Observatoire des déplacements pros : le voyageur pense « confort » avant « RSE »

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L'IDER : un indice de la maturité

Corporate Mobilities vient de rendre publics les résultats de la 6ème vague de l'Observatoire des déplacements professionnels en France et à l’étranger. Ils confirment la reprise et remettent la RSE à sa place : derrière le confort du voyageur.

Mis en place à l'été 2020 par Corporate Mobilities en partenariat avec Opinionway, l'Observatoire des déplacements professionnels en France et à l’étranger présentait la semaine dernière les résultats de sa sixième vague. Elle a été réalisée en novembre 2022 auprès de 500 voyageurs d’affaires d’entreprises de 250 salariés ou plus, ayant effectué au moins un déplacement de 200 km minimum dans les 12 derniers mois.

L'enseignement "macro" de l'étude, jumelé à une analyse historique des vagues précédentes, confirme la reprise des voyages d'affaires. Cependant, une disparité existe entre déplacements domestiques et internationaux, concernant les limitations de voyage au sein des entreprises.

Reprise et rationalisation 

Après le blackout de 2020, les limitations s'estompent lentement, tant en domestique qu'à l'international (on regrette l'indistinction, dans cette catégorie, entre trajets intra- et extra-européens), jusqu'en juin 2021, soit durant près d'une année. Entre l'été et l'automne 2021, une inflexion très nette s'opère : en novembre 2021, ce ne sont plus qu'un tiers des répondants qui déclarent être limités dans leurs déplacements hexagonaux, et à peine plus de la moitié à l'international (54%).

En juin 2022 et novembre de la même année, les limitations à l'international se stabilisent à un étiage de 42 à 45%. Pour les trajets domestiques, les limitations tombent à 21% en juin 2022 mais remontent à 29% en novembre. On peut penser qu'après une "travel revenge" française, succédant à deux ans de latence, des restrictions sont remises en place pour des raisons non sanitaires (le budget et la RSE, peut-on penser) : les voyages domestiques se rationnalisent. 

Cette rationalisation des déplacements français trouve sa traduction dans une écrasante majorité de collaborateurs ayant effectué de 1 à 5 déplacements dans l'année écoulée (80%) au détriment de déplacements plus nombreux (la proportion des déplacements supérieurs à 10, notamment, estt divisée par deux entre juin et novembre 2022, de 15 à 8%). A l’international, le fait marquant est le poids des "zéro déplacement" qui continuer de diminuer.

Le voyage "nécessaire"

Le graphique ci-dessous est spectaculairement signifiant. Après une période d’expérimentation forcée de la visioconférence, les collaborateurs ont, semble-t-il, touché les limites de la communication à distance, ses lacunes par rapport à une rencontre réelle. En effet, alors que les déplacements étaient jugés "nécessaires" à une courte majorité en septembre 2020 (54%), ce sont plus des deux tiers des répondants (70%) qui les jugent comme tels en novembre 2022.

Et l'efficacité du "présentiel" vs. le "distanciel" est reconnue pour les déplacements de toute nature : du congrès à la prospection commerciale, des rendez-vous clients à la maintenance informatique, en passant par les rendez-vous inter-entreprise.

Les critères "voyage" qui comptent

Sans vouloir remettre en doute l'esprit "corporate" des voyages d'affaires, les critères qu'ils jugent "importants" lorsqu'ils se déplacent pour raisons professionnelles relèvent du "personnel", devant les enjeux financiers (productivité et coût du déplacement) et écologiques. 

Ainsi, le tiercé gagnant est-il très clair : sûreté et sécurité, équilibre pro/perso, et respect des règles sanitaires émargent tous à plus de 85% (respectivement 89, 88 et 87%). Jérôme Fouque et Yann Barbizet, fondateurs de Corporate Mobilities, utilisent volontiers le concept des "3 P" - People, Profit, Planet - et l'équilibre qui s'établit entre ces trois pôles. Ici, le "People" est dans conteste prédominant. Et cela, "depuis la première vague", précisent-ils.

On retrouve cette prédominance du "People" dans l'infographie qui suit. Elle se penche sur "la part des voyageurs qui s'intéressent ou dont l'entreprise a déjà mis en place (un certain nombre de fonctionnalités) dans le processus de réservation des déplacements". On regrette que les désidérata des collaborateurs et ce que l'entreprise a rendu disponible ne soit pas distingués. Car entre les voyageurs, la direction de l'entreprise (ou du travel manager) et ce que sont en capacité de proposer les fournisseurs, la concordance ne va pas de soi.

Le pilier "Planet" est donc, là encore, relégué au second plan par rapport aux informations d'ordre personnel. En allant plus loin dans la granularité, les auteurs de l'étude ne manquent de révéler ce qu'on peut considérer comme une surprise. En effet, si les critères de genre biaisent faiblement les résultats, c'est également le cas de l'âge : une mise à mal de l'appétence RSE des générations les plus jeunes, réputée plus grande que celle des boomers. Le critère le plus marquant est en fait la CSP du voyageur. Par exemple, si les CSP+ sont 82% à vouloir "connaître le temps total de (leur) déplacement", il ne sont que que 57% dans les CSP C.

Concernant les divers aspects de la RSE, 82% des répondants sont désireux de tester le véhicule électrique. Pourtant, comme le note, Jérôme Fouque : "ces véhicules restent sur le parking des loueurs". Il explique cette apparente contradiction par le hiatus entre déclaration d'intention et action concrète. Parions qu'on pourrait y ajouter le déploiement de bornes de rechargement encore insatisfaisant.

Pour le reste, on constate que les voyageurs sont avides d'informations sur l'impact RSE de leurs déplacements. Ces informations délivrées ont-elles un impact sur le comportement (c'est évidemment l'enjeu) ? On peut penser que oui. Reste à savoir dans quelles proportions, tout en ayant en tête que selon les critères "3 P", le "P" de "Planet" est aussi, du moins au regard du confort personnel du voyageur, celui de "Parent Pauvre".

[Le reste de l'étude concerne le domaine du partenaire Carbookr, soit : la location de véhicules. Nous y reviendrons prochainement]