voyage. Ce chiffre est une base de référence à améliorer.

Définir un programme de voyage écologique

Comme il reste presque 10 ans d’ici la fin de la décennie, il semble raisonnable de définir des objectifs relativement ambitieux pour que les choses aient vraiment changé à la fin des années 2020. Voici donc quelques suggestions à l’intention des acheteurs et des fournisseurs de voyages, dont on espère qu’ils s’inspireront.

Des objectifs par jour, mois, trimestre ou année

De toute évidence, cette composante n’a de pertinence que s’il existe une saisie crédible des données utilisées pour calculer l’estimation sérieuse de l’émission de CO2, en fonction de la classe de voyage, de l’avion utilisé et de l’efficacité opérationnelle de la compagnie aérienne, de l’aéroport, de l’hôtel ou du fournisseur de transport terrestre concerné. Ce type de solutions sera vraisemblablement créé d’ici la fin 2020.  

Sélectionner les services de voyage en fonction des émissions plutôt que du prix

Presque toutes les recherches de voyage sont basées sur le prix aujourd’hui, mais comme la politique de voyage écologique devient plus importante, les voyageurs demanderont et exigeront éventuellement la possibilité de rechercher une place d’avion en fonction de l’émission réelle de carbone pour le vol ou l’option d’hébergement. De tout nouveaux tags ou qualificatifs dans nos moteurs de recherche devraient faire leur apparition.

Simplifier les modèles de compensation de CO2

Les compagnies aériennes ont jusqu’à présent compliqué le processus de compensation du CO2 pour un vol donné à tel point que la plupart des voyageurs ignorent cette option. Et pour les quelques voyageurs qui décident de passer par ce processus, ils réaliseront le peu de contrôle ou d’influence qu’ils ont sur l’endroit où la compensation est réellement utilisée et sur la somme allouée qui finira par avoir un impact.

À l’avenir, un nouvel élément apparaîtra dans le profil de voyageur, conçu pour gérer le processus de compensation du CO2, combiné à un état cumulatif de la valeur réelle du montant de compensation par le voyageur individuel.

Programme de voyageur « carbone »

D’ici un à trois ans, un nouveau type de programme de fidélisation devrait émerger pour reconnaître et promouvoir les voyageurs les plus soucieux de leur bilan carbone – et ce programme fonctionnera de façon transparente chez tous les fournisseurs de voyages. Les voyageurs recevront un badge dont le statut sera égal à leur niveau d’efficacité CO2 par heure de vol ou par nuitée d’hôtel, et ce badge figurera sur les cartes d’embarquement, les étiquettes de bagages, les cartes de crédit et les programmes de fidélisation.

Changements de comportement des voyageurs

Les voyageurs rechercheront et consommeront de plus en plus des services qui ont une réduction directe de leur empreinte CO2. Un exemple d’un tel service pourrait être la réduction de la quantité de bagages grâce à la location de vêtements à destination, l’utilisation de véhicules électriques chaque fois que possible et, bien sûr, la sélection de compagnies aériennes utilisant les moteurs, et donc les carburants, les moins émetteurs.

Aéroports verts

Les aéroports resteront une entité relativement statique, mais les voyageurs soutiendront de plus en plus les aéroports qui affichent de nettes améliorations sur le front du CO2. Cela implique des initiatives telles que l’utilisation de logiciels d’intelligence artificielle pour assurer un départ à l’heure à partir de la porte d’embarquement, des véhicules électriques de refoulement pour le déplacement des avions et un temps de roulage minimum sur le tarmac, des centrales électriques utilisant des énergies renouvelables et un recyclage efficace des déchets.

Éviter les déplacements sur de courtes distances

L’un des domaines de développement les plus intéressants est la tendance précoce à l’évitement des vols pour les voyages aériens intérieurs et court-courriers. Les vols de moins de 500 milles (800 km) sont ceux qui génèrent le plus de CO2 par heure de vol.

Si on élimine ces vols courts, cela revient à établir une règle : éliminer tout vol de moins de 90 minutes des programmes de voyage.

Par où commencer ?

Acheteurs et fournisseurs peuvent agir presque immédiatement. Pour les acheteurs, en commençant par créer un modèle de base pour calculer le CO2 en 2020. Pour les fournisseurs, en établissant un système de données crédibles que leurs clients pourront utiliser.