Applis de transport urbain : indispensables à l’info du voyageur d’affaires ?

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Une nouvelle étude de SIA Partnert démontre que les applis sont pour les transporteurs et leurs autorités organisatrices un support de choix pour connaître et fidéliser une clientèle de voyageurs urbains de plus en plus connectés, et leur faire préférer les transports en commun au véhicule individuel. Mais pour s’inscrire durablement dans le quotidien des usagers, les applis mobiles doivent avant tout répondre à leurs besoins.

Les applis sont pour les transporteurs et leurs autorités organisatrices un moyen de choix pour connaître et fidéliser une clientèle de voyageurs urbains de plus en plus connectés, et leur faire préférer les transports en commun au véhicule individuel. Pour s’inscrire durablement dans le quotidien des usagers, les applis mobiles doivent avant tout répondre à leurs besoins.

C’est d’autant plus important que, lorsqu’elles sont utilisées à grande échelle, elles répondent également à un enjeu puissant de collecte des données voyageurs, permettant aux transporteurs et aux autorités organisatrices de transport d’affiner leurs analyses, notamment en termes de prévision de trafic, et de planification des investissements futurs dans les infrastructures de transport.

Ces dernières années, les applis mobiles de transport en Ile de France se sont essentiellement développées autour de l’information voyageur (IV). En effet, avec son smartphone lui permettant l’accès instantané aux données, le voyageur attend avant tout de son appli transporteur qu’elle lui apporte de l’information en temps réel sur son trajet, qu’elle lui remonte les horaires réels de ses trains, les alertes concernant sa gare ou son trajet, et qu’elle lui propose une alternative satisfaisante en cas d’aléa [1]. Pour répondre à ce besoin, les applis développent une information de plus en plus fiable, de plus en plus détaillée et de plus en plus large, poussant l’idée d’accompagner le voyageur dans ses déplacements, non seulement de sa gare de départ à sa gare d’arrivée, mais en porte-à-porte, incluant la notion de transport multimodal (par exemple, commencer son trajet à pied, le poursuivre en vélo libre-service, puis prendre le train).

Néanmoins, aujourd’hui, l’Information Voyageur comme unique fer de lance des transporteurs atteint ses limites. D’abord parce qu’étant désormais indispensable et omniprésente dans leurs applis mobiles, elle est à fortiori de moins en moins différenciatrice. Ensuite parce que si l’IV répond bien au besoin d’optimisation du temps de trajet des usagers, d’autres attentes des voyageurs ne restent encore pas ou peu couvertes par les applis mobiles des transporteurs. Les voyageurs souhaitent ainsi également rentabiliser leur temps de déplacement quotidien pour en faire un temps de loisirs. De plus, s’ils sont adeptes du digital, ils sont aussi nombreux à exprimer un besoin de personnalisation des rapports avec le transporteur. Autant de besoins auxquels le développement de divers services digitaux dans les applis transporteurs pourrait répondre, leur permettant également d’être perçus comme innovants et de se distinguer de leurs concurrents. Quels services digitaux les transporteurs imaginent-ils ou pourraient-ils imaginer ? Quelles pourraient être leurs sources d’inspiration ?

Des services pour aider le voyageur à mieux utiliser son temps de trajet

Les Franciliens passent en moyenne 1h30 par jour dans les transports en commun, c’est beaucoup de temps « perdu », ni dédié au travail, ni aux loisirs, que les voyageurs cherchent à rentabiliser. Ils n’ont d’ailleurs pas attendu d’être à l’heure du digital pour tenter de profiter de leur trajet quotidien pour lire ou écouter de la musique. Mais les outils digitaux leur donnent aujourd’hui d’autres moyens de pratiquer ces occupations. Dès lors, pourquoi les applications des transporteurs franciliens ne pourraient-elles pas proposer à leurs utilisateurs de télécharger des e-books ou des journaux au format électronique à lire pendant leur trajet (le fait de les télécharger en amont du trajet leur permettant de pouvoir les consulter sans connexion internet)? C’est une idée qu’exploitent déjà les transporteurs au plus long cours comme Air France avec son appli Air France Press ou la SNCF avec SNCF e-livre qui indique pour chaque e-book proposé au téléchargement le temps de lecture indicatif, permettant aux voyageurs de choisir également sur le critère de la durée, en fonction de son temps de trajet. Les applis pourraient aussi reprendre le même principe pour la musique en permettant aux usagers de télécharger des podcasts et morceaux, et de choisir selon la durée du podcast.

