Tribune JL Baroux – Le transport aérien a 80 ans !

0
278
Tribune Jean-Louis Baroux
(Ph. AdobeStock)

Jean-Louis Baroux est un acteur reconnu du monde des compagnies aériennes. Créateur du World Air Transport Forum et de l’APG, il célèbre, dans cette tribune, le 80ème anniversaire de l'OACI, l'organisme qui a rendu possible l'émergence du transport aérien moderne.

Le transport aérien a 80 ans ? C’est faux, me direz-vous et vous aurez raison. Le premier vol commercial a eu lieu en Floride en… 1914 et, avant la deuxième guerre mondiale, de grandes compagnies telles que Pan Am, Air France, Imperial Airways et d’autres sillonnaient déjà le ciel et avaient tracé d’importants réseaux internationaux. Pan Am, par exemple, traversait le Pacifique avec des hydravions géants et les opérateurs européens allaient jusqu’en Australie et dans nombre de pays asiatiques et africains. Alors pourquoi dater le transport aérien de 1944 ?

Le 7 décembre 1944 à Chicago, les représentants de 52 pays ont signé la vraie renaissance du transport aérien en posant les règles qui allaient faire sa prospérité. Il fallait pour cela créer une entité responsable de l’édification de la réglementation et de son application. A vrai dire, l’OACI (Organisation de l’Aviation Civile Internationale) n’a pris son titre actuel que le 4 avril 1947 après la ratification de la majorité des pays fondateurs, soit 26, puisque les décisions se prennent à la majorité simple.

Les mêmes règles pour tous

Je suis encore surpris de la vision des fondateurs. Rappelons-nous qu’en décembre 1944, le monde était vraiment à feu et à sang. La guerre avait atteint une sauvagerie jamais connue par le passé et, petit à petit, l’alliance contre les pays totalitaires, l’Allemagne, le Japon et leurs affiliés, était en train de prendre le dessus. A ce moment-là, il n’y avait plus de doute quant aux vainqueurs. Or, les membres de cette assemblée constitutive ont posé comme principe du transport aérien futur qu’il serait géré avec les mêmes règles dans chaque pays signataire et qu’elles s’appliqueraient même aux pays vaincus. Ce n’était pas évident et c’est la grandeur des participants à la création de l’OACI d’avoir compris tout l’intérêt du transport aérien pour le redressement de la planète et sa future prospérité.

A ce jour, 193 pays sont membres de l’OACI, soit le même nombre que les membres de l’ONU. Ils sont représentés au sein de cet organisme par un ambassadeur. C’est-à-dire que le transport aérien dispose d’une gouvernance planétaire qui fonctionne plutôt bien, en dépit du faible nombre de fonctionnaires permanents, aux alentours de 1000. Nombre d’autres organisations internationales feraient d’ailleurs bien de prendre un système de gouvernance semblable.

Une organisation efficace

Cela marche bien car l’OACI a mandaté chacun des Etats membres pour l’application des règles édictées par l’organisation. Mais les Directions des Aviations Civiles de chaque Etat sont elles-mêmes auditées par des délégués du siège et si l’inspection montre des dysfonctionnements importants, le pays en question est tout simplement rayé de l’OACI jusqu’au moment où son inspection montre qu’il est revenu à de bonnes pratiques. Cela signifie que les pays « blacklistés » ne peuvent plus délivrer des certificats de navigation à leurs compagnies aériennes et que ces dernières ne peuvent plus opérer de vols internationaux. C’est sans doute la meilleure façon d’éviter les effets de la corruption qui aurait pour effet d’amoindrir la sécurité des compagnies aériennes de ces Etats. Plusieurs pays se sont trouvés dans une telle position par le passé - on peut citer le Nigéria ou les Philippines. Cela a obligé les gouvernements concernés à revoir toute l’organisation de leur propre aviation civile. Ils l’ont fait et ont de nouveau rejoint le transport aérien mondial.

Gardons à l’esprit que ce système unique en son genre a permis un fantastique développement des échanges mondiaux tout en obligeant le transport aérien à devenir plus sûr et plus écologique. Dès 1983, l’OACI a créé un Comité de la Protection de l’Environnement. Sous l’effet des normes édictées, le bruit des appareils a diminué de 75% depuis 1970 et la consommation de carburant de 80%. Certes, il parait difficile voire impossible d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2025, ce qui est l’objectif du transport aérien mondial, mais la pression constante mise sur tous les acteurs aura certainement un effet très bénéfique sur l’impact écologique de ce secteur d’activité.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici