Le Parlement européen a adopté ce 1er avril 2025 la procédure d'urgence pour le paquet omnibus, marquant un recul significatif des ambitions européennes en matière de reporting extra-financier.
Ce qui était attendu par tous, craint ou espéré par d’autres, est bel et bien advenu : ce 1er avril 2025, le Parlement européen a voté en faveur de l'adoption de la procédure d'urgence "stop the clock" du paquet omnibus, avec 427 voix pour, 211 contre, et 14 abstentions.
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Ces résultats marquent un moment clé, où des voix eurosceptiques ont joué un rôle décisif pour atteindre la majorité, alors que la coalition dite “von der Leyen” se déchirait entre sociaux-démocrates (S&D) et Verts, d’une part, Renew et du Parti populaire européen (PPE) d’autre part.
Derrière le jargon…
Le paquet omnibus est un ensemble de mesures législatives regroupées dans un texte unique allégeant, en l'occurrence, les contraintes des reportings extra-financiers des entreprises européennes (CSRD en premier lieu).
Ce package inclut le mécanisme "stop the clock", qui propose de suspendre temporairement certaines exigences réglementaires. Cette procédure d'urgence a été adoptée pour accélérer la mise en œuvre du texte, court-circuitant ainsi les procédures législatives habituelles. Normal : la CSRD, déjà appliquée pour les plus grandes entreprises, s’imposait, telle qu’initialement adoptée, à la plupart des autres dès cette année (pour publication en 2026).
Le paquet omnibus prévoit trois modifications majeures
D’abord, le relèvement significatif des seuils d'application : seules les entreprises de plus de 1.000 salariés ou générant un chiffre d'affaires supérieur à 450 M€ seront désormais soumises à l'obligation de reporting. Cette révision exclut environ 80% des entreprises précédemment concernées, principalement des PME et ETI.
Ensuite, pour les entreprises soumises à la CSRD, l’abandon de l'obligation d'audit externe des rapports extra-financiers. Cette mesure réduit considérablement la garantie de fiabilité et de crédibilité des informations publiées, ce qui représente selon les critiques "un recul majeur dans la quête de transparence et de rigueur".
Enfin, la réduction des exigences de diligence raisonnable dans la chaîne d'approvisionnement (CS3D), limitant la responsabilité des entreprises à leurs fournisseurs directs uniquement. Les sous-traitants indirects ne sont plus inclus dans le périmètre de vigilance obligatoire. Cette modification entraîne une réduction importante du "scope 3" (émissions indirectes) dans le reporting des entreprises, permettant potentiellement à certaines organisations de se soustraire à leur responsabilité en matière de transparence et d'éthique dans l'ensemble de leur chaîne de valeur.
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Ce vote constitue un revers majeur pour l'ambition européenne de leadership en matière de transition écologique et sociale. En cédant aux pressions du lobby industriel sous couvert de compétitivité économique, le Parlement européen sacrifie la transparence et la responsabilité environnementale sur l'autel du court-termisme. DeplacementsPros reviendra dès demain sur les implications spécifiques de cette décision pour le secteur du voyage d'affaires, particulièrement concerné par les enjeux de reporting carbone et de durabilité.