Une étude de Transport & Environment révèle une baisse significative des émissions liées aux déplacements professionnels aériens des multinationales. Crédit Agricole et Dassault Systèmes montrent l'exemple en France... LVMH et Valeo, beaucoup moins.
Une étude menée par la campagne Travel Smart, initiative portée par l'ONG Transport & Environment (T&E), révèle une baisse significative des émissions carbone liées aux déplacements professionnels des grandes entreprises mondiales. Cette analyse, qui évalue 326 multinationales américaines, européennes et indiennes selon 11 indicateurs relatifs à leurs émissions et leurs objectifs de réduction et de transparence, offre un panorama détaillé de l'évolution des pratiques en matière de voyages d'affaires depuis la pandémie.
[Attention : cette étude ne prend en compte que les émissions liées au transport aérien. C’est bien entendu l'une de ses limites.]
Crédit Agricole et Dassault Systèmes champions français de la réduction
En 2023, les émissions liées aux voyages d'affaires de 239 multinationales étaient inférieures de 34% à celles de 2019, selon la dernière analyse de la campagne Travel Smart. Si le recours à l'avion pour les déplacements professionnels reste en retrait par rapport au niveau pré-covid, cette tendance pourrait néanmoins être fragilisée. En effet, près de la moitié des 326 entreprises évaluées (44%) n'ont pas fixé d'objectifs dédiés de réduction des émissions liées à leurs voyages d'affaires.
Parmi les 36 entreprises françaises figurant dans le classement, plusieurs noms ressortent, et notamment celui du Crédit Agricole. La banque a un objectif de réduction de son empreinte carbone liée aux voyages de -30% entre 2019 et 2025. Elle affiche déjà une baisse de 44% (entre 2019 et 2023), grâce à une politique voyage privilégiant l'usage du train. De son côté, Publicis affiche une baisse de 23% (entre 2019 et 2023) et possède un objectif de -50% d'ici 2030. A souligner aussi, les bonnes performances de CapGemini (baisse constatée de 45%) et de Dassault Systèmes (-60%).
LVMH et Valeo, mauvais élèves de la classe française
A l'inverse, plusieurs entreprises affichent de mauvaises performances climatiques sur ce sujet, à l'instar du groupe LVMH, dont les émissions liées aux déplacements professionnels ont augmenté de 63% entre 2019 et 2023, ou encore de l'équipementier automobile Valeo (+71%).
Jérôme du Boucher, responsable Aviation chez T&E France, explique : « De nombreuses entreprises parviennent à concilier compétitivité et réduction des voyages en avion. Néanmoins, certaines entreprises mettent en péril l'ensemble des progrès réalisés. Il est temps que les grands pollueurs qui n'ont pas d'objectif précis de baisse de leurs émissions suivent l'exemple des autres. Réduire les émissions des voyages d'affaires est l'une des solutions les plus rapides et les plus simples pour que les grandes entreprises atteignent une partie de leurs objectifs en matière de développement durable ».
[A noter que Bouygues, autre mauvais élève, a été classé dans la catégorie “entreprises mondiales” de l’étude. Voir ci-dessous.]
Google, Apple et Bouygues sans objectif de réduction clair
Au niveau mondial, l'absence d'objectifs est particulièrement inquiétante pour les entreprises mondiales qui volent le plus. Le classement Travel Smart en a identifié 25. Google, Apple et Bouygues figurent sur cette liste. Ces 25 entreprises, dont certaines prétendent être des leaders écologiques, n'ont pas pris de mesures crédibles pour fixer des objectifs depuis des années, bien que leurs vols émettent annuellement un total de 6,9 millions de tonnes de CO2. Ce qui équivaut à l'empreinte climatique de 48.000 allers simples entre Paris et New York. En outre, au moins 19 de ces entreprises - ou leurs PDG - possèdent ou affrètent des jets privés. Parmi elles se trouvent Johnson & Johnson, Meta et Bouygues.
Des cibles spécifiques, clé de réductions importantes
L'analyse montre que les entreprises qui mettent en place des objectifs spécifiques de réduction des voyages en avion réalisent, en moyenne, des baisses d'émissions sur leurs voyages d'affaires de 48% en 2023, contre seulement 41% pour les entreprises qui ont un objectif portant sur l'ensemble des voyages. Les entreprises ayant un objectif encore plus large (incluant les voyages d'affaires ainsi que d'autres sources d'émissions) enregistrent des réductions de 35%. Enfin, les entreprises qui ne se sont pas fixé d'objectif en matière de déplacements professionnels n'ont réduit leurs émissions liées à ce secteur que de 28%.