Au-delà du seul fait de se rendre d’un point A à un point B, le voyageur peut également profiter de son voyage pour apprendre histoire et anecdotes sur les points d’intérêt de son trajet. De nombreuses applis se sont développées à Paris sur ce principe, grâce au système de géolocalisation. Par exemple, Cinemacity – application développée par Arte – se propose de faire découvrir la capitale française sous l’angle du cinéma, en géo-localisant les extraits de film à l’endroit où ils ont été tournés, et en proposant plusieurs balades pour relier un extrait à un autre. Dans la même veine, Quoi ma Rue permet de découvrir l’origine des noms des rues de Paris autour de soi.

C’est dans cet esprit que Transilien et le STIF (Syndicat des Transports d’Ile-de-France) ont lancé en mars 2015 l’application HAPI (Histoire et Anecdotes sur le Patrimoine d’Île de France), en partenariat avec la start-up Clameurs et le journaliste et historien Franck Ferrand. Une application particulièrement appréciée des usagers friands d’enrichissement culturel, qui la notent en moyenne à plus de 4 étoiles sur 5 sur l’App Store ou le Google Play Store.

Enfin, pour rentabiliser le temps d’attente que l’on peut avoir en gare, dans le cas de connexions longues, on peut imaginer des services permettant aux voyageurs de se rencontrer autour des équipements disponibles en gare. En effet, pour répondre aux attentes de convivialité et de rentabilisation du temps d’attente des usagers, les gares les plus importantes se sont mises à développer certains équipements comme des pianos ou des babyfoots, ou à proposer des évènements comme des concerts ou des expositions artistiques. Pour capitaliser sur ces services des gares, les applications digitales des transporteurs pourraient permettre de les géo-localiser et de rencontrer d’autres usagers ayant les mêmes centres d’intérêt. Ainsi, l’entité Gares et Connexions de la SNCF a développé une appli autour du babyfoot en gare permettant aux adeptes d’inviter d’autres joueurs présents en gare à partager une partie, d’enregistrer ses scores et de partager ses résultats.

L’information voyageur a déjà permis un premier pas vers la rentabilisation du temps d’attente en limitant la notion d’incertitude : l’usager sait que son bus aura 10 minutes de retard, donc il peut en profiter pour passer un coup de téléphone, ou autre. Les nouveaux services aujourd’hui envisagés pourront donc être utilisés sereinement par le voyageur grâce à l’IV puisqu’il connaîtra le temps dont il dispose.

Des services pour mettre la gare au cœur du quotidien du voyageur

Certaines gares générant de plus en plus de trafic sont devenues avec les années de véritables « quartiers », proposant tout un panel de services et de commerces, allant du Relais Colis au coiffeur, en passant par la pharmacie ou la boutique de vêtements. Les technologies de plus en plus poussées de cartographie indoor (comme Google Indoor utilisé dans de nombreux musées, aéroports et centres commerciaux) pourraient tout d’abord permettre aux applis transporteurs d’aider le voyageur à se repérer dans la gare, et à trouver le chemin le plus court pour se rendre au guichet, au photomaton, ou encore dans telle ou telle enseigne. Mais les transporteurs pourraient aussi capitaliser sur ces évolutions pour offrir des services bien spécifiques à leurs usagers, en partenariat avec les commerces des gares. Prenons l’exemple des pickup stations, automates de retrait de colis installés dans une centaine de gares franciliennes. Les transporteurs pourraient proposer dans leur appli un service Colis, à développer en partenariat avec La Poste, qui indiquerait la pickup station la plus proche, enverrait une alerte lorsque le colis est arrivé, etc. Dans le même esprit, on pourrait imaginer pouvoir commander un panier fraicheur en amont et le retirer dans la gare à l’arrivée. Autant de services qui pourraient exister au sein de l’appli du transporteur, soit par une redirection vers le site du prestataire, soit directement hébergés.

