Congrès de la FNAM : un secteur du transport aérien optimiste mais vigilant

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Le transport aérien après la crise, quelles perspectives ? Les intervenants d’une table ronde, organisée lors du Congrès annuel de la Fédération Nationale de l’Aviation et de ses Métiers (FNAM), ce jeudi à Paris, ont fait preuve d’un optimisme mesuré au regard des défis qui attendent le secteur dans les prochains mois.

Le Congrès de la FNAM s’est déroulé ce jeudi matin dans l’amphithéâtre du siège de la DGAC, en face de l’héliport d’Issy-les-Moulineaux. Alain Battisti, le président de cette fédération représentant plus de 95% de la flotte et des activités du secteur du transport aérien français, a d’abord rappelé, en introduction, les défis auxquels étaient confrontés le secteur. Et d’abord celui de réussir le prochain été, en maintenant un service de qualité alors que l’ensemble des acteurs sont confrontés à un manque de personnel et à une vraie difficulté pour recruter. Une contrainte d’autant plus grande que l’activité est en forte reprise et les passagers de retour dans les aéroports et les avions. Rafael Schvartzman, directeur général Europe de IATA, a confirmé l’actuelle bonne dynamique du trafic en Europe et aux Etats-Unis, l’atonie d’autres régions en revanche, surtout l’Asie-Pacifique avec notamment les restrictions toujours imposées par la Chine et le Japon.

La reprise ne concerne pas non plus tous les segments de marché de la même manière. Invité à participer à une table ronde sur les perspectives du transport aérien après la crise, Jean-Pierre Mas, le président des Entreprises du Voyage (EDV) a noté la bonne forme des ventes de billets d’avion loisirs, mais constaté en revanche que le segment voyage d’affaires était “très loin d’être revenu au niveau de 2019”, avec une activité entre 70 et 80% de ce qu’elle était avant la pandémie. “Et il n’y a aucune perspective de rattrapage en 2022 et en 2023, car les politiques des entreprises ont changé : elles ont enregistré pour nombre d’entre elles des résultats aussi bons pendant la crise sanitaire, même en ayant drastiquement réduits leurs budgets voyage, qu’avant la pandémie avec des budgets voyages élevés”.
Les professionnels du secteur, outre l’atonie du segment affaires qui pèse lourd dans leurs revenus, s’inquiètent aussi du manque de visibilité au-delà de l’été. Marc Rochet, directeur général d’Air Caraïbes et président de French bee, est notamment revenu sur les conséquences de l’invasion de l’Ukraine, laquelle se traduit par “un double phénomène. D’abord une forte hausse des prix du carburant : le prix de la tonne de pétrole a doublé depuis un an. Ensuite le changement certes moins violent mais non moins négligeable de la parité euro-dollar au profit de ce dernier. Or, le billet vert, toutes compagnies confondues, correspond à environ 40% des coûts d’une compagnie aérienne”. Pour Marc Rochet, les tarifs aériens vont devoir augmenter de plus de 20%. Et de relever que les prix sont “déjà en hausse, avec un effet immédiat sur la demande”.

Thomas Juin, le président de l’UAF (Union des Aéroports Français) est convaincu aussi que le transport aérien, dans les prochaines années, va coûter plus cher, d’autant que des taxes nouvelles visant à soutenir la décarbonation du secteur s’ajouteraient aux remboursements de prêts et autres renchérissement des coûts. A l’instar des compagnies aériennes, les aéroports français ne sont pas épargnés non plus par les difficultés de recrutement. “Nous ne connaissons heureusement pas des situations chaotiques telles que celles qu’on voit aujourd’hui à Schiphol ou Heathrow. L’activité partielle nous a permis, il est vrai, de conserver les compétences” se félicite Thomas Juin, tout en prévenant que “l’été va être compliqué” (…). Le sujet numéro un, qui concerne la qualité de service, ce sont les effectifs de police”, a-t-il ajouté. Le dispositif avec contrôle renforcé aux frontières extérieurs de l’Europe (EES, ndr), mis en place l’an prochain, “va doubler le temps d’attente. Or, nous ne souhaitons pas revivre les situations de 2017 à Orly, avec trois à quatre heures d’attente avant d’embarquer. (…) Nous travaillons avec le ministère de l’Intérieur sur des dispositifs tels des kiosques et autres. Mais sans effectifs revus à la hausse, on n’évitera pas des situations chaotiques”.

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Le président d’Aston Fly/ Aston Jet est pour sa part revenu sur le boom qu’a connu le secteur de l’aviation d’affaires ces derniers mois. “Une nouvelle clientèle est arrivée, qui a constaté que notre offre n’était pas aussi chère qu’elle le pensait“ explique Charles Clair, rappelant que la force principale de l’aviation d’affaires était d’abord la flexibilité. Mais ce marché est également confronté aux coûts en hausse et aux difficultés de recrutement. Et les avions manquent pour répondre à la demande, de même que certaines pièces détachées. L’avenir ? “Il faut rester agile car il est difficile de savoir ce qui se passera dans les prochains mois”.