Pour certaines entreprises, c'est dans quelques mois que la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) deviendra une réalité puisque leur première année de référence sera 2024. Résumé des enjeux, notamment dans le voyage d'affaires.
La directive européenne NFRD (Non Financial Reporting Directive) qui encadre aujourd’hui les déclarations de performance extra-financière des sociétés européennes aura bientôt vécu. Dans le cadre du Pacte Vert pour l’Europe, la directive (UE) 2022/2464, dite « CSRD » (Corporate Sustainability Reporting Directive), s’appliquera progressivement à compter du 1er janvier 2024.
Les principales dispositions de la CSRD
Le renforcement des exigences de reporting de durabilité des sociétés est un élément clé du. L’objectif principal de la CSRD est d’harmoniser le reporting de durabilité des entreprises et d’améliorer la disponibilité et la qualité des données RSE publiées. Ces évolutions permettront par exemple de répondre aux besoins d’information des acteurs financiers, eux-mêmes soumis à des obligations de reporting RSE. Les principaux changements introduits en comparaison de la directive NFRD de 2014 sur la publication d'informations non financières sont :
- Un champ d’application élargi : un nombre significativement plus important de sociétés seront concernées par les obligations de reporting
- Un renforcement et une standardisation des obligations de reporting
- Une localisation unique : le reporting de durabilité sera publié dans une section dédiée du rapport de gestion
- Un format digital imposé : le rapport de gestion sera publié dans un format électronique unique européen xHTML
- Une vérification obligatoire de l’information par un commissaire aux comptes ou un organisme tiers indépendant (au choix des Etats)
Le calendrier d’application
La directive CSRD a été publiée au journal officiel de l’Union européenne le 16 décembre 2022. Elle entrera progressivement en application à compter du 1er janvier 2024. Il est en effet prévu une entrée en application différée pour certaines catégories d’entreprises.
Catégories d’entreprises |
Exercice de référence |
1er reporting en : |
Grandes entreprises européennes et non européennes vérifiant les seuils de la NFRD Entités d’intérêt public européennes (au sens de la directive Comptable - qui comprennent les sociétés européennes cotées sur un marché réglementé européen) et sociétés non européennes cotées sur un marché règlementé européen, qui satisfont les deux critères suivants :
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2024 |
2025 |
Autres grandes entreprises européennes et non-européennes Toutes les autres sociétés européennes qui satisfont au moins deux des critères suivants :
Toutes les sociétés non-UE cotées sur un marché règlementé UE qui satisfont deux des trois critères mentionnés ci-dessus. |
2025 |
2026 |
PME cotées sur marché règlementé européen Toutes les PME UE et non-UE cotées sur un marché règlementé européen, sauf les microentreprises (Microentreprise : société ne dépassant pas deux des critères suivants : 10 salariés, 250K€ de total de bilan, 700K€ de CA). |
2026 – possibilité de reporter à 2028* |
2027 – possibilité de reporter à 2029* |
Autres grandes entreprises non-européennes Sociétés non européennes ayant un chiffre d’affaires européen supérieur à 150M€ et une filiale ou succursale basée dans l’Union européenne. |
2028 |
2029 |
Qu'en pensent les acteurs du business travel ?
Lors d'un récent webinar organisé par l'AFTM, Pierre-François Verbecque (The Treep) estimait que ce nouveau reporting consituait "une révolution car les données sont digitalisées et approuvées par un tiers (...), consultables par les investisseurs. C'est intéressant car si cette nouvelle disposition présente des containtes, elle offre aussi de nombreux bénéfices".
Les bénéfices dont parle Pierre-François Verbecque relèvent avant tout de l'incitation à la vertu RSE que cette CSRD implique. En effet, si, pour l'heure, les sanctions formelles n'existent pas, elles seront au moins indirectes : les investisseurs auront une tendance accrue à prendre en compte un reporting extra-financier devenu plus fiable et plus comparable.
Lors du même événement, Stéphane Lormant (FCM Travel) considérait même que cette absence de sanctions directes permettait "une transition en douceur mais que cet état de fait évoluerait, avant l'arrivée, un jour, de sanctions directes".
Reste que cet enjeu du reporting extra-financier est intrinsèquement lié à celui de la mesure de l'impact carbone. Stéphane Lormant souligne que "les TMC peuvent fournir des chiffres : la plupart des OBT se fondent sur les critères de l'ADEME ou de leur équivalent dans d'autres pays européens. Au niveau international, c'est plus compliqué, même s'il existe le modèle GHG, créé par l'ONG WBCSD."
Pierre-François Verbecque confirme ces difficultés, pas seulement au niveau international : "Il existe quatre types de calcul de l'impact d'un trajet aérien, ayant un rapport de un à dix selon qu'il soit celui du GDS, de la compagnie ou de l'ADEME. Quant à l'impact d'un séjour hôtelier, l'une des difficultés est qu'il dépend du mix énergétique du pays". D'autres intervenant confirmeront alors que la mesure de l'impact dans ce domaine reste très problématique : comment mesurer ce qui relève de données immobilières (passoire énergétique, etc) ? Comment mesurer l'impact d'un breakfast selon qu'il fait appel à des producteurs locaux ou non ?...
La CSRD ne s'embarrasse pas de ces questions. Mais aucun des acteurs présents ne considère que la directive mettrait la charrue avant les bœufs. Ne pas attendre le jour de la mesure parfaite et universelle relève, pour eux, d'un volontarisme bienvenu, d'une direction clairement indiquée, et constitue, comme le résume Stéphane Lormant, "un point de départ". Qui commence donc, pour les plus grandes entreprises basées en Europe, le 1er janvier 2024.