Oublier la peur

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Jean-Louis Baroux est un acteur reconnu du monde des compagnies aériennes, créateur du World Air Transport Forum et de l’APG World Connect. Cette semaine, il analyse la communication sur la Covid-19 et son impact sur le voyage d’affaires.

La communication incessante des gouvernements et des médias à propos de la Covid-19 est très anxiogène. Et elle est partiale, il n’y a pas d’autre mot. On annonce uniquement le nombre de tests positifs sans indiquer le nombre de tests réalisés. En cherchant bien, les données existent. En France, depuis le début de l’épidémie 7.699.441 tests ont été réalisés, 223.164 ont été positifs soit 2,9% des tests. Or sur les cas positifs détectés, le taux de décès est de 8,27% ce qui ramène le taux de décès sur l’ensemble de la population testée à 0,24%. Certes un mort de plus est un mort de trop, mais enfin les résultats ne doivent pas être très éloignés d’une épidémie de grippe. Pourquoi alors cette communication de guerre ?

Et cette peur a été instillée dans la population. Elle agit sur les comportements. Les restaurants sont désertés, les hôtels vides et les transports sous utilisés. Et je ne parle pas du transport aérien qui est, lui, sinistré. Il cumule en fait tous les marqueurs de la peur. La proximité des passagers une fois à bord des avions, les procédures contraignantes dans les aéroports, la nécessité d’obtenir des tests négatifs alors que les laboratoires sont engorgés et que nombre de passagers ne peuvent embarquer faute de pouvoir présenter le sésame. Et puis il y a l’attitude des chefs d’entreprise qui sont sous la menace permanente d’une action judiciaire s’il est prouvé qu’ils n’ont pas pris toutes les dispositions rendues obligatoires par les autorités de santé. Un ami hôtelier italien me signale qu’entre le moment où il a réouvert son établissement le 15 mai et le 31 juillet, il a dû appliquer 23 protocoles différents !

Alors le trafic affaires qui était censé repartir rapidement à partir de la rentrée de septembre, reste près du point mort. Quel chef d’entreprise prendra le risque d’envoyer un de ses salariés prendre un vol avec la possibilité, certes infime, qu’il en revienne contaminé voire être simplement déclaré positif et mis en quarantaine, avec pour conséquence une mise devant les tribunaux pour je ne sais quelle atteinte à la santé de ses employés en appliquant le sacro-saint principe de précaution ?

Il est grand temps de vaincre cette peur dont on se demande bien à qui elle profite. Certes les écologistes peuvent s’en servir pour appuyer leur exigence de l’arrêt de la croissance du transport aérien, source de tous les maux de la planète si on les écoute bien. La Convention Citoyenne a d’ailleurs rendu ses premières recommandations, lesquelles consistent à taxer un peu plus de transport aérien et à l’interdire carrément sur certaines destinations. Espérons simplement que notre Gouvernement saura trancher dans ces analyses malthusiennes. Gilles Roy dans sa chronique parue ce jour dans AeroBuz .fr, fait une remarque judicieuse. Lorsque le vaccin sera disponible, il faudra de toute urgence traiter l’ensemble de la planète soit plus de 7 milliards d’habitants. Pour ce faire il conviendra d’acheminer les vaccins dans des conditions de transport réfrigéré très particulières et ce dans un temps très court. Comment faire sans le transport aérien ? Et comment cela pourrait même être envisagé si ce mode de transport n’avait pas été développé jusqu’à atteindre la quasi excellence enregistrée ces dernières années.

Il faut sauver le « soldat aéronautique » pour paraphraser le titre d’un film célèbre. Il ne pourra pas résister longtemps au régime auquel il est soumis. Le retour à la libre circulation des personnes et des biens est urgent. L’Assemblée des Nations Unies a, la semaine dernière, signée et publiée une longue adresse dans ce sens en demandant que les Etats se mettent enfin d’accord sur un protocole unique permettant ainsi de faciliter la reprise des échanges internationaux. L’aérien est le principal vecteur de création de richesses. Il est aussi indispensable aux échanges humains, les seuls à pouvoir préserver la paix et la liberté.

Il faut combattre la communication de guerre à laquelle nous sommes soumis. Mais cela ne se fera pas tout seul. Il ne suffit pas de demander aux Etats de se mettre d’accord, il faut pouvoir faire pression sur les Gouvernements et pour cela rien de mieux qu’une communication puissante, internationale et coordonnée. Cela coûtera de l’argent, mais c’est le prix à payer pour remettre en route la machine. IATA pourrait être à la manœuvre, cet organisme commence d’ailleurs à se bouger sérieusement. Les réseaux sociaux sont capables de diffuser rapidement une information positive sur le transport aérien.

Si nous n’agissons pas, les compagnies aériennes vont massivement licencier leur personnel avant de disparaître entrainant immédiatement la construction aéronautique et les organismes du contrôle aérien. Est-ce que nous voulons cela ?