Manor veut révolutionner le modèle économique des TMC

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Manor veut révolutionner le modèle économique des TMC
Grégory Mavoian, président de Manor, au congrès 2023 de son réseau.

A l’issue du Congrès du réseau d’agences Manor, qui s’est déroulé à Marbella les 10 et 11 novembre, son président Grégory Mavoia revient sur le temps fort de l’événement : la présentation du nouveau modèle économique que le GIE propose à ses adhérents.

Quels furent les points saillants de ce congrès qui vient de s’achever ?

Grégory Mavoian : Il y a eu plein de moments importants et enthousiasmants. L’une de vos consœurs journaliste, présente sur place, est venue me voir à l’issue de l’événement, en me disant : “J’ai interrogé plein de gens, ils ne m’ont dit que du bien de ce congrès. Il me faut un contrepoint pour mon article  !” Mais à vrai dire, je ne vois pas trop ! Il y a eu l’intervention de Mounir Mahjoubi (Secrétaire d’Etat au Numérique (2017-2019), aujourd’hui à la tête d’Eversy, marketplace dédiée notamment au tourisme, ndr) à propos de l’apport potentiel de l’IA à nos professions, saluée par une standing ovation. Il y eut aussi cet excellent point, très détaillé, sur les rôles mandataires/mandatés, assuré par l’avocate Marie-Laure Taragano, qui a été très apprécié. Mais le gros sujets de ces deux jours, c’était la présentation de notre nouveau modèle économique.

Venons-y. Le modèle économique des TMC, son inadéquation, c’est un vieux débat. En quoi Manor, le temps d’un congrès, peut-il changer la donne ?

Oui, c’est un débat qui a une vingtaine d’années : depuis la fin des commissions, en fait. Nous sommes passés au transactionnel mais nous avons gardé le même état d’esprit. Nous offrons des services nouveaux mais nous ne les facturons pas ou pas assez. Un exemple d’actualité : au début de OUIGO, quand des billets étaient vendus, l’agent faisait la réservation sur le site dédié et facturait comme un trajet SNCF. Quand c’était anecdotique, ça pouvait aller, mais dès lors que les gares et les horaires OUIGO sont adaptés aux voyageurs d’affaires et que ça prend de l’ampleur, alors ce “bricolage” n’est plus du tout adapté. En fait, on a nos habitudes et quand on constatait des problèmes, on essayait de les résoudre mais en raisonnant toujours dans notre cadre. Ce qui peut changer avec notre proposition, c’est qu’on en sort, de ce cadre ! Quand il n’y a pas de solutions possibles dans notre modèle alors il faut regarder comment ça se passe sur d’autres marchés. 

Et donc, quels “autres marchés” vous ont inspiré ?

Sans aucun doute, c’est une combinaison de ce qui se fait dans les modèles de la banque et de la téléphonie. Dans le modèle bancaire, on propose un catalogue de produits avec des prix. C’est totalement transparent. Il faut que nous faisions la même chose - et nous avons élaboré ce catalogue, il fait 18 pages comprenant l’engagement contractuel, les différents degrés de paramétrage, l’account management, la facturation…

Quant au modèle de la téléphonie, on le connaît tous, c'est très libre : on a une carte prépayée, un abonnement avec ou sans engagement, un abonnement international… Et quand on se retrouve avec une note salée parce que notre contrat n’était pas adapté à nos besoins, on appelle l’opérateur et on ajuste, il nous remet dans le “pack” commercial idoine.

“Transparence” et “liberté”, ce seraient donc les deux maîtres mots de ce nouveau modèle ?

Oui mais j’y ajouterais la personnalisation. Toutes les agences sont d’accord (et il y a eu un sondage en direct lors du congrès, à ce sujet, qui le confirme) pour que le “One size fits all” (“Un modèle qui convient à tous”, ndr) ne convient pas : il n’y aura pas d’universalisation de la demande et donc, il ne faut pas qu’il y ait ça du côté de l’offre. Dans le modèle que nous proposons, un client peut prendre un système de management fee et un service au transactionnel, par exemple. C’est la personnalisation rendue possible, donc, par la transparence et la liberté.

On sent aussi que dans ce nouveau modèle, il y a comme la réparation d’une “injustice” ou, du moins, une volonté de pédagogie par rapport aux services rendus pas les agences…

Oui ! Les TMC n’ont pas référencé la valeur des services qu’elles proposent (ou même qu’elles effectuent sans que le client en soit conscient). Pour les TMC, la complexité ne cesse de s’accroître. Alors, dans notre nouveau modèle, il y a ce catalogue de services qui est évolutif. Par exemple : “Voulez-vous une connexion à Trainline ou à NDC (il y a en gros quatre compagnies qui sont connectées NDC, avec chacune une façon de le faire payer différente ! C’est déjà compliqué pour les agences, alors pour les clients…) ?  A ce propos, je précise que si le déploiement de NDC a été freiné, c’est que ce n’est pas adapté au modèle des agences, c’est donc bien qu’il y a un problème ! Bref, je reviens à la pédagogie : durant les récentes grèves SNCF - et il y en a souvent - les agences ont dû gérer des dizaines de milliers d’annulations… Service non facturé. Avec le nouveau modèle, il est possible de proposer un pack “grèves” : le client s’assure contre ce risque et les agences mettent à disposition les ressources nécessaires en face.

Reste à convaincre les agences… Et les clients !...

J’ai passé une année à écouter : les adhérents, dans mon agence (Grégory Mavoian est aussi dirigeant de Globeo Travel, ndr), les clients. Ce nouveau modèle qu’on propose en est le résultat. Concernant les agences, à l’issue de la présentation de ce nouveau modèle, j’ai eu deux types de réactions : “Envoie-moi le document dès lundi !” ou “Comment n’y a-t-on pas pensé avant ?”. Manor, c’est un réseau de 320 agences, certaines avec deux employés, d’autres avec deux cents. Or, il se trouve que ce modèle est adaptable. Toutes les agences se plaignent et la seule réponse, c’est une hausse tarifaire et pas une proposition de valeur, ce que fait ce nouveau modèle. Ce qui me permet de faire la transition avec les clients : ce n’est pas une histoire de hausse des prix mais une proposition nouvelle, transparente (ce qu’ils réclament beaucoup), de la renégociation des prix en fonction de leurs besoins : ça ne peut que les séduire.