Paris veut davantage s’adresser aux voyageurs professionnels

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Paris veut davantage s'adresser aux voyageurs professionnels

Corinne Menegaux, DG de l'Office du Tourisme et des Congrès de Paris (OdT) entend refondre la stratégie de la structure dont elle a la charge. La clientèle pro, notamment MICE, devrait bénéficier de nouvelles attentions...

Corinne Menegaux, DG de l'Office du Tourisme et des Congrès de Paris, croit en la force naturelle de sa ville - son patrimoine, son rayonnement, sa culture, sa gastronomie, son histoire... Est-il besoin de s'étendre sur de tels sujets ? Le parti pris est clair : "Le sujet n''est pas la promotion de notre destination, tout le monde en connaît les atouts, ce sont l'accueil et l'expérience client qu'on est en mesure d'offrir".

Le discours s'applique aussi bien à la clientèle loisirs qu'au public MICE... Tout comme il ne serait nul besoin d'indiquer que la ville est riche en musées et en monuments, les infrastructures événementielles ou les hôtels gros porteurs s'imposeraient comme une évidence.

De fait, les chiffres semblent parler d'eux-mêmes : année après année, Paris est sur le podium des destinations "congrès" mondiales, la plupart du temps sur la première marche - à l'exclusion des peu représentatives années Covid. A peine Barcelone, Berlin ou Vienne osent-elles lui disputer son leadership. Mais la plupart de ces destinations sponsorisent les événements accueillis ou leur met des espaces à disposition. A Paris, pas besoin. Et à vrai dire, pas trop moyen non plus : contrairement aux capitales citées plus haut, la municipalité n'est pas gestionnaire des plus grands espaces événementiels, même quand elle en est propriétaire, ainsi, par exemple, le Paris Expo Porte de Versailles.

Valeurs

Il faut cependant parler "attractivité", nuance Corinne Menegaux, mais celle-ci relève "de l'éthique, des valeurs. Ce sont les éléments clés de l'avenir, je pense. Particulièrement dans le MICE où la destination choisie doit être en adéquation avec l'identité et/ou le message de l'entreprise." Et réciproquement : dans un monde idéal, Paris ne devrait accueillir que des événements dont les valeurs ne sont pas en contradiction avec celles que la ville-lumière entend véhiculer. En la matière, la Coupe du monde de football qatarie constitue un parfait contre-exemple.

Et ces valeurs, l'OdT se bat pour qu'elles soient transmises par des vecteurs un peu dépoussiérés. A ce groupe MICE qui réclamait, pour sa cérémonie d'ouverture, les danseuses du Moulin Rouge et un béret pour chaque participant (!), l'OdT a proposé une alternative bien moins cliché et davantage dans l'air du temps. Et a convaincu : ce fut finalement la projection du documentaire Seize levers de soleil, avec un Thomas Pesquet jouant du saxo à l'écran, accompagné live par une formation de jeunes musiciens dans la salle.

Charte

Le MICE, c'est ni plus ni moins que la moitié des revenus liés au tourisme dans la capitale. On comprend donc qu'il occupe les équipes de l'OdT. Leur action actuelle consiste notamment en la refonte de la "charte MICE" de la ville. L'idée est de lui adjoindre des chapitres "grands événements". Et surtout à y élargir le spectre des fournisseurs et opérateurs auxquels elle s'adresse.

En plus de l'hébergement et des infrastructures événementielles, c'est avant tout aux transporteurs que Corinne Menegaux veut la consacrer. Elle entend en effet réunir les interlocuteurs idoines pour poser le sujet sur la table. Pour que les participants à un événement puissent bénéficier de parcours accélérés dans les aéroports parisiens (à l'entrée comme à la sortie); pour qu'ils puissent, au départ, enregistrer leur bagage sur le lieu du congrès (du salon, de la convention...); qu'ils bénéficient d'une flotte de vélos, de véhicules partagés, de stations de taxis bornées... Les idées ne manquent pas, reste à convaincre des acteurs parfois trop focalisés sur leur pré-carré, peu enclin à travailler avec d'autres, car manquant d'une vision globale propre à les convaincre que la coopération peut bénéficier à tous.

Outre des transports à l'accès facilité, selon Corinne Menegaux, l'autre grand sujet pour s'assurer du maintien de Paris à son niveau de destination-phare du MICE, relève de la politique commerciale des acteurs de la filière, notamment les lieux d'événements : "Les hôteliers ont presque tous abandonné les tarifs sans flexibilité. Ils ont compris, notamment à la faveur de la crise, que ce n'était plus du tout adapté. Il faut que les gestionnaires de lieux événementiels revoient eux aussi leurs conditions de réservation, de flexibilité, d'annulation, de report". Essentiel en période d'incertitudes.

Les individuels aussi

Ces deux sujets seront, d'une façon ou d'une autre, intégrés dans la charte à venir. Qui sera elle-même intégrée à un Manifeste de l'Hospitalité englobant l'entièreté de la filière du tourisme à Paris. En attendant, à l'OdT, on aimerait beaucoup, aussi, que des startups - plutôt que de proposer une cinquantième appli de visites guidées de la capitale - se penchent sur les "petits irritants" qui contraient le parcours du voyageur pro : "Où puis-je faire une visio dans de bonnes conditions quand je participe à un salon ? Que fais-je de ma valise ? Quel spectacle puis-je voir durant mon séjour pro ?..."

Ces éléments de friction qui contrarient la fluidité des séjours professionnels parisiens concernent aussi les voyageurs d'affaires individuels. Corinne Menegaux entend aussi réaxer la politique de l'OdT - "Personne ne s'adresse à cette clientèle pourtant rémunératrice, prescriptrice de voyages loisir mais aussi de MICE". Dont acte.