Contrefaçon, les voyageurs d’affaires sous le regard des douanes

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Contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce ne sont pas seulement les touristes qui se rendent coupables d'achats de produits contrefaits. Les voyageurs d'affaires et les professionnels du transport sont désormais montrés du doigt par les instances en charge de lutter contre la contrefaçon. Surveillance accrue et amendes sont au menu de ces prochains mois.

Contrefaçon, les voyageurs d'affaires sous le regard des douanes
Légalement, le recel de produit contrefait ne concerne pas l'entreprise. Si un voyageur se fait prendre, c'est donc à titre personnel qu'il sera poursuivi. Il reste que pour beaucoup de sociétés, l'information du voyageur porte désormais sur cet aspect des choses et en particulier pour celles et ceux qui se déplacent en Asie. Comme le précise le CNAC, "Détecter les produits contrefaisants dans la masse des produits en circulation est parfois difficile.Si les imitations tendent à être de mieux en mieux réalisées, des différences parfois subtiles peuvent être remarquées, et des moyens existent pour distinguer le faux du vrai". Et l'organisme de donner des conseils utiles à faire circuler dans l'entreprise, à savoir :

> la qualité du produit
La qualité des produits contrefaisants est souvent très inférieure à celle des produits authentiques. Vérifiez par exemple le moulage, ou encore les coutures, la peinture du produit, la symétrie des lignes...

> le prix
Soyez attentif(ve) aux offres de prix anormalement basses : si le prix est trop attrayant, il s'agit probablement d'un produit contrefaisant. Les contrefacteurs ne dépensent rien pour la recherche et le développement, ni pour le marketing et le contrôle de la qualité ; ils utilisent des matières et des procédés de fabrication plus économiques, et ne paient pas de taxes ! Ils dégagent ainsi d'énormes marges de profit tout en offrant leurs marchandises à un prix qui semble imbattable.

> l'emballage
L'emballage des produits authentiques est généralement bien étudié et bien fini, ce qui n'est pas toujours le cas pour les produits contrefaisants. Examinez en particulier la qualité d'impression : des défauts tels que les lignes moirées, les impressions floues, et de mauvaises combinaisons de couleurs sont souvent révélateurs de contrefaçon.

> l'étiquette
Sur les étiquettes figurent un certain nombre de renseignements concernant le fabricant et le produit : faites bien attention à l'orthographe des noms de société et de la marque.
Examinez les indications de conformité aux normes, les certificats d'authenticité, les conditions de garantie et le service après-vente proposé.

> le lieu de vente
Méfiez-vous des lieux de vente qui n'ont pas pignon sur rue et assurez-vous de la notoriété du vendeur. Faites preuve de vigilance si vous achetez sur des sites d'enchères en ligne : dans la mesure où ils ne vérifient pas la provenance des articles répertoriés, ces sites recèlent de nombreuses contrefaçons.

> l'argumentation du vendeur
Certains vendeurs peu scrupuleux n'hésitent pas à prétendre que leurs produits ont été fabriqués légalement dans tel pays d'origine, mais cette information n'est pas suffisante pour en conclure que le produit est authentique et a été légalement importé en France.
Si vous doutez de l'authenticité d'un produit ou de l'honnêteté du vendeur, vous pouvez vous rapprocher de la société qui fabrique les produits authentiques et/ou des organismes officiels de lutte anti-contrefaçon. Ils pourront vous aider à détecter une éventuelle contrefaçon, voire à engager une procédure si vous avez déjà acheté le produit. Microsoft, par exemple, détaille sur internet les moyens permettant de reconnaître ses vrais produits.

La contrefaçon, c'est du vol !

Concrètement, la contrefaçon est la violation d'un droit de propriété intellectuelle. Selon les douanes françaises sont considérées notamment comme des contrefaçons :
- la reproduction, l'usage, l'apposition ou l'imitation d'une marque identique ou similaire à celle désignée dans l'enregistrement, sans l'autorisation du propriétaire ou du bénéficiaire du droit exclusif d'exploitation ;
- toute copie, importation ou vente d'une invention nouvelle, sans le consentement du titulaire du brevet ;
- toute reproduction, totale ou partielle d'un dessin ou modèle, sans autorisation de l'auteur ;
- toute édition d'écrits, de compositions musicales, de dessins, de peintures ou de toute autre production imprimée ou gravée en entier ou en partie ainsi que toute reproduction, représentation ou diffusion d'une œuvre de l'esprit en violation des droits d'auteur ;
- toute fixation, reproduction, communication ou mise à disposition du public, à titre onéreux ou gratuit, d'une prestation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un programme, réalisées sans l'autorisation, lorsqu'elle est exigée de l'artiste interprète, du producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes ou de l'entreprise de communication audiovisuelle.

