Le marché de l’UAM – pour Urban air mobility – est promis à un grand avenir. Ce futur mode de transport par la voie des airs – collectif dans un premier temps – est aujourd’hui en phase d’expérimentation. Tout un écosystème est aujourd’hui mobilisé pour permettre son développement rapide à l’horizon 2030.
L’événement a marqué les esprits : un aéronef de Volocopter a effectué un vol de démonstration pendant trois minutes, ce lundi au Bourget, lors du dernier Paris Air Forum. L’UAM est, il est vrai, au coeur de plusieurs actualités en ce moment. Une expérimentation est sur le point de démarrer cet été à Pontoise, sur l’un des aéroports dont le groupe ADP a souhaité faire le lieu d’expérimentation des e-VTOL (acronyme anglais de Vertical Take-off and Landing). Avec en ligne de mire le VertiPort de demain, la plateforme qui accueillera ces aéronefs électriques à décollage et atterrissage verticaux.
« Et nous allons étudier aussi l’acceptabilité des riverains« , a précisé Marc Houalla, directeur de l’aéroport de Paris-CDG, au cours d’une des tables rondes du Paris Air Forum baptisée Peut-on faire décoller l’urban air mobility ?
« Nos spécialistes des questions de bruits et de vibrations sont présents à Pontoise. Cet aéroport est notre première étape avant les JO« , a poursuivi Marie-Claude Dupuis, directrice de la Stratégie et Développement du Groupe RATP. Des aéronefs seront en effet déployés pour la première fois en France, à l’occasion des Jeux Olympiques de Paris de 2024, toujours dans une logique de démonstration mais en se rapprochant des conditions réelles d’exploitation d’une ligne commerciale.
Le vrai déploiement de la mobilité aérienne urbaine est plutôt prévu à l’horizon 2030. Aujourd’hui, les obstacles sont encore nombreux mais une telle offre répond à un besoin. Pour Florian Reuter, CEO de Volocopter, l’UAM concerne aussi bien des habitants dans le déplacement du quotidien que des visiteurs d’affaires et touristes. « Cette offre a un sens surtout dans les grandes métropoles« , a ajouté le patron de l’entreprise allemande, engagée sur le projet parisien dans le cadre d’un « parfait exemple de collaboration avec les compagnies aériennes, les aéroports, les administrations, les transports publics…« . Sur Paris en effet, Marc Houalla a rappelé qu’ADP avait procédé à un appel à manifestation d’intérêt sur le projet d’UAM, avec la RATP et la Région Ile-de-France, en coordination avec la DGAC, l’EASA (agence européenne de la sécurité aérienne) et Eurocontrol. Avec l’objectif d’être fin prêt pour les JO de 2024.
L’UAM sera intégrée dans les offres de MaaS
L’aéronef présente en effet de nombreux atouts. Il a comme objectif de décongestionner certains axes routiers. Sa propulsion électrique lui permet de proposer une mobilité urbaine décarbonée, et ainsi de remplacer avantageusement l’hélicoptère, car il pollue moins et fait beaucoup moins de bruit, avec des rotors en lieu et place des hélices.
Marie-Claude Dupuis présente l’engagement de la régie comme la volonté de proposer une offre complémentaire aux modes de transport de masse traditionnels. Le groupe de transport rappelle en effet qu’il s’intéresse à toutes les nouvelles mobilités, surtout lorsqu’elles s’inscrivent dans sa démarche MaaS. Et d’ajouter que son ambitieux projet de mobilité autonome terrestre doit pouvoir lui servir sur la mobilité urbaine aérienne.
Sa directrice de la Stratégie et Développement entend toutefois relativiser les objectifs de décongestion des voies d’accès de Paris. « A l’horizon 2030, l’UAM ne représentera que quelques milliers de passagers sur ses lignes chaque jour. Et je parle de ‘lignes’ car nous voyons l’eVTOL comme un mode de transport partagé« , a-t-elle insisté. Et ces premières lignes aériennes, pour Marc Houalla, pourraient relier CDG et Orly à certains lieux situés aux alentours de Paris, tels La Défense et Issy-les-Moulineaux. « Mais nous étudions aussi la possibilité de créer un VertiPort dans Paris même« , a ajouté Marie-Claude Dupuis.
Ces lignes devront être accessibles financièrement. On parle de 70€ le trajet entre La Défense et Paris CDG. « Le public doit percevoir ce mode de transport comme un progrès collectif, et surtout pas comme une offre réservée à quelques happy fews, a rappelé Florian Reuter. Mais le pré-requis pour le développement de l’UAM doit bien sûr être la sécurité. Et Volocopter doit s’inscrire complètement dans les réglementations mises en place. Damien Cazé, directeur général de l’Aviation Civile (DGAC), a mentionné quelques unes des nombreuses questions en suspend, tels l’altitude et les axes de survol autorisés, les certifications des aéronefs et des pilotes…
Et les enjeux techniques et réglementaires seront bien plus importants encore pour les « taxis volants », quoique dans une moindre mesure s’ils se limitent à faire du point à point, permettant juste d’aller d’un lieu A à un lieu B, sur un itinéraire fixé au préalable.
Des taxis volants sans pilotes plutôt à l’horizon 2040
Quid enfin de la présence ou non d’un pilote à bord ? « Notre aéronef pourrait déjà ne pas requérir de pilote, a précisé le patron de Volocopter. « Des premières expériences n’ont pas posé de problème sur le plan de la sécurité. L’acceptation par le public est bien sûr essentielle. Et c’est pour cela que nous allons commencer avec un pilote. Mais il est clair que la généralisation des UTM (pour aéronefs sans pilote, ndr) n’est qu’une question de temps« . Gagner un siège dans un e-VTOL et réduire plus globalement les coûts seront en effet des arguments décisifs.
Pour Yannick Assouad, directrice générale adjointe Avionique de Thales, « cette solution ne prendra de l’ampleur que si elle est extrêmement sécurisé. Et cela doit s’appuyer sur nos deux compétences, soit l’intelligence de l’aéronef d’un côté, la gestion du trafic aérien et du segment sol d’autre part« . Nul doute, pour elle, que des taxis volants sans pilotes verront le jour, mais plutôt à l’horizon 2040 : « Nous avons besoin de digitaliser l’espace aérien. Et c’est très compliqué…« .