Vacance des slots Aigle Azur, connexions Transavia et EasyJet, inauguration du Terminal 3. L’année a été exceptionnellement riche en événements pour Orly. Flight-report en propose un bilan dont nous reprenons ici les grandes lignes.
Après l’annonce d’un système de correspondances standardisé des compagnies EasyJet et Transavia, facilité par la récente jonction des deux terminaux historiques ; six mois après l’inauguration du nouveau terminal 3, Flight-Report fait le bilan des nouvelles dynamiques qui se dessinent au sein du deuxième aéroport français.
Quel impact sur l’expérience client ?
En mars 2019, Orly Sud et Orly Ouest avaient vécu et faisaient place à Orly 1-2-3-4. Concrètement, Orly 1 et 2 correspondent aux satellites qui composaient Orly Ouest, et Orly 4 est la nouvelle dénomination donnée à Orly Sud. Tandis qu’un nouveau terminal, Orly 3, assure depuis le 16 avril 2019, date de son inauguration, la jonction des deux ensembles.
En terme de localisation des compagnies, cette réorganisation a surtout des répercussions sur le groupe AirFrance – KLM puisque les vols Transavia, précédemment au départ d’Orly Sud, décollent maintenant du nouvel Orly 3, tandis que les vols long-courriers Air France (ainsi que quelques vols intérieurs Air France) déménagent également d’Orly Ouest à Orly 3. Le groupe est rejoint par la low cost Level et la compagnie Air Corsica qui ont aussi quitté Orly Ouest pour rejoindre le nouveau terminal.
D’après Flight-report, l’expérience client s’est légèrement améliorée, la note globale de l’aéroport passant de 7,4 à 7,5/10. Ce sont surtout les gains au niveau de la gamme de services proposés (+0,2 point) ainsi que la plus grande propreté (+0,2 point) qui tirent la moyenne vers le haut. Nos contributeurs ont notamment relevé la netteté et la propreté d’Orly 3. La note de fluidité est néanmoins en légère baisse (-0,1 point), certainement due au temps d’adaptation des équipes au nouveau terminal et à la nouvelle configuration globale de la plateforme.
De plus, la période du passage d’Orly Sud/Ouest à Orly 1-2-3-4 a également été le théâtre de plusieurs évènements impactant les opérations de l’aéroport : la faillite d’Aigle Azur en septembre dernier (dont les créneaux n’ont pas encore été redistribués) a eu pour effet de désengorger Orly 4, tandis que la réorganisation du trajet de l’Orlybus (qui ne dessert plus Orly 1-2-3 dans le sens Orly-Paris depuis mai 2019) a amélioré l’accessibilité d’Orly 4 au détriment d’Orly 1-2-3 (qui abritent ceci-dit toujours l’Orlyval).
La jonction des nouveaux terminaux permet un parcours fluidifié au sein de l’aéroport : on peut désormais joindre, sans quitter l’enceinte de l’aéroport, Orly 1 à Orly 4, ce qui facilite la possibilité de correspondances à Orly, aujourd’hui réduite à 6,8% de passagers en transit (2018). Sur ce nouveau segment, easyJet et Transavia ont déjà engagé les hostilités.
Transavia et EasyJet en force
Transavia a été la première, début Octobre, à annoncer la mise en place de « Transavia Smart Connect » : une solution de correspondances entre les différentes destinations du réseau Transavia. Il ne s’agit cependant pas d’un transit mais d’une simple combinaison de vols : à titre d’exemple, le passager doit s’enregistrer séparément pour chacun des vols de son itinéraire. Quant aux bagages en soute, il faut également les récupérer et les réenregistrer à l’escale d’Orly.
Ce dispositif permet à Transavia de proposer plus de 700 nouveaux itinéraires (théoriques) en correspondance à Orly. Bien que la plateforme Transavia Smart Connect n’intègre aujourd’hui que les vols Transavia France et Transavia Holland, d’autres compagnies aériennes seront ajoutées à la plateforme d’ici la fin de l’année. A priori, Transavia profitera notamment des liaisons long courrier d’Air France au départ d’Orly 3 pour proposer des correspondances moyen-long courrier.
Fin Octobre, c’est easyJet qui annonçait le lancement de « Worldwide by easyJet » à Orly, permettant aux passagers de réserver des itinéraires avec correspondance à Orly sur l’ensemble de son réseau. Contrairement à Transavia, la low cost britannique propose déjà sur sa plateforme des correspondances moyen-long courrier en partenariat avec Corsair et La Compagnie, profitant ainsi d’une large exposition aux destinations américaines, antillaises et africaines.
Néanmoins, la diversité du réseau Transavia permet un plus grand nombre de correspondances sur le réseau propre moyen-courrier, ainsi qu’un parcours simplifié à Orly dans l’hypothèse d’une correspondance sur un vol long-courrier, puisque les vols long-courriers Air France partiraient du même terminal. A contrario, les passagers easyJet en correspondance sur un vol Corsair ou La Compagnie devront faire le trajet d’Orly 2 à Orly 4 (et inversement).
Quelle redistribution des slots Aigle Azur ?
La récente faillite de la compagnie Aigle Azur a libéré 4 % des créneaux au départ et à l’arrivée d’Orly. Leur répartition est désormais un enjeu stratégique pour le futur de la plateforme. Actuellement, le trafic à l’aéroport d’Orly est largement dominé par Air France (39% des créneaux), suivie par Transavia (13%), easyJet (10%) et Vueling (7%). A lui seul, le groupe Air France–KLM dispose de plus de la moitié des créneaux (54%), tandis qu’IAG se place second avec 12% des créneaux (part qui prend en compte la récente acquisition de la compagnie Air Europa).
