Jean-Pierre Mas, Président du SNAV: «Le syndicat est le représentant de toutes les entreprises du voyage que ce soit dans le loisir ou le voyage d’affaires»

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Récemment arrivé à la tête du Syndicat National des Agences de voyages, Jean-Pierre Mas, qui termine sont mandat de Président du réseau volontaire Selectour Afat, a du pain sur la planche. Une structure un peu vieillotte, dépassée par des consommateurs au fait des techniques digitales, voilà pour le constat. Mais c’est du côté des envies qu’il faut aller chercher le nouveau Président.

«Il faut changer l’image des agences et montrer notre proximité avec le client quel qu’il soit, loisir ou affaires , et surtout notre immense intérêt économique, encore méconnu et masqué par un internet omniprésent loin d’être une bonne affaire à chaque fois», explique le nouveau boss du voyage français, «Nous avons des dossiers lourds, dans un pays ou la tradition de la taxe est une réponse à toutes les problématiques». Et de fait, le nouveau Président du SNAV veut aller à la rencontre de tous les acteurs du domaine : des compagnies aériennes aux gestionnaires d’aéroport, sans oublier les politiques, qu’ils soient à Paris ou Bruxelles. «Nous ne sommes pas des dinosaures dépassés mais des chef d’entreprise qui faisons avancer nos sociétés sur des marchés mouvants, complexes et bousculés en permanence par les clients. Il faut nous adapter, c’est notre ambition», explique Jean Pierre Mas. Rencontre avec l’homme qui pourrait très vite murmurer intelligemment à l’oreille de vos voyageurs.

DéplacementsPros.com : Pour les acheteurs de voyages, le SNAV apparait sans intérêt pour le Business Travel. Que répondez-vous à cette vision?

Jean-Pierre MAS : Quelle est fausse, tout simplement. Nous sommes le syndicat qui représente les entreprises du voyage. Toutes les entreprises et donc naturellement leurs clients. Notre mission n’est pas du domaine du corporatisme. Au contraire, nous sommes ouverts sur tout ce qui fait le déplacement que ce soit dans le loisir ou le voyage d’affaires.
Je prendrais un seul exemple, et il est de taille, la plupart des grandes commissions du SNAV sont gérées par des TMC : la commission Air est présidée par Valérie Sasset (BCD Travel), la commission Rail est présidée par Christine Baal (American Express Voyages d’Affaires). La commission des Affaires Sociales est assurée par Luc Dallery (CWT France). Carlson Wagonlit Travel est également représenté par Isabelle Rech Francis qui préside la commission juridique et Lionel Weingaertner qui assure la présidence de la commission fiscale. Voilà un exemple concret de la représentativité du voyage d’affaires au sein du SNAV. Tous sont à la tête de commissions importantes avec des dossiers difficiles qu’il faudra faire avancer. C’est un travail d’équipe, autour d’un Président. Chacune des personnalités que je viens de citer est un maillon essentiel du syndicat.

DéplacementsPros.com : On a le sentiment que le SNAV n’était qu’une chambre de gestion des problèmes du voyage de loisir?

Jean-Pierre MAS : C’est facile de regarder derrière et de dire que l’on va faire mieux. Chaque présidence a permis au SNAV de franchir une marche. Un palier. Que ce soit lors de la négociation de la loi de 92, la récente discussion sur le droit des consommateurs, la convention collective des métiers du voyage… La liste est longue. Il ne s’agit pas de se satisfaire de cette vision d’anciens combattants.

Au contraire, il nous faut avancer et avec notre époque. Aujourd’hui, on parle de technologies, de mobilité d’instantanéité des ventes… Ce sont des sujets que nous prenons à bras le corps et dans tous les univers du voyage.

Le corporate Travel est partie intégrante des dossiers que nous traitons. Nous devons apporter des réponses économiques et factuelles.

DéplacementsPros.com : Vous évoquez la convention collective, mais elle est complexe à unifier?

Jean-Pierre MAS : C’est vrai que la problématique d’un plateau d’affaires est très différente de celle rencontrée par un agent de comptoir. Aujourd’hui nous venons de proposer et de signer un nouveau texte mais il faudra le faire évoluer pour prendre en compte les spécificités des salariés des TMC. On voit bien que leurs problèmes se rapprochent plus du Call center que de l’agence traditionnelle. Les contraintes et les attentes sont différentes. Nous allons travailler à cet aspect social. Encore une fois, nous sommes orientés vers le client. Tous les clients.

DéplacementsPros.com : Vous évoquez la loi Hamon sur la consommation, en quoi le voyage d’affaires est-il concerné?

