Post-confinement : « La reprise aura lieu et elle se prépare dès maintenant »

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Lors de son discours lundi 13 avril, le Président Emmanuel Macron annonçait une date de fin de confinement à compter du 11 mai. Début d’une reprise progressive pour certains, date non décisive pour d’autres, l’activité économique et sociale devra ainsi reprendre et ce, dans des conditions qui restent encore à définir. Quels enseignements avez-vous d’ores et déjà tiré de cette crise ? Comment commencer à se préparer à « l’après » ? Nous vous avons donné la parole. 

Julien Chambert, fondateur de CBT Conseils :

« Concernant mon ressenti vis-à-vis du discours du Président Emmanuel Macron, j’ai apprécié cette humilité. Nous voyons aujourd’hui trop de commentaires très négatifs sur les réseaux sociaux, notamment professionnels, et nous avions besoin d’entendre que oui, il y avait eu des erreurs de faites et que le gouvernement semblait en prendre les responsabilités. Il y a en ce moment un esprit de « moi j’aurais fait mieux » qui n’est pas agréable, ni constructif. En tant que chef d’entreprise cela m’a permis de déculpabiliser, car nous avons nous aussi navigué à vue et fait quelques erreurs. Pour ce qui est du 11 mai, je vois cette date comme le début de la fin du confinement. Les règles et directives sont encore attendues.

Concernant la reprise, je dois avouer que ces dernières semaines nous avons tous reçu un vrai « coup de massue ». Maintenant que nous avons accusé le coup il faut penser à la reprise, car elle aura lieu et qu’il faut la préparer dès maintenant. Il faut faire le deuil de cette année 2020, l’accepter et se concentrer sur l’avenir, être plus performant pour préparer la suite et réussir à garder la motivation des équipes. Pour cela, nous avons renforcé les liens visuels avec beaucoup de visioconférences et le lien de management. Ces liens de management que nous avions peut être trop délaissé auparavant et que je souhaite désormais renforcer. La transparence est également essentielle pour gérer au mieux cette crise. Après avoir mis en place le chômage partiel pour tous depuis le 6 avril, mais pas à 100%, j’ai été le plus sincère possible avec les équipes et nous nous concentrons sur de nouveaux projets.

Pour la reprise « physique » du travail, nous avons d’ores et déjà commandé une grande quantité de gel hydroalcoolique. De même, nous allons maintenir certains gestes barrières sur le long terme, comme arrêter de se faire la bise chaque matin. En revanche, les prochaines décisions seront prises de façon collégiale avec mes équipes, notamment concernant un potentiel retour au bureau. Le télétravail est très bien installé chez nous et nous n’imposerons donc pas aux personnes de revenir travailler physiquement tout de suite, cela se fera sur la base du volontariat. Cette crise m’a par ailleurs permis de me recentrer sur des choses plus essentielles dans mon travail et sur la gestion de mon planning. Je ne souhaite plus subir un rythme de travail et il va falloir que je maintienne le contrôle de mon planning à long terme pour aménager davantage de plages pour du management, réfléchir à des idées nouvelles… Repenser mon temps. »

Hugo Ricard, co-fondateur et CEO de Blue Valet :

« Tout d’abord, j’avais beaucoup d’attentes concernant le discours d’Emmanuel Macron. Nous avions de nombreuses informations plus ou moins officielles et cela est toujours plus engageant lorsque le Président prend la parole. En tant que chef d’entreprise, j’ai trouvé les annonces concrètes même si il reste des zones de flou et parfois quelques incompréhensions…

Concernant Blue Valet, l’inconvénient est que nous sommes uniquement présents sur le marché du Travel. Nous avions compris très tôt que cette crise allait prendre des proportions importantes et cela nous a permis d’être plus réactifs. Aujourd’hui, 95% de nos salariés sont au chômage partiel et nous avons dû gérer plusieurs urgences. Pour nous, le 11 mai n’est pas une date « utile ». Ce qui nous intéresse est le déconfinement total et la reprise du trafic aérien. Nous espérons une reprise des vols domestiques en juillet et en octobre pour l’international. Mais cette date marque au moins le début d’UNE reprise.

