Nature de la pandémie : "l'annulationite aigüe". Foyer de l'infection : certaines compagnies aériennes. Personnes à risques : les agences et leurs clients.
"Annulationite", le barbarisme n'est pas agréable à l'oreille, mais la réalité qu'il décrit l'est encore moins aux agences. L'expression - due à Olivier Kervella, CEO de NG Travel - a le mérite de la clarté : une pandémie d'annulations dont les pics se situent "en avant et en arrière saison" estivale. Et, plus grave, qui ne serait pas la conséquence d'aléas - "un pilote atteint du Covid ou un conflit social, par exemple" - mais qui feraient "partie du business model" de certaines compagnies. "Pas des françaises", précisera Laurent Abitbol un peu plus tard.
Parmi les illustrations édifiantes de cette tendance, pas nouvelle mais plus forte depuis la crise sanitaires, celle délivrée par Alain de Mendonça, président du groupe Karavel et de Fram : "Au début de l'été nous avons dû faire face à 800 annulations pour le jour même ou le lendemain".
Sur ces annulations se faisant au gré du taux de remplissage des appareils, sans égard pour l'engagement que constitue un programme de vols, une conversation avec un représentant de Lufthansa, au sortir du premier confinement, en juin 2020, y fait écho : "Notre programme et moins ambitieux que ceux de certaines de nos concurrentes. Mais nous nous refusons, nous, à charger le programme, pour finalement annuler la moitié des vols annoncés".
Revenons à 2022. Ces cascades d'annulations estivales concernent avant tout des vols "loisir". Mais depuis la rentrée, si l' "annulationite" n'est plus aigüe, elle se maintient comme une maladie chronique touchant toute l'industrie du voyage, y compris le business travel, comme le confirme Nathalie Bonnafous, de Plus Voyages.
Ce manque de considération, serait le fait, selon Alain de Mendonça et en cohérence avec Olivier Kervella ou le dirigeant de Lufthansa, de "certaines compagnies qui veulent vendre en direct, c'est leur modèle, et elles n'ont que faire des tour opérateurs et des agences". Prenant acte de cette façon de faire, Laurence Rannou, de Selectour Alazura Voyages, lâche le morceau : "(désormais) je refuse de vendre Volotea".
Mais puisque les acteurs de la distribution ne seraient considérés, par ces compagnies indélicates, que comme des intermédiaires un peu embarrassants, non seulement les vols sont annulés, mais les agences sont en outre livrées à elle-même dans la gestion de ces circonstances : mécontentement des clients et énorme surcharge de travail.
Laurent Abitbol proposera à ce titre des solutions juridiques très contraignantes pour les compagnies fautives... Très contraignantes mais aussi irréalistes, comme nous l'expliquons dans par ailleurs...
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