Uber Green for Business : « Multiplier notre chiffre corpo par 5 en 3 ans »

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Uber Green for Business :

A l'occasion du lancement de Uber Green for Business, Franck Monsauret, DG France, fait le point sur les ambitions de son entreprise en direction du corpo et au-delà.

Vous venez d’annoncer le lancement d’Uber Green for Business. C’est une évidence pour vous : l’empreinte carbone est l’enjeu central des entreprises quand on parle de mobilité ?

Franck Monsauret : C’est un constat étayé par une étude qu’on a mené avec Harris Interactive auprès de 250 entreprises en février 2022. La moitié des entreprises ont la volonté de s’engager dans une stratégie de réduction de l’empreinte carbone de leurs déplacements - et 36% s’y sont déjà mises. Or, dans ce domaine, la mobilité terrestre est un enjeu central : près de 50% des entreprises mettent des voitures de fonction à disposition de leurs salariés et ces flottes sont en moyenne composées de 11% de véhicules hybrides ou électriques seulement. L’utilisation de notre offre green peut aider ces entreprises à atteindre leurs objectifs de décarbonation en substitution ou en complément du “verdissement” de leur parc qui entraîne un surcoût très important (de 20 à 30%).

Comment les inciter à rouler vert ?

Outre le respect de leurs engagements RSE, l’argument économique est essentiel. C’est pourquoi nous avons augmenté le prix des courses de nos véhicules thermiques de 3 centimes du kilomètre. L’offre green est donc la moins chère ! Et ça marche : depuis un an, nous avons multiplié par dix les courses “green”.

Pour que cette augmentation continue, encore faut-il que des véhicules green soient disponibles…

Bien sûr et c’est là la cohérence de notre initiative. Depuis un an, ces 3 centimes par kilomètre constituent une cagnotte pour le chauffeur d’un véhicule thermique. Parallèlement, on a créé un fonds qui s’élève à 75 M€ en France (et 800 millions au niveau mondial). Lorsque le chauffeur “thermique” a accumulé une certaine somme et qu’il décide de la consacrer à l’achat d’un véhicule vert, ce fonds sert à lui verser la même somme : à la doubler. Nous participons ainsi à compenser la différence de prix d’achat d’un véhicule vert par rapport à un véhicule classique.

Aujourd’hui, 13.000 de nos véhicules (40% de notre flotte) sont soit hybrides, soit électriques. Notre objectif : que notre flotte soit sans diesel en 2024 et que 50% des véhicules présents sur notre plateforme française soient électriques en 2025.

Comment pouvez-vous prendre un tel engagement alors que vous n’avez pas la main sur le déploiement des bornes ?

Il y a effectivement un enjeu d'infrastructure important… sur lequel nous avons un rôle d’influence. Et pas des moindres : un chauffeur Uber francilien effectue 250 km par jour : c’est un des plus gros rouleurs, alors notre voix porte. Quand on dit : “Il faut moins de nouvelles bornes à Paris qu’en deuxième ou troisième couronne car c’est là que vivent nos chauffeurs”, on nous écoute.

De plus, nous développons des partenariats. Avec EDF, pour faciliter l’accès à une borne au domicile des chauffeurs, par exemple. Ou encore avec Total Energies à qui nous transmettons anonymement des datas sur les points de départ et d'arrivée d’une journée de travail de nos chauffeurs. 

Enfin, nous avons mis en place des dispositifs grâce auxquels, par exemple, un chauffeur peut nous dire “Je dois aller recharger à cette borne” et à qui on fait remonter les demandes de courses qui vont dans cette direction.

Bref, vous avez l’air sceptique, donc rendez-vous en 2025 pour voir où nous en serons de notre objectif.

Ces objectifs “green” concernent la flotte Uber en général. Revenons à Uber Green for Business, quelle est la spécificité de l’offre BtoB ?

Ça tient essentiellement en trois points. D’abord cette flotte plus écologique et plus économique. Ensuite la prise en compte de l’absolue nécessité de fiabilité pour un voyageur professionnel avec l’extension d’Uber Réserve (qui offre la possibilité de commander une course à l’avance et d’avoir 10 minutes de battement pour monter dans la voiture) aux véhicules green. Troisième point : la mise en place d’un rapport d’émission de CO2 mensuel. Enfin, la possibilité d’intégrer les différents éléments de PVE dans les comptes professionnels des utilisateurs finaux. Je pourrais ajouter d’autres services tels que Uber Central qui permet de déployer un grand nombre de véhicules dans le cas d'événements pro par exemple. Uber Green for Business est pour l’instant disponible dans 14 villes françaises et 100 villes réparties en Europe et en Amérique du Nord.

Et il y a bien sûr une remontée des dépenses Uber vers la comptabilité de l’entreprise. De quelle manière concrètement ?

Pour éviter le fastidieux système de remontée de factures par le voyageur, il y a deux possibilités. Soit l’entreprise - souvent des PME - ne veut pas que le collaborateur avance les frais et elle reçoit un relevé mensuel de toutes les courses. Soit l'utilisateur est équipé d’une carte corporate avec laquelle il paye sa course; pour ce cas de figure, nous avons établi des ponts avec des outils d’expense comme Concur, Expensya, Rydoo, etc.. Notons que le collaborateur peut switcher de son Uber personnel à son Uber professionnel très facilement.

Vous parlez de “ponts” entre votre appli et les outils expense. Pourquoi pas une totale intégration ?