Au tout début de la crise, nous avons eu très peur pour la survie de la société puisque notre activité à progressivement été réduite pour atteindre le niveau 0. Puis lors des annonces concernant les aides aux entreprises mises en place par le gouvernement, nous nous sommes sentis soutenus, c’est important. Ensuite, cela nous a permis de prendre de la hauteur, de souffler et de redistribuer les cartes. Nous sommes désormais dans une logique de consolidation de nos fondations et de repenser notre offre en nouant davantage de partenariats. De plus, il y a un véritable retour à l’essentiel, notre objectif premier étant d’être utile à nos clients et de les rassurer.

Pour ce qui est du retour dans nos locaux, le télétravail avait déjà été mis en place chez nous et nous allons rester dessus jusqu’à ce que cela soit sans danger pour nos collaborateurs. Au bureau, nous envisageons de mettre à disposition des gels hydroalcooliques, de maintenir les gestes barrières sur les premières semaines de travail et de faire revenir nos salariés au compte-goutte. Il faudra avancer prudemment. Nos voituriers auront quant à eux des masques et des gants à disposition et les clients pourront désinfecter l’intérieur des véhicules grâce à des lingettes. »

Clotilde Nouhaud, DRH SAP Concur France :

« Nous parlons d’une épidémie, de la vie de nos citoyens, de la santé de toutes les Français, l’enjeu dépasse largement le cadre de l’entreprise. Suite aux dernières annonces nous pouvons dire que nous sommes sur la bonne voie, mais nous devons maintenir nos efforts si nous souhaitons venir à bout de cette situation. D’un point de vue business, nous savons que ce sera long et que le déconfinement se fera en plusieurs étapes dont les modalités précises restent encore à définir. De notre côté, nous souhaitons mettre en place les mesures qui vont garantir à nos collaborateurs, nos clients et partenaires toute la sécurité nécessaire à la poursuite de notre activité. Nous souhaitons également capitaliser sur ce que nous aurons appris lors de ce confinement, notamment en matière de communication, de gestion de crise, de collaboration à distance sur le long terme.

Chez SAP Concur des mesures avaient été prises avant l’annonce du confinement. Le chômage partiel, lui, n’est pas envisagé au sein du groupe SAP, nous avons la chance de faire partie d’une organisation où la technologie de nos services nous permettent de travailler à distance de manière optimale. En revanche, nous avons revu notre approche concernant les événements organisés initialement pour se dérouler en présentiel comme Fusion par exemple. Nous avons transformés ces événements en événements digitaux pour permettre au plus grand nombre de pouvoir y participer en toute sécurité. Aujourd’hui, des points quotidiens au sein de chaque équipe sont effectués avant tout pour préserver le lien et s’assurer du bien-être de chacun. Cela nous amène nécessairement à revoir notre manière de travailler. Il faut aujourd’hui trouver un juste équilibre entre gestion des attentes individuelles et intérêt collectif.

Pour ce qui est de la reprise, nous ne pouvons pas vraiment parler de reprise puisqu’il n’y a pas eu d’arrêt de notre activité. Si nous parlons du retour dans nos bureaux, nous suivrons bien évidemment les recommandations du gouvernement et de notre organisation. Nous pratiquions déjà  le télétravail avant ces événements ainsi que le « flex office » et nous allons désormais réfléchir aux mesures de distanciations sociales car nous avons des habitudes qu’il va falloir abandonner, comme se faire la bise pour se dire bonjour le matin. Il y aura très certainement un avant et un après confinement, les collaborateurs seront restés au moins 2 mois chez eux, seuls ou avec leur famille. Malgré les difficultés pour certains, d’autres auront passés plus de temps avec leurs enfants. Il y aura peut-être une volonté de ne pas perdre ce lien. Pour d’autres, il y aura certainement un besoin de passer beaucoup de temps avec leurs collègues et de limiter pendant un temps le télétravail. Une chose est sûre, nous essaierons de tirer des enseignements profitables à tous. »