Jean-Pierre MAS : Le voyageur est un consommateur comme les autres. LA seule différence c’est que son billet d’avion ou sa chambre d’hôtel sont payés par son entreprise. Cela ne veut pas dire qu’il est un sous voyageur. Il bénéficie comme tous les autres des règles établies sur le remboursement des taxes sur les billets d’avion non volés. Les TMC intègrent aujourd’hui ce service, certaines moyennant rémunération ce qui est totalement légal. Idem sur les règles européennes en matière de retard ou d’annulation des vols. Le passager «affaires» est dans ce cas un consommateur comme les autres.
Il y a encore quelques points complexes sur la notion de remboursement et de paiement des indemnités mais je ne doute pas que tout cela sera rapidement réglé.

DéplacementsPros.com : NDC, les dérives sont réglées?

Jean-Pierre MAS : Difficile de vous répondre tant que le nouveau modèle n’est pas mis en place. On sait qu’avec le NDC, les compagnies veulent limiter le pouvoir des GDS. A contrario, ce sont elles qui ont créé les GDS et c’est Amadeus, le premier d’entre eux, qui en développe les principaux outils. Mais le NDC ne doit pas être vu comme une approche négative du transport aérien. C’est aussi un outil qui permet d’optimiser la vente de produits ancillaires en s’adaptant au profil des voyageurs. Il y a de bonnes choses à exploiter dans cette vision fournisseurs/clients.

DéplacementsPros.com : Avant de présider le SNAV vous étiez le Président de la commission Air de ce syndicat. Où en est le problème des surcharges carburant intégrés aux taxes?

Jean-Pierre MAS : Nous continuons à nous battre pour qu’une ligne supplémentaire soit ajoutée au fameux «reçu d’itinéraire du passager». Aujourd’hui la surcharge n’est pas transparente et lorsque l’on a payé 250 euros de taxes et que l’on se fait rembourser 40 ou 50 euros parce que le reste c’est de la surcharge carburant, je pense que ce n’est pas sérieux. D’autant plus que généralement, cette information est totalement numérique avec la dématérialisation du billet.
C’est au niveau de l’affichage du prix que tout doit être indiqué. A une époque où l’on met en avant la souplesse des outils informatiques, je suis persuadé qu’ajouter une ligne sur un billet n’est pas aussi complexe que le disent les compagnies. En tout cas, je me battrais jusqu’au bout. Quitte à hausser le ton.

DéplacementsPros.com : Comment allez-vous exister dans un univers complexe où chacun a une idée de ce qu’il faudrait faire?

Jean-Pierre MAS : En répondant de façon très concrète aux interrogations de nos adhérents. On pourra proposer un ensemble de best practices dans des domaines où notre expertise semble floue aux clients. Nous allons travailler aux outils connectés et nous positionner sur les demandes des voyageurs en matière de sécurité, de garantie des droits. Cela n’a l’air de rien mais nous l’avons déjà fait.

Je prends l’exemple du NDC largement évoqué dans vos colonnes. C’est la combativité du SNAV qui a fait reculer IATA. A l’origine, l’association des transporteurs aériens voulait que toutes les données client soient transmises avant de donner un tarif. Nous avons fait remarquer que c’était illégal et inadapté aux marchés actuels. IATA a reculé et désormais il y a une obligation pour les transporteurs aériens de donner l’accessibilité à tous les tarifs.

Nous restons vigilants et prudents sur les intentions et les attitudes commerciales de IATA. Pour autant, c’est un partenaire précieux et solide. Il entend nos remarques et les analyse, même si parfois il faut un peut se frotter pour obtenir un résultat. C’est sain et loyal.

DéplacementsPros.com : Vous êtes-vous fixé un objectif pour vos prochaines années de présidence du SNAV?

Jean-Pierre MAS : Je ne suis pas un homme de coups médiatiques mais plutôt un coureur de fond. Mon objectif est de faire avancer et de régler le maximum de dossiers complexes posés sur le bureau à mon arrivée. Je le ferais en équipe, en écoutant le marché et l’environnement économique. Il ne s’agit pas de briller quelques minutes à un moment donné mais d’être lumineux et transparent dans notre démarche à chaque moment où l’on représente le syndicat.

Aujourd’hui la mission que m’ont donné les électeurs est simple : donner du poids à notre syndicat, le rendre incontournable chaque fois qu’un sujet est de sa responsabilité directe ou non et obtenir des résultats pour la richesse de nos entreprises et l’intérêt de leurs clients. Tout un programme.

Entretien réalisé par M. Lévy.