Les transporteurs et leurs partenaires commerciaux pourraient également capitaliser sur la technologie des beacons, de plus en plus utilisée notamment dans les centres commerciaux, pour pousser des offres commerciales bien ciblées aux clients lorsqu’ils passent devant une boutique donnée. Par exemple, l’usager pourrait recevoir un push commercial lui offrant 10% de réduction sur son prochain achat chez Relay lorsqu’il arrive dans une gare équipée d’un point de vente de cette enseigne. Et au-delà des simples pushs commerciaux, le transporteur pourrait aller plus loin dans sa relation avec ses usagers en leur proposant par exemple des bons compensatoires en cas de perturbation du trafic. Ainsi, on peut imaginer que le client recevrait sur son smartphone un code barre à faire scanner dans la boulangerie de sa gare, lui offrant un café pour compenser un retard important.

Enfin, la santé est également une préoccupation croissante des urbains, qui cherchent non seulement à manger plus sainement mais aussi à bouger plus. En témoigne l’engouement actuel pour les objets connectés et les applications dédiées, comme l’appli Health Mate lancée par la start-up Withings, qui permettent de tracer son activité journalière, son rythme cardiaque, ou son sommeil. Aujourd’hui, certaines applications du monde du transport se mettent également à intégrer des informations liées à la santé. Ainsi, Citymapper, application surtout centrée sur l’info voyageur, qui compare en temps réel les différents modes de transport pour parcourir un itinéraire donné (bus, métro, train, vélo libre-service, auto-partage, VTC, etc.) indique également le nombre de calories dépensées pour chaque mode de transport choisi.

Dans cet esprit, les applications des transporteurs pourraient indiquer le nombre de calories perdues si l’usager choisit de prendre tel itinéraire plutôt que tel autre, s’il choisit de prendre l’escalier plutôt que l’escalator, ou lui proposer un parcours adapté s’il souhaite marcher 10 minutes de plus pour rentrer chez lui.
 

Des services pour faciliter la relation entre l’usager et les agents

Nous l’avons vu, malgré leur engouement croissant pour le digital, les usagers sont en quête d’une personnalisation et d’une ré humanisation des rapports avec les agents. Dès lors, le challenge pour le transporteur consiste à faciliter les rapports humains à travers les services digitaux de son appli, en facilitant la mise en relation directe des clients et des agents. Au-delà de proposer une FAQ, et un service pour permettre au voyageur de faire remonter ses remarques sur les trains, les gares ou les services, les applications voyageurs pourraient s’inspirer des applications de dating comme Happn qui fonctionnent sur le principe de géolocalisation des utilisateurs. On pourrait ainsi imaginer un service qui permette au voyageur de voir les profils d’agents à proximité, et les questions auxquelles ils sont en mesure de répondre. Par exemple le service me permettrait de voir que Eric, agent spécialiste de la sécurité est à 200 mètres de moi, ou que Jeanne, agent spécialiste des informations trains est à 150 mètres. Un bouton pourrait me permettre de prévenir l’agent de mon arrivée, et pourquoi pas de le noter après notre échange.

Certaines initiatives ont déjà été développées dans ce sens par l’entité Gares et Connexions de la SNCF, qui a par exemple installé des QR codes auprès des équipements de certaines gares (comme les escalators ou ascenseurs), permettant aux usagers de les flasher et de signaler un dysfonctionnement pour qu’il soit réglé dans les meilleurs délais.

Que faut-il en conclure ?

Les services digitaux, qu’ils soient dédiés à transformer le temps de trajet du voyageur en temps de loisirs, à humaniser sa relation avec le transporteur, ou qu’ils capitalisent sur les services et commerces présents en gares, semblent donc être l’avenir des applications mobiles des transporteurs. Au-delà de la performance de l’information voyageur, ils peuvent constituer une véritable proposition de valeur supplémentaire pour les usagers et donc un véritable élément de différenciation pour les transporteurs. L’écosystème y est par ailleurs particulièrement favorable, avec l’arrivée de technologies de plus en plus poussées, notamment en termes de géolocalisation, qui repoussent toujours plus loin les limites du possible : cartographie indoor, beacons, 4G dans le métro…

A noter enfin que la billettique est un autre axe de développement important des applications voyageurs. La société Paybyphone développe ainsi des partenariats avec certaines collectivités comme l’agglomération de Nice où elle propose une application permettant d’acheter son titre de transport à distance depuis son smartphone et de le valider à bord grâce à la technologie sans contact NFC. Avec les services digitaux, la billettique pourrait constituer un second levier de différenciation des applis des transporteurs et des AOT.
A propos de SIA Partners

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Fort d'un effectif de 500 collaborateurs répartis sur 12 pays (Europe, Amérique du Nord, Asie, MENA), Sia Partners est le leader du conseil en management en France

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