Selon le CNAC (Comité National Anti Contrefaçon) cette activité représenterait aujourd'hui :
* 5 à 9 % du commerce mondial*
* 12 % du marché mondial du jouet*
* 10 % du marché mondial de la parfumerie et des cosmétiques*
* 5 à 10 % du marché européen des pièces de rechange automobiles*
* un chiffre d'affaires annuel estimé à 500 milliards d'euros. A titre de comparaison, celui de la traite d'êtres humains (prostitution/esclavage) est évalué à 7 milliards**.

La Douane, partenaire informatif

La diversification des contrefaçons, ainsi que l'adaptation technique permanente des contrefacteurs rend souvent difficile la distinction immédiate au cours du contrôle, par les services douaniers, des produits de contrefaçon. Ainsi, la réglementation communautaire et le code de la propriété intellectuelle prévoient la possibilité, pour les agents des douanes, de retenir des marchandises suspectes, afin de s’assurer, auprès du détenteur du droit de propriété intellectuelle, du caractère authentique ou non des produits. Cette procédure gratuite est fondée sur la demande d'intervention déposée par le titulaire de droit auprès de la douane, qui va attester de la nature contrefaisante de la marchandise.

La demande d'intervention constitue le support d’échanges avec les entreprises (transmissions régulières d'informations sur les produits, mise en place d'actions de formation des services... etc). L'efficacité de l'action de la douane lors de la mise en œuvre de la procédure de retenue implique une très bonne collaboration des entreprises titulaires de droits. La douane a, en effet, besoin pour agir efficacement et rapidement que les sociétés menacées requièrent son intervention, lui fournissent des informations précises sur les produits authentiques et mettent à sa disposition leur expertise lorsque les marchandises suspectes sont interceptées.

Les entreprises peuvent déposer des demandes d'intervention pays par pays (demandes nationales) ou pour plusieurs voire l'ensemble des pays de l'Union (demandes communautaires).
Quelques 1290 demandes d'intervention (communautaires et nationales) ont été déposées auprès de la DGDDI en 2010. La France représente, à elle seule, une part de 7 % de l'ensemble des demandes d'intervention déposées dans l'Union européenne et occupe la première place pour le nombre de demandes enregistrées par Etat membre.

Un acte sévèrement puni

Les sanctions pénales, prévues par le Code de la propriété intellectuelle, sont une amende pouvant aller jusqu'à 500 000 euros et une peine de prison de cinq ans. En cas de récidive, les peines encourues sont portées au double.

En outre, si l'infraction a lieu sur le territoire national, la loi autorise la fermeture, totale ou partielle, définitive ou temporaire, pour une durée de cinq ans de l'établissement ayant servi à commettre l'infraction. La loi permet également d'engager la responsabilité des personnes morales.

En ce qui concerne les sanctions douanières, le code des douanes prévoit, en matière de contrefaçons, marchandises prohibées à titre absolu, outre la confiscation des marchandises litigieuses, celle des moyens de transport et objets ayant servi à masquer la fraude, ainsi qu'une amende comprise entre une à deux fois la valeur de la marchandise de contrefaçon et un emprisonnement maximum de trois ans. Lorsque le délit douanier est commis en bande organisée, la peine d’emprisonnement est portée à une durée maximale de dix ans et l’amende peut aller jusqu’à cinq fois la valeur de l’objet de fraude.

Enfin, dans le cadre des contrôles opérés par les services douaniers sur l'ensemble du territoire français, les détenteurs ou les personnes qui transportent certaines contrefaçons doivent immédiatement produire des documents justifiant de la situation régulière de ces produits.

Document récapitulatif établi avec le CNAC et le service des Douanes