Aigle Azur ayant fait faillite, au total ce sont 9.150 créneaux (soit l’équivalent de 12 vols quotidiens) qui ont été confiés à l’agence COHOR pour les répartir entre les compagnies intéressées. Et les candidats devraient être nombreux. D’une part, le volume de créneaux libéré par Aigle Azur est intéressant pour attirer de nouveaux entrants qui voudraient se développer rapidement sur la plateforme. D’autre part, le nombre de créneaux de vols à Orly étant limité par la loi à 250.000 par an, les compagnies opérant déjà à Orly pourraient être intéressées d’accroître davantage leur présence en augmentant la fréquence de certaines lignes ou en en ouvrant de nouvelles.
L’État a la possibilité de réserver jusqu’à 20% de ces nouveaux créneaux à des liaisons d’obligations de service public (OSP), une option qu’il devrait exercer en intégralité. A se fier à la distribution actuelle des créneaux OSP, les 20% ponctionnés par l’État profiteraient en grande partie aux transporteurs français (notamment Air France et Air Corsica). Une fois les créneaux OSP répartis, COHOR a pour consigne de répartir les créneaux restants (au moins 80% du pool) à 50-50 entre les nouveaux entrants et les exploitants actuels de l’aéroport.
Pour ce qui est des nouveaux entrants, priorité sera donnée aux lignes communautaires où moins de 3 acteurs sont présents. Pour les exploitants actuels, aucune règle n’est fixée. Le volume de demandes attendu pourrait ainsi aboutir à un émiettement du pool de créneaux si COHOR ne souhaite privilégier aucune compagnie ou aucun groupe en particulier. Historiquement, la répartition ne s’est pas faite au prorata des créneaux déjà en place. En fonction des décisions prises par COHOR, Orly pourrait prendre une toute autre forme ou voir se poursuivre les tendances des dernières années. La part du low cost, qui représente 40% du trafic en nombre de passagers en 2018, pourrait poursuivre son ascension.
Il s’agira également de savoir si de nouveaux horizons s’ouvriront à Orly ou si les destinations historiques seront renforcées. Pour rappel, Orly bénéficie d’un trafic essentiellement local et d’un tropisme plutôt méditerranéen (France méridionale, péninsule ibérique, Maghreb) et antillais. Ainsi, la France est de loin le pays le plus fréquemment desservi devant l’Espagne et le Maroc. La destination la plus desservie est Toulouse, avec 28 vols quotidiens au départ d’Orly. La destination internationale qui arrive en tête est Madrid, une position que la capitale espagnole devrait maintenir avec l’ajout d’une liaison Air France sur cette ligne à partir du printemps prochain.
L’impact des travaux
Depuis juillet 2019, un large chantier ayant pour but de reconstruire entièrement l’une des pistes principales d’Orly (la piste 08/26, aussi appelée piste 3) a sensiblement affecté le trafic de l’aéroport : vols déplacés ou annulés, trajectoires de décollage et d’atterrissage inédites, opérations en piste unique… Reposant habituellement sur ses deux pistes principales, la 08/26 la 06/24, Orly s’est vu amputé pendant 5 mois, du 28 juillet au 2 décembre, d’un pilier de ses opérations aériennes.
En conséquence, les compagnies ont dû ajuster leur programme de vols à la baisse pour réduire le volume de trafic sur la plateforme. Les décollages et les atterrissages se sont donc enchaînés sur une piste unique (la 06/24), mettant au défi les contrôleurs aériens et les pilotes qui ont opéré en flux tendu. La piste 02/20, très rarement utilisée à Orly en temps normal, a également été occasionnellement sollicitée pour les décollages de certains petits et moyens porteurs.
Certaines trajectoires de départs et d’arrivées sont donc presque inédites pour l’aéroport, ce qui a notamment été un sujet important de discussions avec les riverains. On pouvait par exemple observer des avions décollant ou atterrissant au ras de la route nationale 7… Remise en service depuis le 2 décembre 2019, la piste 3 d’Orly s’est également vue renommée piste 07/25.
2020 et la suite…
Depuis son inauguration il y a exactement 110 ans jusqu’à aujourd’hui, peu d’années ont autant imprimé de transformations à l’aéroport d’Orly que l’année 2019, tant au niveau de l’expérience passager qu’à l’égard des dynamiques stratégiques régissant la plateforme. Le passage d’Orly Sud/Ouest à Orly 1-2-3-4 semble avoir apporté des améliorations significatives qui s’affirmeront certainement davantage dans un futur proche sous l’effet de la concrétisation d’autres chantiers (nouveau salon Business Air France à Orly 3 en 2020, réaménagement de la zone de départ international à Orly 4 en 2020, gare aéroport d’Orly en 2024).
Aéroport de voyageurs essentiellement locaux par son passé, Orly, par sa réorganisation, crée désormais des possibilités inédites de correspondances s’appuyant sur la diversité et la puissance du réseau low cost. La course est lancée entre EasyJet et Transavia pour contrôler cette activité de transit émergente. Mais l’équation Orly s’est également complexifiée en 2019 avec l’apparition de nouvelles inconnues. La répartition des créneaux si convoités de la défunte Aigle Azur, annoncée pour mi-décembre, ainsi que l’issue du projet de privatisation du groupe ADP attendue en 2020, permettront incontestablement de dessiner plus clairement le futur visage du deuxième aéroport français.