Christophe Drezet, directeur associé au sein d’EPSA GROUPE conseille les entreprises sur les tendances du moment.
Si la crise sanitaire que nous traversons impacte lourdement le secteur des déplacements professionnels d’un point de vue économique, et engendre une mutation profonde de nos habitudes, force est de constater que les contraintes imposées aux entreprises et aux collaborateurs agissent également comme un accélérateur de tendances et nous conduisent à réinterroger la notion de « mobilité ».
De nouvelles habitudes de travail
La transformation digitale des services s’intensifie fortement et dans de nombreux secteurs d’activité : la téléconsultation (en avril, 27% des consultations remboursées par l’Assurance Maladie ont été réalisées à distance, contre moins de 1% avant la crise), le e-commerce (41 millions de cyberacheteurs en France au Q2 2020), la visio-conférence (+1000% de réunions pour Teams et +2900% pour Zoom) pour n’en citer que quelques-uns.
A cela s’ajoute un nouveau cadre de travail. En effet, l’issue du confinement, le télétravail se voit étendu au profit d’un équilibre plus juste entre vie professionnelle et vie personnelle : au cours de l’été, 45% des salariés travaillant habituellement dans des bureaux continuaient à télétravailler, contre 18% avant la crise et 65% durant le confinement. S’ils avaient le choix, près d’un salarié sur deux souhaiterait pouvoir travailler la moitié du temps au bureau, et l’autre moitié à domicile (IPSOS).
Cette nouvelle organisation du travail se reflète aussi sur l’évolution des transactions immobilières. Les citadins, plus enclins au télétravail, sont donc nombreux à s’orienter vers un cadre de vie plus calme et verdoyant. En août 2020, les recherches de logement à Paris ont reculé de 5% tandis qu’elles ont augmenté d’environ 30% pour la petite couronne, et atteignent +118% en Seine-et-Marne.
Enfin, la sécurité, qui constitue le 2ème étage de la pyramide de Maslow (juste après les besoins physiologiques), reste au cœur des préoccupations du collaborateur ; et en dépit des protocoles sanitaires mis en place par les entreprises, la crainte d’une contamination est restée un frein majeur à la reprise des déplacements professionnels, accentuée par l’utilisation des outils de communication en ligne.
Voyageur 3.0
Lors du confinement, les actifs ont éprouvé les solutions de visio-conférence. Ils ont géré des contrats, piloter des projets, fédéré leurs équipes… C’est une nouvelle façon de travailler qui émerge au sein de l’entreprise, et il est illusoire d’attendre un retour à la « normale » avant plusieurs mois, voire années. Au mois de mai, la capitalisation boursière de Zoom a dépassé celle des 7 premières compagnies aériennes réunies et atteint aujourd’hui plus de 150 milliards de dollars.
Le COVID-19 a précipité notre entrée dans une nouvelle ère économique, que l’on pourrait qualifier de « quatrième révolution industrielle », caractérisée par l’importance de la technologie et de l’intelligence artificielle, mais plus que jamais conditionnée au caractère durable et responsable de nos activités.
Les grandes entreprises amorcent déjà de profondes mutations à ce sujet : suite à l’atteinte du pic d’utilisation du pétrole, les compagnies pétrolières comme BP, Shell ou encore Total ont déprécié leurs actifs de 15 à 20 millions de dollars. Les acteurs de la sphère des déplacements professionnels ont évidemment une carte à jouer pour s’inscrire dans une économie digitalisée et décarbonée réalisant des investissements (compensation CO², nouveaux outils, engagements RSE).
RSE : virage stratégique
Enfin, si l’optimisation des dépenses a longtemps été à l’ordre du jour, les dépenses consacrées aux déplacements professionnels par les entreprises se sont considérablement réduites, et c’est un nouveau sujet qui s’immisce au cœur des préoccupations des décideurs : la dimension RSE, et plus particulièrement les émissions de CO² générées par les déplacements. L’enjeu majeur pour les prochaines années va être d’envisager la mobilité des collaborateurs de façon durable et responsable.
Au sein des entreprises, on observe la mise en place progressive de plusieurs actions, parmi lesquelles :
- La collecte et consolidation les données pour avoir une vision exhaustive ;
- La définition, suivi et pilotage des indicateurs clés ;
- L’intégration de la norme ISO 20400 dans le process achats ;
- L’intégration d’une perspective RSE dans la PVE de l’entreprise ;
- Le déploiement d’outils de gamification pour favoriser l’adoption de comportements responsables et plébisciter des acteurs engagés.
Pour les TMC, frappées de plein fouet par la crise sanitaire et économique, l’intégration de solutions compatibles avec les enjeux RSE est une opportunité à saisir pour préserver l’activité, en donnant du sens et de la valeur ajoutée aux déplacements de demain.