« Pour nous, acheteurs, le NDC, c’est un concept »

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Air France-KLM prolonge l’exemption de surcharge GDS jusqu’au 31 décembre 2023

Quand des travel managers parlent du NDC, ça dézingue...

A l'occasion de sa convention l'AFTM organisait ce jeudi une conférence consacrée au NDC. Des acteurs d’Amadeus, cheville ouvrière - parmi d’autres - du chantier New distribution capability, des représentants de CWT coté TMC et un acheteur de Thales. De transporteurs, et on pense en premier lieu à Air France pour sa position au niveau national et en vertu de son annonce d’opérer la bascule NDC au 1er mai, point.

C’est bien dommage car ç’aurait été l’occasion de répondre à une salle très réactive sur le sujet : des représentants d’entreprises clientes ou des agences de voyages business interrogatives, voire inquiètes dans la perspective de ce changement de distribution de l’aérien qui est aussi un changement de modèle pour la majeure partie des acteurs du BT. C'est peut-être pourquoi, à certains moments, on frisait la thérapie de groupe. L'expression débridée de doutes sérieux sur la valeur ajoutée du NDC était en tout cas manifeste.

C'est Didier Perrigault, Global Category manager chez Thales, qui ouvrit les hostilités : "Pour nous le NDC reste un concept" (tout en confiant son optimisme sur son déploiement technologique à terme mais ne doutant pas que les coups supplémentaires en seront supportés par les entreprises). Encore le concept pourrait il séduire...

Ce n'est pas vraiment le cas pour ce représentant de Capgemini : "La diversité de choix qu'offre le NDC ? C'est parfait pour le voyage loisir. Mais cette diversité devient une contrainte dès lors qu'on veut appliquer une PVE". Notons à ce titre que 20% des transactions de l'aérien sont opérés sur NDC... dans le loisir. "Dans le BT, on est plus autour de 1%" reconnait une représentante de CWT.

Une représentante d'un grand groupe public n'est pas mieux disposée à ce sujet : "Le NDC va à l'encontre des besoins de l'entreprise. Les réservations sont plus longues, plus énergivores. Pour nous, il faut standardiser l'offre. Le NDC fait le contraire !"

Sur cette question de la productivité, une TMC prétend même que celle-ci est sérieusement rognée par le NDC, puisqu'une réservation, estime-t-elle, nécessite un temps de travail supérieur de 67% par rapport à une réservation effectuée via le GDS.

Deux acheteurs de grands groupes sont à l'unisson pour déclarer en substance : "Le NDC crée de la compétition dans les canaux de distribution. En toute logique, on pourrait s'attendre en tirer bénéfice, or, ça va nous coûter plus cher." Et l'un d'entre eux d'ajouter : "Ce système est censé court-circuiter des intermédiaires, donc je m'attends à payer moins et ce n'est pas le cas."

L'opposition au NDC est cependant modérée par certains travel managers, notamment au chapitre de la RSE : "Plus de services ancillaires disponibles c'est potentiellement un voyage de meilleure qualité et donc un bien-être voyageur augmenté". Un point de vue tempéré par une difficulté nouvelle créée par cette offre pléthorique d'options : la frustration générée par des différences de traitements au sein d'une même entreprise ou entre confrères d'entreprises concurrentes.

Même bonne volonté de la part de cette travel manageuse qui revient sur le potentiel RSE, en termes de durabilité, cette fois-ci : "Peut-on intégrer l'empreinte carbone d'un vol dans le NDC ?" Réponse (déceptive) de Bertrand Poey, nouvellement nommé DG France d'Amadeus : "Théoriquement, oui". "Mais nous, on est dans la pratique !", s'écrie un acheteur.

Autant de questions en suspens, de craintes et de doutes exprimés, révélateurs d'un vrai besoin de pédagogie et de réassurance, tant auprès des TMC que des entreprises clientes. Une belle occasion manquée de s'expliquer pour Air france...

Rappelons que la compagnie française a annoncé qu'au 1er mai les private channels auraient vécu. Qu'en conséquence, pour un aller-retour réservé via le GDS se verrait appliqué une surcharge de 26 € (13 € par segment). Est-ce que cette annonce se vérifiera dans les faits ? Emilie Bresson, Director managing customer relationship team, serait prête à parier, semble-t-il, pour un report de cette mesure par la legacy française. Preuve que les choses ne sont pas si simples.

Quoiqu'il en soit, le NDC ne sera de toute façon pas gratuit - les investissements très lourds qu'il nécessite, les quelque 2 € que facture Amadeus à AF - pour reprendre ce cas, par transaction seront fatalement répercutés sur le prix au client. Une raison supplémentaire pour qu'Air France sèche ce grand oral ?