Malgré l'explosion des outils d'analyse, 82% des acheteurs de voyages jugent leurs données cruciales mais peinent à les exploiter. Une enquête mondiale due à BCD révèle un secteur en pleine mutation technologique et des défis opérationnels persistants.
L'importance des données dans la gestion des voyages d'affaires n'est plus à démontrer. C'est ce que confirme une nouvelle étude menée par BCD Travel Research & Intelligence auprès de 197 acheteurs de voyages d'affaires dans le monde en avril 2025*. Mais derrière cette reconnaissance unanime se cachent des défis majeurs qui freinent encore l'optimisation des programmes de voyage.
La donnée détrône le duty of care dans les priorités
Plus de huit acheteurs sur dix (82%) considèrent désormais l'analyse de données et la business intelligence comme "extrêmement importantes" ou "très importantes" pour leurs programmes de voyage. Cette composante se hisse au cinquième rang des priorités, talonnant les préoccupations traditionnelles que sont le contrôle des coûts (58% d'importance extrême), la conformité aux politiques (52%) et la duty of care (49%).
Cette montée en puissance marque un tournant dans la profession. "Le duty of care a perdu sa position de tête au profit du contrôle des coûts et de la conformité aux politiques", note l'étude, révélant une évolution des préoccupations vers des enjeux plus opérationnels et financiers.
Les entreprises collectent leurs données auprès de sources variées. Les TMC restent la source principale pour 89% des répondants, suivies des solutions de cartes et paiement (69%) et des systèmes de gestion des notes de frais (66%). Les outils de réservation en ligne (58%) et les enquêtes voyageurs (31%) complètent ce panorama.
Le paradoxe de la fragmentation : trop de sources, pas assez d'insights
Paradoxalement, cette diversité constitue le principal obstacle. La fragmentation des données à travers de multiples sources représente le défi numéro un pour 57% des acheteurs, devant la nécessité de rendre les données proactives plutôt que réactives (50%).
Si la collecte et l'analyse de données sont jugées efficaces par respectivement 85% et 84% des répondants, l'exploitation de ces informations révèle des lacunes importantes. Seuls 76% estiment efficace la communication autour des données, et seulement 75% parviennent à agir concrètement sur les insights obtenus.
Cette situation illustre un paradoxe moderne : les entreprises accumulent des volumes croissants de données qu'elles peinent ensuite à transformer en actions opérationnelles. Un tiers seulement des acheteurs (35%) se déclarent "très confiants" ou "extrêmement confiants" dans la qualité de leurs données de voyage. La majorité (48%) n'affiche qu'une confiance "modérée", révélant un enjeu majeur de fiabilité des informations.
L'intelligence artificielle boude encore les voyages d'affaires
Malgré l'engouement général pour l'IA, son adoption dans le domaine des voyages d'affaires reste marginale. Trois quarts des répondants (75%) n'utilisent aucun outil d'intelligence artificielle pour collecter, analyser ou reporter leurs données de voyage.
Parmi les 9% qui exploitent l'IA, les bénéfices les plus appréciés sont le gain de temps (52%), l'amélioration de la qualité des données (36%) et la collecte et consolidation automatisées (34%). Cette adoption timide suggère un potentiel encore largement inexploité.
Côté outils, les habitudes ont la vie dure. Excel et les tableurs restent utilisés par 81% des acheteurs, à égalité quasi parfaite avec les tableaux de bord des TMC (84%). Les logiciels de business intelligence comme Power BI ou Tableau ne séduisent que 45% des répondants, révélant une maturité technologique encore limitée.
L'Europe et l'Amérique du Nord creusent l'écart
L'étude révèle des différences significatives selon les régions. Un tiers des acheteurs observent ces disparités, l'Amérique du Nord et l'Europe étant identifiées comme leaders dans l'exploitation des données de voyage. À l'inverse, l'Asie, l'Amérique latine et l'Afrique accusent un retard, tandis que l'Australie se positionne dans la moyenne.
Malgré l'importance accordée aux données, certains indicateurs de performance restent insuffisamment suivis. La satisfaction des voyageurs arrive en tête des KPI négligés (56%), suivie du taux de succès des voyages (50%) et de la friction voyageur (49%).
Cette situation contraste avec l'utilisation principale des données, orientée vers les négociations fournisseurs (65%), l'amélioration de la conformité aux politiques (59%) et l'optimisation des dépenses (57%).
Face à ces défis, les acheteurs plébiscitent un renforcement de la collaboration avec leurs agences de voyage. Leurs attentes portent principalement sur des tableaux de bord personnalisés (68%), des analyses comparatives (59%) et des revues régulières des insights (55%).
(*) L'étude a été menée auprès d'un échantillon représentatif de 197 acheteurs de voyages d'affaires répartis géographiquement : 41% en Europe, 36% en Amérique du Nord, 14% en Amérique latine et 9% en Asie-Pacifique.