TMC : quels sont les enjeux de 2024 ?

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Politique voyage : “Désormais, soit notre cabinet refacture les déplacements, soit… il n’y a plus de déplacements”

La table ronde TMC du Grand live du Voyage d’affaires, qui s’est tenue la semaine dernière, a permis de faire le point sur les défis auxquels vont faire face les agences durant l’année 2024.

Eric Ritter (VoyagExpert), Louis-Xavier Dumoulin (CWT), Johan Smith (Reed & Mackay) et Gregory Baumann (Havas Voyages) tel était le panel de la table ronde TMC du dernier GLVA. Des TMC d’identité, de taille et de périmètre d’action différents, mais une certaine unanimité autour des défis majeurs de 2024 : la fragmentation des contenus et la modification du modèle économique qui en découle, l’IA et la sécurité des voyageurs.

Fragmentation des contenus

Quand on parle de fragmentation de l’offre à une TMC, elle dégaine “son” NDC et ça flingue à tout-va.

Gregory Baumann souligne que les TMC sont prêtes à faire les efforts nécessaires mais aujourd’hui, la NDC constitue un recul en termes de service au client. En termes d’efforts, il précise que l’un des plateaux “affaires” de Havas, celui de Montpellier, est réservé comme plateau témoin de la NDC. En termes de dégradation, il détaille : difficultés à faire voyager des collègues ensemble, dans l’aftersale, dans la modification avant émission, des temps de traitement de 1 à 3… malgré des équipes de plus en plus à l’aise.

Johan Smith abonde : “Quand on se positionne comme Reed & Mackay sur la qualité de service, NDC ne répond pas à nos besoins, tout simplement”. Il considère que même à la fin 2024, il est difficile d'imaginer que la NDC sera performante car, dans la chaîne tech, les TMC arrivent en dernier. 

Eric Ritter tient à rappeler que la fragmentation des contenus, ce n’est pas uniquement l’accès à la NDC. L’enjeu est beaucoup plus vaste : “Tous nos systèmes ont été bâtis sur le PNR et donc sur le GDS : nos outils de contrôle qualité, de facturation, de contrôle tarifaire… Donc il faut tout réécrire.” C’est pourtant l’optimisme qui l’emporte : “Il y a des outils de plus en plus performants : Goelett, Spotnana…” 

Modèle économique

La question se pose quand la distribution, d’élément rémunérateur, devient un coût.

Louis-Xavier Dumoulin confirme : “Avant, on considérait que nos revenus venaient à parts égales des fournisseurs et des clients. Avec la fragmentation des contenus, le revenu fournisseur va disparaître : il va bien falloir aller chercher la compensation du côté des clients”. Cette compensation, elle se trouve à un endroit précis : “Dans nos 10 ou 15% offline, on a peut-être 1 ou 2% de VIP qui est le cœur de la réussite de notre activité. C’est ce service qu’il faut valoriser.

Tous les participants sont à l’unisson quant à cette nécessité de valoriser le service offline. Y compris Eric Ritter mais, décidément, l’humeur du patron de VoyagExpert est à l’optimisme : “La migration tech est lourde, certes, mais la tech n’a jamais été aussi aussi peu chère… Pour le online, on devrait pouvoir travailler avec des coûts de friction de plus en plus réduits. Mais pour le offline, c’est une notion de service, d’expertise qu’il faut rémunérer au juste prix. (...) Il faut être agressif sur la tech en termes de tarifs, mais il faut aussi que les clients acceptent de payer le juste prix du offline. Je trouve que c’est un très beau business model.

Gregory Baumann apporte un élément de débat supplémentaire : la remise en cause du modèle économique des agences n’est pas uniquement due à des facteurs exogènes : “Le problème c’est qu’au revenus fournisseurs qui n’ont fait que baisser, il y a eu aussi une baisse des revenus clients avec des appels d’offres qui tiraient les prix vers le bas et des agences - et nous en sommes responsables - qui avaient du mal à expliquer la valeur du service rendu. Avec, parfois, des tarifs qui déshonoraient notre métier.” 

A ce sujet, Louis-Xavier Dumoulin dira même : “On a passé une décennie de guerre fratricide terrible sur les prix bas, qui s'achève aujourd’hui. La crise a révélé la valeur de notre service. Je crois à la différenciation entre digital et services complémentaires avec grille de frais. C’est à nous d’éduquer le marché pour remonter cette pente.

Comme sources de revenus supplémentaires, outre la valorisation du offline, Johan Smith ajoute - avec l’assentiment des autres - “la diversification des services : du “meeting & event” qui est en forte progression, ou de l’expense…

L’IA

Aucun membre du panel ne balaie d’un revers de main l’impact de l’IA sur son activité. Aucun, non plus, ne considère que cette technologie est à même de transformer en profondeur son métier.

La position la moins catégorique à ce sujet est peut-être celle d’Eric Ritter. Il troque sa casaque d’optimiste pour celle du béotien éclairé. Il avoue ne pas tout comprendre aux possibilités de ce soi-disant game-changer : “Donc on a mandaté un cabinet d’experts qui va auditer tout ce qu'on fait au niveau du client comme en interne, pour qu’ils nous disent si et comment l’IA peut nous faire progresser, et comment l’implémenter. C’est un de nos grands projets 24 qui a un coût certain”. 

De Gregory Baumann (“On compte sur nos éditeurs qui ont des équipes brillantes. Nous, on se concentre sur notre métier qui est de satisfaire nos clients”) à Louis-Xavier Dumoulin (“J'espère que l’IA va nous aider à simplifier les points de friction du BT. Ce sera un passage obligé mais le mix techno tech/humain restera le meilleur pour une TMC”) en passant par Johan Smith (“Pour l’instant, l’IA est là pour gérer des problèmes simples, nos experts restent indispensables. Ce ne sera pas un atout clé et ca ne changera pas notre modèle”), l’enthousiasme n’est pas débordant.

Sécurité

Sur le sujet sécurité, chacun soulignera la différence d’approche entre grands groupes d’un côté, ETI et PME de l’autre. Maturité et process mis en place pour les premiers, souvent angle mort pour les seconds.

A ce propos, Johan Smith ose une statistique : “On ouvre des ateliers pour informer nos clients sur ces sujets. Et c'est utile car on a constaté que deux tiers des PME et ETI ne sont pas conscientes de leurs responsabilités”.

Si Louis-Xavier confirme la maturité des grands comptes “avec un responsable sécurité, des équipes dédiées, des process, une liste d’hôtels pour les destinations à risque, une cellule de crise...” Gregory Baumann confirme le contraire pour les entreprises de moins grande taille : “C’est notre job de les conseiller et d'offrir des solutions internes et externes car pour ces entreprises, la sécurité est un sujet encore moins connu que la RSE”.

Sur ces derniers point, Eric Ritter avoue même un certain “malaise” vis-à-vis de ses clients PME-ETI, dont la lacune est gênante, vu la nature du sujet et les conséquences potentielles. Dès lors, sa TMC va développer cette année un outil pour ce type de clients “qui n’ont pas forcément les moyens de se payer les services d’un International SOS”.TMC, Grand liuve du voyage d'affaires, cds,