Pour les compagnies aériennes françaises, les sujets d’inquiétude ne manquent pas cet automne

1292

Les compagnies aériennes tricolores membres de la Fnam craignent la menace que constitue toujours le Covid, les restrictions persistantes de circulation, les craintes liées à la fin des aides, à la hausse des taxes et redevances…. Et la reprise du segment Affaires se fait attendre, les espoirs portant désormais en grande partie sur les Etats-Unis et la réouverture de leurs frontières en novembre.

La Fnam, désormais Fédération Nationale de l’Aviation et de ses Métiers (anciennement de l’Aviation Marchande), a organisé ce lundi un point presse dans ses nouveaux locaux parisiens (*). Objectif, faire un état des lieux du secteur aérien en France. A cette occasion, Alain Battisti, son président, a réuni autour de lui trois dirigeants de compagnies aériennes, Anne Rigail, directrice générale Air France, Pascal de Izaguirre, PDG de Corsair International, et Marc Rochet, directeur général d’Air Caraïbes. En préambule a été dressé un tableau plutôt sombre de la situation, « toujours très difficile pour le secteur aérien en ce début d’automne« . Le trafic total France passagers, du 1er janvier au 30 septembre 2021, s’est avéré être « très limité », de l’ordre de 35% par rapport à la même période de 2019 (44,7 millions de passagers contre 138,5 en 2019).

« Le mois de septembre marque le pas, avec un indice de 52% par rapport au même mois de 2019, contre 57% au mois d’août. On voit que le segment business n’a pas repris comme on l’espérait, à la différence du loisir » a souligné Alain Battisti, également PDG de Chalair. La Fnam constate en effet que la reprise du voyage d’affaires est lente. «Nous allons d’ailleurs observer attentivement le comportement de la clientèle d’affaires avec la réouverture des frontières des Etats-Unis aux visiteurs vaccinés, le 8 novembre» a souligné Anne Rigail. Globalement, le domestique est de retour. Le long courrier – à commencer par la Chine – manque en revanche à l’appel, de même que quelques importantes destinations moyen-courrier dont l’Algérie jusqu’à une date récente. « Une partie de l’Asie, et dans une moindre mesure de l’Afrique restent durablement fermées » confirme Alain Battisti. Les restrictions de circulation pèsent en effet sur la reprise du long-courrier notamment, y compris sur l’aviation d’affaires.

Les anticipations sur le quatrième trimestre sont contrastées, avec des réservations en augmentation mais un coupon moyen en baisse. La clientèle attend bien souvent la toute dernière minute pour se décider, ce qui induit un manque de visibilité et une fragilité préjudiciables pour les compagnies. Pascal de Izaguirre et Marc Rochet se montrent également inquiets des conséquences des taux de vaccination encore insuffisants aux Antilles, et des menaces d’une reprise de l’épidémie qui pèsent sur ces territoires cet hiver.

De gauche à droite, Marc Rochet, Pascal de Izaguirre, Anne Rigail, Alain Battisti et Laurent Timsit (nouveau délégué général de la Fnam)

Sur les taxes et redevances, les compagnies aériennes s’inquiètent des hausses que laissent entrevoir l’État, la DGAC et les structures aéroportuaires. Alain Battisti a insisté sur le nécessaire maintien de l’aide de l’État au secteur. « 2022 ne sera pas une année du retour à la normalité. On ne peut pas revenir sur des niveaux de taxes et de redevances comme s’il ne s’était rien passé, alors que nous ne sommes pas sortis de la crise ». Pascal de Izaguirre, au regard des spécificités du secteur, demande la prolongation du dispositif d’activité partielle, l’amélioration du dispositif de l’activité partielle longue durée. Il a aussi rappelé la problématique des plafonds sur certains dispositifs qui ne sont pas adaptés à la taille de compagnies aériennes. Est souhaité également le rééchelonnement des périodes de remboursements des cotisations sociales et des PGE. Les transporteurs ont aussi de bonnes raisons de s’inquiéter de l’impact considérable de la hausse du fuel (même non taxé), le carburant représentant en moyenne entre 20 et 30% des coûts d’exploitation d’une compagnie aérienne.

Sur la transition environnementale, Anne Rigail considère que le secteur doit s’engager plus fermement et accélérer sur cette question au regard de la situation climatique : « Nos clients le réclament de manière ferme ». Alain Battisti a renchérit en notant que le carburant vert était encore très peu disponible et que les réflexions sur la mise en place des filières devaient rapidement trouver des expressions concrètes. Avec en filigrane la conviction que «l’avion ne doit pas être un mode de transport pour les riches ».

Questionnés enfin sur l’accord de ciel ouvert entre le Qatar et l’Union Européenne signé ce 18 octobre, les responsables de compagnies aériennes françaises se sont montrés sévères, notant qu’il allait surtout profiter à Qatar Airways et à son hub de Doha. Les tailles des marchés respectifs ne sont en rien comparables. Et pas davantage les conditions de travail..

(*) 22 avenue Franklin Delano Roosevelt, dans le 8ème arrondissement à Paris

Une nouvelle équipe à la Fnam
Laurent Timsit, Hélène Clavé et Eric Trautmann ont rejoint la Fnam cet  été. Lire notre article.