Nous ne sommes pas allés dans cette direction car notre stratégie c'est de faire utiliser notre appli avec sa promesse d'instantanéité, de conserver son aspect “magique”. D’ailleurs, contrairement à un avion par exemple, la décision d'utiliser un VTC peut se faire au dernier moment, ne pas être planifié dans la “fabrication” de son voyage en amont. De ce fait, avoir recours à l’appli Uber en direct est plus adapté.

Outre sa dimension “magique”, Uber c’est aussi l’ubérisation, bien moins valorisante. Comment communiquez-vous sur ce sujet ?

On aime recentrer ce sujet sur les principaux intéressés : l’an dernier, une grande consultation a eu lieu auprès de nos chauffeurs : 89% d’entre eux souhaitent rester indépendants. De plus, beaucoup de choses ont été faites pour améliorer leur statut : depuis 4 ans on a mis en place une assurance avec Axa en cas d'incapacité de travail qui permet le versement d’indemnités financées à 100% par Uber. Il faut bien avoir en tête qu’en tant que market place, les chauffeurs sont nos clients au même titre que les passagers. C’est notre intérêt qu'ils soient satisfaits. En fait, pour réconcilier protection et indépendance, le levier, c’est le dialogue social; et dans ce domaine, la France s’illustre : au mois de mai prochain, se tiendront les premières élections de représentants des chauffeurs.

Pour une entreprise dont les collaborateurs voyagent et qui a atteint la taille critique, contractualiser avec un transporteur et un groupe hôtelier est presqu’une évidence. Ce n’est pas le cas pour les opérateurs de VTC alors qu’en termes de dépenses, ce n’est pas forcément moindre. Qu’en pensez-vous ? Est-ce que ça change ?

Je suis d’accord avec votre constat; j’y apporterais une précision. Au-delà du montant de dépense, on est systématiquement premier ou deuxième poste dans le nombre de notes de frais. Et c’est ça la problématique, c’est cette gestion qui est cruciale, aussi bien pour le confort de l’utilisateur que pour la visibilité de l’entreprise. 

Et oui, ça bouge. En France, ça fait 4 ans qu'on a lancé cette activité BtoB (depuis 8 ans aux Etats-Unis). C'est donc très récent mais on a déjà 7.000 entreprises clientes en France (et 170.000 dans le monde) et en termes de chiffre d’affaires, on a connu une croissance de 150% entre 2020 et 2021. Nos entreprises clientes sont de toute taille, toute typologie (des startups (Doctolib, Mirakl…) comme des grands groupes (Schneider Electric, TF1, Axa…) et toute industrie (de l’entreprise de tech à l’établissement hospitalier).

L’une des caractéristiques traditionnelles des grosses startups, c’est une valorisation sans commune mesure avec leur rentabilité - quand rentabilité il y a ! En ce sens diriez-vous qu’Uber est encore une startup ?

Si on prend ce critère, non ! Pour deux raisons. La première, c’est que pour la première fois de son histoire, le groupe Uber a été rentable au Q4 2021 - une vraie rentabilité : qui dégage des profits. La deuxième, c’est que notre chiffre d’affaires prévisionnel de 2022 s’élève à 90 milliards de dollars, pour une valorisation de 60 milliards. Donc nous sommes plutôt sous-valorisés ! Pourquoi ? Parce que les investisseurs doutent de notre capacité à devenir rentables. C’est à nous de leur prouver le contraire - ce que nous avons donc fait fin 2021 et que nous devons continuer à faire.

Quant à notre activité BtoB, le chiffre d’affaires 2021 s’est élevé à 1 milliard de dollars en 2021 et on ambitionne de le multiplier par 5 en 2024. J’ajoute qu’Uber for Business est un puissant levier d’acquisition de clients : quand on contracte avec une entreprise, 6% de ses utilisateurs sont de nouveaux utilisateurs et - plus intéressants encore - 34% d’entre eux étaient des utilisateurs dormants qui redeviennent actifs. 

De bons résultats pour un acteur de la mobilité en pleine crise sanitaire ? On imagine qu’Uber Eats a constitué une belle bouée…

Bien sûr ! Et pour parler de la clientèle corpo, on peut dire qu’on a eu du flair : nous avons créé Uber Eats for Business en janvier 2020, juste avant le premier confinement. Cette offre permet, par exemple, d'octroyer 20€ de commande à ses collaborateurs quand ils sont en télétravail. Comme on peut s’en douter, en fonction des restrictions sanitaires, il y a, depuis deux ans, un mouvement de balancier entre la restauration et la mobilité dans la répartition de notre chiffre corpo. Par exemple, en janvier, nous étions à 50-50 et, à présent que les restrictions s’assouplissent, la mobilité repasse devant la restauration. Mais il est évident que Eats a été déterminant dans notre traversée de la crise… Tous nos clients n’étaient pas exactement dans le cas de ce client, gros chocolatier suisse, dont la mobilité a chuté de 93% en mars 2020, mais pas loin.

Votre modèle inspire : la concurrence ne cache pas ses ambitions. Quels atouts faites-vous valoir ?

Bien sûr, on regarde attentivement la concurrence comme elle nous regarde. Mais nous avons une vraie force qui repose sur deux caractéristiques. Notre implantation mondiale : 3,5 millions de chauffeurs répartis dans 100.000 villes dans le monde. Et notre taille - 27.000 salariés à travers le monde - avec une capacité à investir et à innover sans équivalent.